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Chiff' - Page 77

  • Boomerang

     

    Sur le route de Noirmoutier, l'île des vacances de l'enfance où ils ont fêté ses quarante ans, et où ils n'étaient pas retournés depuis 1973, Mélanie a tenté de dire quelque chose à son frère Antoine avant d'être interrompue par un violent accident qui manque la tuer. Pour Antoine c'est une électrochoc. Divorcé d'une femme qu'il aime encore, dépassé par ses enfants adolescents, lassé par un métier qu'il exerce sans plus d'envie, il part sur les traces de ce passé marqué par la mort de la mère et le silence entretenu par une famille bourgeoise fermée sur ses secrets. L'occasion de panser les blessures et de rencontrer un drôle d'ange en Harley Davidson qui va secouer un quotidien bien trop englué dans la routine.

     

    Je trainais des pieds. Il faut dire que ma première rencontre avec la prose de Tatiana de Rosnay s'était soldée par une solide déception. Mais voilà bien la preuve qu'en littérature comme ailleurs il ne faut pas se laisser arrêter par les préjugés: j'ai beaucoup, beaucoup aimé. C'est drôle, enlevé, sympathique, un peu triste et déprimant, c'est la vie comme elle vient.

    Au centre du récit, un secret de famille, un de ceux qui alourdissent la vie sans qu'on le sache, faute de le connaître. La quarantaine dépressive, Antoine traîne ce secret, celui de mère, la si jolie Clarisse, décédée d'une rupture d'anévrisme alors qu'il était enfant et si vite effacée de la chronique familiale. En partant sur ses traces, Antoine va peu à peu réapprendre à se tenir debout et à affronter la vie, à la croquer à pleines dents, à apprécier chaque miette d'amour et de passion qui lui est accordée. On le suit, aussi avide que lui de découvrir la vérité sur cette femme. Boomerang, c'est la claque parfois nécessaire pour s'extraire de l'étouffante routine, de la peur qui pousse à se contenter de ce que l'on a et qui ne nous satisfait pas. Ça n'a l'air de rien comme ça, le récit de ce quotidien pas très brillant, mais les personnages, Antoine en tête, sonnent juste et deviennent au fil des pages en quelque sorte des amis que l'on n'a pas envie de laisser.

    Entre la chronique familiale, l'histoire d'amour, l'enquête pas tout à fait policière, Tatiana de Rosnay parle avec finesse et humour de la manière dont on peut se libérer en comprenant d'où on vient, en se retrouvant et en l'acceptant. Au fond, elle parle de ces amours si compliquées: entre amants, entre parents et enfants, entre frères et soeurs,... de la difficulté d'exprimer ses sentiments, la manière dont les non-dits s'installent et finissent par tout détruire, la manière aussi dont la routine étouffe l'amour sans qu'on s'en rende compte. En quittant Antoine et sa tribu, on a parcouru un bout de chemin, et pris conscience, comme eux tous, que la mort est si présente qu'il ne faut pas oublier de vivre. Banal sans doute, mais qui n'a pas oublié de profiter de la vie en se laissant engloutir sous les soucis et les problèmes du quotidien?

     

    Un roman ui fait du bien.

    L'avis de Cuné, de Laure, de Clarabel, d'Hydromielle.

     

    Tatiana de Rosnay, Boomerang, Ed. Héloïse d'Ormesson, 2009, 4/5

  • Princess Bride

     

    "Je m'appelle Inigo Montoya. Tu as tué mon père, prépare toi à mourir."

    Ça vous dit quelque chose?

    Comment ça non!

    Mais c'est tout simplement inadmissible!

    Bon, en même temps, j'ai attendu une grosse dizaine d'années avant de me pencher sur le cas du roman, et que c'est un brin l'hôpital qui se paie la poire de la charité, mais moi, ce que j'en dis, c'est pour votre bien. Un roman aussi délicieusement absurde devrait être reconnu d'intérêt public et le film qui en a été adapté par Rob Reiner est un monument d'effets spéciaux en carton pâte absolument indispensable.

