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Chiff' - Page 90

  • Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates

    Que dire, que dire qui n'ai pas déjà été dit par une partie de la blogosphère...

    Reprenons donc du début. 1946, Londres, Juliet, la petite trentaine, célibataire s'interroge sur ce que va bien pouvoir raconter son prochain roman, court le pays pour la promotion de celui qui est déjà en librairie, se dispute avec son éditeur et cherche à découvrir qui peut bien être le mystérieux admirateur qui l'inonde de bouquets. Une petite vie somme toute tranquille qui va changer radicalement lorsqu'elle va recevoir une lettre d'un habitant de Guernesey, membre du mystérieux cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patate. Commence alors une correspondance assidue avec les membres du cercle qui va la mener sur des chemins dont elle ne soupçonnait pas l'existence.

    Mary Ann Shaffer est une sorcière. En quelques lettres, elle attrape le lecteur et l'attache sans porte de sortie aucune à l'histoire dont elle tisse la trame avec humour et tendresse. On rit, on verse quelques larmes, on s'enthousiasme, bref, on vit au rythme des lettres échangées. On y entend parler de la guerre et de ses horreurs, des difficultés de l'après entre ravitaillement et deuil, du bonheur de vivre encore et de profiter des petites choses de la vie, de l'amitié qui peut lier des êtres qui n'ont rien en commun, et de la force de la littérature face au pire.

    "J'aurais aimé connaître ces mots le jour où j'ai regardé les avions allemands atterrir les uns après les autres, et leurs navires déverser des soldats jusque dans notre port! Je n'arrêtais pas de me répéter: "Maudits soit-ils, maudits soit-ils." Je crois que penser au "jour radieux décline et nous entrons dans les ténèbres " m'aurait un peu consolé. Je me serais senti mieux préparé pour affronter la situation; au lieu de quoi mon coeur s'est liquéfié."

     Le ton est juste, enlevé, prenant, les personnages attachants. Isola, ses potions, sa perruche et son amour pour les soeurs Brontë, John Booker et sa passion pour le théâtre et Sénèque, Dawsey qui lit Charles Lamb dans sa grange, Amélia, Eben et son petit-fils, Sidney l'éditeur,.. Elizabeth, la grande absente, si présente encore dans les coeurs et la vie de tous. A tous, la littérature a amené ce qui manquait. Le courage de faire face, le plaisir de partager, un soutien face à la peine. Mary Ann Shaffer et Annie Barrows montrent tout leur amour des lettres et des écrivains (comment ne pas aimer un Oscar Wilde qui invente une vie de chat pour consoler une petite fille) dans leur roman. C'est un bel hommage aux livres et aux pouvoirs de la lecture. Saviez-vos d'ailleurs que les livres ont une vie propre?

    "Peut-être les livres possèdent-ils un instinct de préservation secret qui les guide jusqu'à leur lecteur idéal. Comme il serait délicieux que ce soit le cas."

    On peut en tout cas le supposer quand on voit les fabuleuses rencontres qu'ils permettent.

    Les auteurs n'en oublient pas pour autant de brosser un tableau juste des années de guerre. Années noires, mais surtout grises où le pire et le meilleur des hommes se révèle sans que le fait qu'ils soient dans le camp des gentils ou des méchants ne signifie quoi que ce soit. En filigrane, c'est de l'occupation, de la collaboration, de la résistance, des camps de concentration dont il est question. Et c'est un très beau portrait de femme et d'amour qui se dessine lettres après lettres. Parce que c'est aussi l'histoire d'Elizabeth qui est racontée par petites touches, femme de conviction, de courage et femme amoureuse de l'ennemi.

    J'ai gardé de cette lecture sa chaleur, son humour, son authenticité. C'est un roman doudou à conserver précieusement pour les jours de pluie.

     "Qu'est-ce que tu as bien pu raconter à Isola? Elle s'est arrêtée ici sur le chemin du manoir, où elle allait chercher Orgueil et Préjugés et m'a grondée de ne lui avoir pas parlé d'Elizabeth Bennet et de Mr Darcy. Pourquoi ne pas lui avoir dit qu'il existait des histoires d'amour sans hommes déséquilibrés et sans cimetières? Que lui avions-nous caché d'autre? Je me suis excusée pour cet oubli et je lui ai confirmé qu'Orgueil et Préjugés était l'une des plus belles histoires d'amour jamais écrites - et que le suspense la tiendrait en haleine jusqu'à la fin."

    Retrouvez les avis de Tamara, Fashion, Emjy, Delphine, Karine:), Brize, Caro[line], Stéphanie...

     

  • Les demeurées

     

    Jeanne Benameur est définitivement devenue pour moi une magicienne de la langue, une romancière de haute volée qui fait chanter les mots avec une poésie rare. Un jour mes princes sont venus m'avait séduit et touchée. Les demeurées restera pour moi un de ces tous petits livres qui gardent une couleur particulière dans les souvenirs de lecture, entre ombre et lumière. A la fois sombre tant ce qu'il raconte est infiniment dur, et lumineux pour l'espoir, l'amour qui se dégagent de ses pages.

    La Varenne est la demeurée du village. Sa petite Luce l'est donc aussi. Car que peut être l'enfant d'un demeuré, sinon demeuré lui-même. Maintenues à l'écart par les honnêtes gens, les gens normaux, elles forment un bloc d'amour, une seule âme pour deux corps. Jusqu'au jour où arrive mademoiselle Solange, l'institutrice. Par elle, le mur qui sépare Luce du monde va commencer à se fissurer.

     Mois de 100 pages et tellement de choses à en garder, tellement de choses dont il faudrait parler. La Varienne et Luce, deux êtres hors du monde et qui pourtant y vivent tellement plus que les autres. Tout ce qu'elles sont, tout ce qu'elles vivent passe par les sensations brutes, les odeurs, les couleurs, le toucher. Rien n'est réfléchi, intellectualisé. Pour la mère, rien n'est en dehors de sa fille. Et sans elle, elle n'est rien d'autre qu'une enveloppe vide qui ne trouve plus de sens à une existence dont elle a à peine le sentiment. La Varienne n'a pas les mots pour se dire. Juste les sensations.

    "Le regard qu'elle pose sur l'enfant qui part le matin sans un mot a la lueur rauque des cris qu'on ne pousse pas, la sauvagerie inarticulée de ces sons que parviennent à lancer, parfois, les muets. Luce le reçoit en plein coeur et son coeur devient "là-bas", quelque part tout en haut, sous l'aile d'un oiseau. Elle échappe.

    Il lui faut l'air qui manque trop quand leurs deux regards se croisent.

    Il y a quelque chose de vital dans les fuites de la petite, de vital et d'éperdu."

    Si Luce, parfois, s'échappe, c'est pour revenir toujours vers celle qui lui a donné le jour. Avec sa langue épurée, Jeanne Benameur entre dans l'intériorité de ces deux êtres hors norme, révèle cet "autrement" qui régit leur vie et leur permet de continuer à vivre malgré tout dans un bonheur si complet qu'il ne devrait pas exister et qu'il est incompréhensible à ceux qui les entourent.

     "Mademoiselle Solange repense aux contes que sa mère lui lisait dans son enfance.

    C'était là, quand elle écoutait de tout son être ces paroles auxquelles sa mère ne prêtait plus attention à force de les répéter qu'elle savait quelque chose.

    Quand les paroles trop lues se vident de leur sens, enfin légères, elles font leur chemin. Elles l'ont fait alors jusqu'à  cette part d'elle-même qu'on nomme peut-être l'âme et qui s'est endormie.

    Luce et La Varienne l'ont réveillée jusqu'à l'éblouissement.

    Comment faire désormais?

    Elle voudrait parler à quelqu'un.

    Devant elle, le secret tissé entre deux êtres.