    Revenons au point de départ pour ceux qui vivant sur une autre planète n'auraient jamais entendu parler de la plus belle femme du monde, du pirate le plus sanguinaire, du géant turc adepte de la rime et de son mai espagnol à l'épée.

    Il était une fois un petit garçon très malade. Par amour, son père va lui lire chaque soir le roman du plus célèbre romancier florin: Princess Bride. Acte qui va avoir une conséquence pour le moins inattendue: le petit garçon passionné par le sport va se transformer en petit garçon passionné par les romans d'aventure, puis, en écrivain et scénariste. Un écrivain qui va un jour découvrir que son père ne lui a raconté que les passages les plus palpitants d'un roman fort érudit et parfaitement enquiquinant et qui va décider de donner au monde ce que lui même a eu: l'immense bonheur des meilleurs moments de Princess Bride. L'histoire de la plus belle femme du monde et de sa fabuleuse histoire d'amour avec un garçon de ferme.

    Je l'avoue, je ne m'attendais pas à ça: pour moi, Princess Bride était un roman d'aventure censément prometteur et sans aucun doute très sympathique. En aucun cas une réflexion drôle, passionnante, intelligente et haletante sur le rôle de l'écrivain et la puissance de la littérature. Bien entendu, il y a de l'amour, des rebondissements, des drames, des duels au clair de lune, des marais dangereux et un prince infiniment méchant, des falaises, des pirates, des îles désertes et inaccessibles, des bestioles dangereuses, une superbe princesse et un amour contrarié. Il y a tout ça et c'est tout simplement fabuleux. Un conte parfaitement maîtrisé, plein d'un humour pince-sans-rire réjouissant et d'un suspense auquel il est difficile de ne pas se laisser prendre. La princesse est une parfaite cruche, son amoureux est sans doute l'homme le plus courageux et le plus intelligent du monde mais l'amour ne l'arrange pas, le géant poète est un bonheur, et Inigo Montoya un duelliste absolument réjouissant. J'ai retrouvé avec un plaisir inattendu pas le zoo de la mort, le marais, les falaises et la ferme.

    Mais il y a aussi l'autre Princess Bride: William Goldman celui qui a osé abréger le roman de Morgenstern au prix de procés interminables et de risques inimaginables pour sa vie familiale et professionnelle. A ce titre, il intervient sans vergogne aucune dans l'histoire qu'il raconte, expliquant dans des passages en italique les raisons pour lesquelles il a fait des coupes, racontant les difficultés rencontrées au cours de son travail, ses souvenirs de ce que son père lui racontait. C'est maîtrisé et tout aussi drôle que le récit principal. La mise en abyme (c'est pas ça? Je m'en fiche) est assez spectaculaire quand on pense qu'il porte un regard critique sur une oeuvre censée exister qu'en fait il a écrit lui même. Ce n'est sans doute pas clair, mais je me comprends! On se laisse prendre totalement à sa fausse autobiographie! Un roman dans un roman dans une autobiographie qui n'est pas une autobiographie dans un roman.

    Goldman est sans conteste un maître du récit d'aventure, apte à faire tourner en bourrique tout lecteur normalement constitué. Plus il explique les coupes, plus il donne envie de se pencher sur une version originale qui n'existe pas. Et il a le culot d'offrir le premier chapitre d'une suite qui ne sera pas publié puisque ce la lui est interdit sous peine de procès... Je vous laisse imaginer les grincements de dents...

    Bref, avec tout ça j'ai une folle envie de revoir le film! Et de bénir le hasard qui a fait atterrir le roman sur ma PAL, m'a fait tomber sur des billets follement enthousiastes et a provoqué chez moi une petite crise de lecture qui m'a poussée dans les bras confortables (et métaphoriques) de Monsieur Goldman.

     L'avis de Karine, de Pimpi.

     

    Et pour la route...

     

    William Goldman, Princess Bride, Bragelonne, 2007, 4/5

  • La promesse

     

     Fedia et Vania sont apprentis mécaniciens de la marine soviétique. L'amitié profonde qui les lie, scandée par les dimanche passés dans une anse face à la mer leur permet de garder intacte un peu d'innocence et de rêve. Jusqu'à l'affectation, l'inévitable séparation, et l'oubli. Jusqu'à la rupture de la promesse qu'ils s'étaient fait.