    La Varienne et sa petite Luce peuvent se passer de tout. Même de nom.

    Le savoir ne les intéresse pas. Elles vivent une connaissance que personne ne peut approcher.

    Qui était-elle, elle, pour pouvoir toucher une telle merveille?

    Comme elle a été naïve de croire qu'elle pouvait apporter à un être quelque chose de plus!

    La petite est comblée. De tout temps comblée et si elle l'ignorait, en la faisant venir ici, dans cette école, elle le lui a appris. C'est la seule chose qu'elle lui ait enseignée sans le savoir: une douleur et un bonheur intense. Savoir qu'on manque à quelqu'un, que quelqu'un nous manque."

    Pourtant, le monde est là, présent, et même l'amour le plus fusionnel ne peut l'ignorer. Le monde pour Luce et La Varienne, c'est celui du village avec lequel elles cohabitent dans une indifférence partagée de part et d'autre et bienheureuse jusqu'à l'arivée de Mademoiselle Solange. Que représente-t-elle, cette jeune institutrice. L'école républicaine, le savoir obligatoire et égal pour tous, les interdits et le déchirement pour la mère et la fille contraintes de se séparer comme elles n'avaient encore jamais eu à le faire. Tout cela mais aussi le monde qui s'ouvre pour Luce. Pourtant elle résiste la petite, refuse ces mots, ce savoir qui la séparent de sa mère et sont une trahison.

    "Le vieil homme lui répond qu'on ne peut rien, rien, contre l'obstination d'un enfant. "On ne fait pas accéder au savoir les êtres malgré eux, mon petit. Cela ne serait pas du bonheur, et apprendre est une joie, avant tout une joie. Rappelez-vous toujours, Solange, une joie." La lettre du vieux professeur ne l'a ps réconfortée. Qu'a-t-elle fait de cette joie, mon dieu, qu'en a-t-elle fait, elle qui a précipité une enfant dans la maladie, dans l'absence, avec la bénédiction de tous ici?

    Si au moins on lui en voulait, si elle pouvait se battre, argumenter. Mais personne ne lui demande rien. Dans le village, les choses sont enfin en ordre. Et grâce à elle. Elle a servi ce qu'elle hait."

     Mais petit à petit, par des biais inattendus, le mur se fendille. Luce rencontre le monde, passe le seuil de l'amour maternel qui la maintenait enfermée. Elle se libère de sa mère. Ce que Mademoiselle Solange lui apporte, c'est ce qui lui manquait pour prendre son envol: la compréhension de mots. Cela m'a fait penser au magnifique Le vol de l'ibis rouge. L'importance de savoir lire et écrire pour entrer pleinement dans le monde. L'importance d'une rencontre qui peut transformer une vie. Pour Luce, c'est une institutrice, mais surtout, ce sont les fils de couleur, et la broderie qui lui permet de jeter sur le tissu ce qu'elle ne peut exprimer. "Le monde s'est ouvert. Chaque soir, elle brode les mots nouveaux, se les répète silencieusement." Un art qui la transcende et la fait exister autrement que par sa mère sans pour autant tuer l'amour qu'elles partagent.

    Il n'y a pas de jugement porté sur cet amour névrotique, sur la fusion de la mère et de la fille, sur l'intervention d'une institutrice qui ne pourra pas supporter cette rencontre et le doute qu'elle porte sur sa volonté de donner le savoir. Luce est aussi l'incarnation de ce que peut représenter le pas à faire entre ignorance et savoir, de la peur que l'on peut avoir lorsqu'on fait face à l'infinité de ce qu'il y a à comprendre et apprendre.

     PS: j'ai pensé pendant cette lecture à des films. Brodeuses, Séraphine...

    Dominique n'a pas aimé, Florinette si, tout comme Bellesahi. Un très beau billet de Sylvie avec une multitude de liens plus intéressants les uns que les autres.

     

    Jeanne Benameur, Les Demeurées, Denoël, 2000, 84 p.

  • Glamourama

    A l'issue d'une semaine à teneur hautement culturelle, il me faut, dans un grand élan de partage et d'amour universel, vous livrer mes réflexions sur deux films qui laisseront des traces, sinon dans l'histoire du cinéma, à tout le moins dans le coeur et l'âme de quelques cinéphiles avertis. Deux films, deux sex symbols, deux figures maternelles, des cascades époustouflantes, des courses-poursuites dantesques, des baisers torrides. Deux films, deux générations qui s'affrontent. James Bond in Quantum of Solace vs Troy Bolton in High School Musical 3. Deux films qu'avec deux LCAaussi scientifiquement curieuses que moi, nous avons vu, étudiés et disséqués.

    Commençons sur de bonnes bases.

    daniel-draig-big.jpgA ma gauche, The James Bond, j'ai nommé Daniel Craig. Sacré l'homme le plus sexy de l'univers par les LCA parisiennes dans un ensemble qui serait touchant s'il n'était pas effrayant. Un regard bleu azur (*soupire*), du muscle utile à revendre (© Choupynette), de la testostérone juste comme il faut, un art de porter le torse nusmoking qui mérite une renommée intergalactique, un romantisme soigneusement caché sous des dehors bourrus.

     

     

    A ma droite, Troy Bolton: le regard également azur, du muscle, du romantisme, du ressort et de l'énergie à revendre. A noter que dans une scène qui a déclenché chez les aventurières que nous sommes une hilarité explosive, il porte plutôt bien le tee-shirt mouillé. Certes pas aussi bien que Colin la chemise tout aussi mouillée, mais on peut noter un potentiel à développer.

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    S'il on en vient à discuter scénario, profondeur psychologique des personnages, ressorts dramatiques, il convient de reconnaître que chacun de ces films atteint des sommets dans son genre.

    Un espion au coeur secrètement brisé (sauf pour les millions de spectateurs suivants ses exploits, mais est-ce bien la question), un basketteur de talent déchiré entre ses aspirations secrètes à monter sur scène et amour débordant du basket. Leur drame commun? Les femmes... Comment s'étonner quand on entend (métaphoriquement hein, sinon je vais faire la fortune de mon pharmacien en achetant du paracétamol) les millions de coeurs énamourés qui battent à la vision de leurs exploits?

    A ma gauche, les James Bond Girls. Bien que j'ai eu des doutes sur le bien fondé du choix de certaines des dernières James Bond Girls (tout comme des James Bond eux-même, mais je n'en dirait pas plus de peur de risquer ma vie en rencontrant certaines fans de l'homme qui porte très bien le lamé bleu), l'arrivée de Daniel Craig a relevé le niveau. Belles , dangereuses, sexy même en marcel déchiré (du moins je suppose), séductrices jusqu'au bout des sourcils, elles crèvent l'écran.

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    Comme vous pouvez le constater, il n'y en a pas que pour nous, mesdames.

     

     

     

     

    Ceci étant, il y a du répondant dans la jeune génération. Armées de leurs gloss, de brosses à cheveux en guise d'arme de poing, le talon aiguille prêt à être dégainé, elles ont du potentiel.

     

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     Par contre, en terme de baisers torrides, l'avantage va sans aucun doute possible à notre James. Ou fais-je preuve ici d'une abominable cécité du au fossé générationnelle qui me fait préférer les pattes d'oies à la mèche et un torse dépassant avantageusement d'un maillot bleu dorénavant bien connu à un celui surplombant un baggy artistiquement tombant (le karma du jean est-il de tomber ou de ne pas tomber, telle est la question)? Les autres participantes à cette entreprise scientifique seront, je le pense, d'accord avec moi sur le fait que High School Musical 3 manque déséspérement de bisous. Notre  spécialiste es adolescentss'est demandé où diable Walt Disney avait bien pu faire passer les hormones qui normalement bouillonnent dans les petits coeurs tout mou des moins de 18 ans. Après mûre réflexion, je pense qu'il a du en faire don à Daniel Craig. Je ne vois que cette explication au fait qu'un seul et unique spécimen masculin soit aussi sexy. Que diable! Un maigre petit bisou et quelques bécots sur la joue, une petite valsounette et quelques étreintes prudes contre des baisers qui font monter la température d'une salle de cinéma à au moins 58,6°C!! La folle passion!!! Dans ce cas bien précis, rien ne vaut l'expérience. Elle évite de regarder vers les étoiles comme si Saint-Michel devait en surgir pour annoncer à nos tourtereaux un avenir radieux et pailleté dans le middle class américaine.

    18895350_w434_h_q80.jpg Le plus beau dans tout cela? La figure maternelle n'est pas oubliée. M., la fabuleuse M. qui couve du regard son James, inquiète de le voir prendre tant de risque (ou serait-elle atteinte du syndrome de l'infirmière elle aussi?), prête à le remettre dans le droit chemin comme le fait Miss D., professeur de théâtre d'une telle abnégation qu'elle prend tout les risques pour amener ses élèves au meilleur, se lançant dans des discours philosophico-orientatifs d'une ampleur encore jamais vue sur grand écran (ce ringard de Robin Williams peut aller se rhabiller avec ses élèves debouts sur les tables, les siens bondissent, grimpent aux murs, et poussent la chansonnette en même temps, si ce n'est pas du talent tout ça)! 

     Cela donne des cascades ébourstiflantes où nos élèves tourbillonnents, sautent sur les capots des voitures tels des super-héros, s'accrochent aux câbles. L'avantage reste cependant à James, capable de se relever après un saut en parachute calamiteux où il sert de coussin à sa James Bond Girl, galant homme comme il est, et de repartir comme si de rien n'était, vodka martini à la main. He's a real man mesdames! Quoi que, traverser la moitié des Etats-Unis dans une épave roulante pour danser la valse avec sa copine sur le campus de Stanford mérite sans aucun doute également une médaille.

     

     

    Passons à des choses bassement matérielles. Les voitures. En temps habituel, pour moi, une voiture est une chose avec quatre roues et un volant (les autres accessoires permettant de faire tenir roues et volant ensemble m'indiffèrent totalement) permettant d'aller d'un point A à un point B distants de moults kilomètres en polluant, certes, mais de manière bien plus pratique qu'avec mes simples petits petons. Dans le cas précis de James Bond, je me transformerais volontiers en mécanicienne. La scène d'ouverture de Quantum of Solace est à ce titre un moment de pur bonheur: une Aston Martin ET une Alfa Roméo dans une course-poursuite d'anthologie! On en oublierait presque (j'ai bien dit presque) que Daniel Craig est au volant. L'avantage de la maturité et d'être au service de Sa Majesté est de pouvoir massacrer de belles voitures. L'épave conduite par Troy n'a donc, vous le comprendrez, rien de bien alléchant pour mon petit coeur tout mou.

     

    Par contre, niveau paillette, High School Musical gagne! Ca brille, ça scintille, ça luit, ça papillote dans tous les coins en rose, en argent, en mauve, en bleu quand James n'est finalement capable que de nous offrir des explosions fort traditionnelles. Il faudra penser à inclure des paillettes dorées à la prochaine explosion d'avion, de bateau ou de voiture.

     

    J'en terminerai ici, laissant de côté mes réflexions sur le travail des stylistes (cette mini-jupe en lamé rose était d'un goût divin) et les mérites comparés des smokings portés à 40 ans et à 17 ans.

    Une seule question me taraude encore... Daniel Craig sait-il chanter?

     

    ps: une dancing queen de talents'est révélée à nous hier soir. Sa chorégraphie folle restera dans nos souvenirs émus. Elle sera sans nul doute engagée pour tenir son propre rôle dans High School Musical 4 (bientôt sur nos écrans je l'espère) ou le monde est injuste.

  • Le gros coup

    Robert and Brant, violents, indisciplinés, un brin ripoux, pas franchement beaux gosses. Robert and Brant que menace le coup de propre annoncé dans la police métropolitaine et qui sont bien décidé à ne pas laisser leur peau dans l'affaire. Reste donc à trouver le gros coup. L'idée imparable qui va les mettre définitivement à l'abri.

    Il ya une chose que l'on peut reconnaître à Ken Bruen, c'est son don pour fabriquer des personnages complètement dingues: un flic irlandais cinglé, vulgaire et imprévisible (Brant donc), un flic anglais dont la femme fréquente un bordel et qui sombre dans l'alcool et la dépression (Roberts cela va de soi), une fliquette noire (Falls de son petit nom) qui tente de survivre dans un univers dont les paillettes ont sacrément perdu de leur brillant, un tueur en série qui s'attaque à l'équipe nationale de cricket, quelques junkies pas piqués des hannetons et autres. Tout ce beau monde s'agite à qui mieux mieux, essayant de tirer son épingle d'un jeu où il ne peut pas y avoir de gagnants, écoute de la musique, tente de rester à niveau et se bastonne.

     Pour être franche, j'ai eu l'impression de retrouver l'univers des polars américains de mon père que j'avalais à la chaîne adolescente. Ceux dans lesquels il y avait des privés, des flics pas corrects, misogynes, racistes parfois, un humour aussi violent que les rebondissements de l'intrigue et des répliques pas franchement politiquement correctes. L'hommage à Ed McBain et son 87e district est d'ailleurs ouvert et vibrant. Et il faut bien dire que ça marche: on veut savoir où vont nos deux affreux, ce que vont devenir les (des)espoirs amoureux de Falls, on rit même parfois franchement à certaines situations et à certaines répliques. Ca se lit vite, avec plaisir. Mais j'avoue une petite déception: à mon avis, la psychologie des personnages est un peu sommaire, les rebondissements un peu attendus. Paradoxalement, malgré ce petit bémol, j'ai envie d'aller la suite de leurs aventures et d'aller faire un tour du côté de Jack Taylor! C'est qu'on s'y attache quand même aux affreux!

    L'avis d'Yvon, celui de McOliversur Polarnoir.

     

    Merci à Chimère qui me l'a envoyé dans le cadre du London Swap!

     

    Ken Bruen, R&B - Le Gros Coup, Folio Policier, 2005, 272 p.

  • Les dames de Kimoto

    Quatres générations de femmes japonaises, quatre destins et l'évolution de la condition féminine au Japon de la fin du 19e siècle à l'après Seconde guerre mondiale. Toyono la grand-mère qui incarne la tradition, Hana sa petite-fille déchirée entre tradition et modernité, Fumio sa fille résolument tournée vers le monde moderne, et Hanako qui, enfin, parvient à conjuguer tradition et modernité dans une certaine sérénité.

     Sawako Ariyoshi, décédée en 1984 est très connue au Japon pour ses romans, ses nouvelles, des pièces de théâtre qui racontent la condition féminine au Japon. Elle a souvent été comparée à Simone de Beauvoir. Comme, je l'avoue sans fard, je ne connais l'oeuvre de Simone de Beauvoir que par oui-dire, ne vous attendez pas à une comparaison circonstanciée entre ces deux auteurs! Tout ce que je vais pouvoir faire est vous parler de cette merveilleuse chronique familiale.

     Le monde que décrit Sawako Ariyoshi est un monde en mutation. Ce pourrait être celui des paysans, celui de la classe moyenne, c'est celui de familles riches, propriétaires de terres ou de commerces, descendants de samouraïs parfois. Un monde luxueux, régi par des codes précis, contraignants où, traditionnellement, les femmes quittent leur famille le jour de leur mariage avec un homme qu'elles n'ont souvent jamais rencontrés. Un monde où leur statut dépendra de celui de leur époux, aîné ou cadet de la famille, de leur bonne éducation et de leur sens de l'honneur. Un monde qui commence à se déliter avec l'ouverture du Japon aux étrangers. 

    Ce monde est celui de Toyono la grand-mère. Déjà, Hana, qu'elle a élevée et à qui elle a fait donner une éducation bien plus poussée que la normale, tout en respectant le code de conduite de l'épouse japonaise traditionnelle, se confronte au féminisme naissant. C'est un personnage ambigu Hana. Tout comme Toyono d'ailleurs. Loin de l'image de la femme et de l'épouse soumise, silencieuse, elles sont toutes deux des femmes de têtes, dirigeant leur petit monde d'une main d'autant plus ferme qu'elle est enveloppée de soie et subtile. Elles ne sont pas esclaves, mais se sont mises au service d'un idéal, de leur idéal, celui de l'Epouse.  Cela, Hana le proclame jusque dans les pages d'une revue féministe: "Le texte lui-même, dans une prose fleurie, relatait la vie d'une femme qui, ayant la conviction de porter en elle l'esprit de la famille traditionnelle, estimait de son devoir de consacrer son existence à devenir l'esclave, en même temps que l'élément indispensable de la famille dans laquelle elle entrait par le mariage."  Et son existence prend fin quand se termine celle de son mari: "Elle n'avait jamais juré que par Keisaku et elle ne voulait pas lui survivre dans le monde qu'il s'était forgé. Elle ne pouvait pas accepter de devenir une de ces femmes des temps nouveaux qui prétendaient s'affirme. Accomplir quelque chose par elle-même au lieu de tenir son pouvoir du fait qu'elle était dans l'ombre de son mari lui paraissait aller contre toutes les vertus féminines auxquelles elle croyait si fermement. [...] D'après elle une femme, même forte et intelligente, qui n'avait pas d'homme au côté duquel se tenir était inévitablement condamnée."

    Sorte de personnage de transition entre deux mondes, elle est déchirée entre une indépendance possible mais qui heurte toutes ses convictions et un univers rassurant dont elle maîtrise les ressorts. Le changement arrive par sa première fille, Fumio la rebelle qui affirme ses opinions politiques, part faire ses études seule à Tokyo, épouse l'homme de son choix, refuse les vêtements traditionnels. Sa force de caractère, elle la tient de sa mère et de sa grand-mère, mais l'utilise différemment. Le propos du roman est finalement de montrer comment deux femmes si semblables peuvent ne pas se comprendre: chacune s'enferme dans une forme d'extrémisme, incapable de voir ce que l'autre peut lui apporter. C'est toute la confrontation entre tradition et modernité qui se révèle à travers les relations de la mère et de la fille. Avec la possibilité, à la quatrième génération de parvenir à concilier deux mondes, héritage et avenir.

    C'est donc cette évolution de mère en fille que décrit Sawako Ariyoshi, l'inéluctable changement du monde, à l'image de ce fleuve que descend Hana le jour de son mariage. Ce fleuve que les mariées ne doivent pas remonter sous peine de mourir. C'est, quand y pense une belle métaphore. Le fleuve comme image de l'évolution, d'une force contre laquelle on ne peut aller sous peine de tout y perdre. Ni Toyono, ni Hana, ni Fumio n'ont finalement le choix de ce qu'elles sont. Elles vivent avec les armes que leurs ont donné leur éducation et leurs convictions. Et tout le roman est à l'image de cette métaphore; poétique, évocateur, profond. Profond parce que ses personnages le sont, parce qu'au delà de la condition féminine, il y est question de politique, de société, de guerre, de diplomatie. On peut s'y perdre, s'ennuyer parfois, mais on ne peut abandonner tant il y a à prendre et apprendre au fil des pages sur un Japon complexe et sur les être humains.

     

    Sawako Ariyoshi, Les dames de Kimoto, Bibliothèque cosmopolite, Stock, 1991, 283 p.