    Cette promesse faite par deux garçons à peine sortis de l'enfance est celle de ces amitiés éternelles que l'on peut nouer parfois à l'adolescence, avec le sentiment que rien ni personne ne pourra  jamais les briser. Une amitié absolue, profonde, viscérale, au point que l'on se demande à quel point ce n'est pas un amour contrarié par le poids du regard de l'institution militaire et de la société. L'histoire de ces quelques mois de formation, de cette amitié, le lecteur la découvre à travers les souvenirs de Fedia qui remonte vers la source d'un lac, puis vers la source de la rivière qui alimente le lac. Ce temps de navigation, à la rame, au moteur avec les rencontres de hasard que l'on fait aussi sur l'eau est l'occasion pour lui de se remémorer cette amitié brisée il y a si longtemps et qui n'a plus aucune chance de revivre puisque Vania est mort. La symbolique est forte: ce trajet que fait Fedia est une remontée physique, mais aussi mentale vers vers l'événement fondateur de son passage à l'âge adulte. Fedia cherche l'endroit parfait pour répandre les cendres de son ami, celui qui le renverra en écho à cette anse où il se reposait autrefois avec lui. Une manière de renouer les fils de son histoire, et de guérir cette vieille blessure qui, on le devine, a fini par tuer Vania. De reprendre le cours d'une vie emplie d'un enfant et de ses jeux.

    Hubert Mingarelli offre à ses lecteurs le portrait de beaux personnages en quête d'eux-mêmes et de superbes paysages dans une langue sobre, épurée mais poétique et évocatrice. Le lire, c'est un peu entrer en ascèse. Il se passe peu de choses, il y a peu de mots, pas de lyrisme. Ce n'est pas nécessaire pour aller au fond des êtres et des choses. Hubert Mingarelli n'a pas besoin de grand chose pour faire voir et sentir les berges de la rivière, la sérénité et la peur qui se dégagent d'un lac la nuit, la douceur de la lumière filtrée par le feuillage des arbres, la douleur du souvenir et l'envie de vivre. C'est entre les mots, dans ce qui n'est pas écrit et qui n'a jamais été dit par Fedia et son ami que l'essentiel se joue et se laisse deviner.

     C'est un  roman, pudique, qui attrape mine de rien le lecteur dans ses filets et l'emmène faire un beau voyage immobile.

    L'avis de Cathe, de Martine Laval.

    Hubert Mingarelli, La promesse, Seuil, 2009, 3.5/5

  • Le mur invisible

     

    Une catastrophe, dont on se saura rien, si ce n'est qu'elle laisse une femme seule dans un chalet des Alpes autrichiennes, entourée par un mystérieux mur invisible et infranchissable. Hors de ses limites, tout être vivant semble transformé en pierre. Après l'espoir, vient à la narratrice la certitude qu'elle est le dernier être humain en vie, et que nul espoir de secours n'existe. Cest alors la survie qu'il faut organiser, avec l'aide de quelques objets de première nécessité et de quelques animaux familiers.

    Un coup de poing. Un de ces rares et ahurissants coups de poing littéraire que l'on croise parfois sur sa route de lectrice et qui laisse exsangue. Un coup de coeur aussi pour ce merveilleux roman d'une intelligence, d'une force et d'une profondeur plutôt peu commune qui raconte à travers le voix unique de la narratrice l'humanité, la solitude, la manière dont on fait face à l'absence d'espoir, à soi-même aussi et à la folie qui guette. L'histoire du mur invisible est un peu celle de l'île de Robinson, mais dans une variation moderne. Et le naufrage est celui de l'humanité toute entière. Il n'y a pas d'explication à ce naufrage, rien de rationnel à quoi se raccrocher. Le lecteur reste dans la même ignorance que l'héroïne parce que ce n'est pas la catastrophe qui importe, mais le combat pour sa survie que celle-ci persiste à mener, la relation qu'elle noue avec les quelques animaux qui ont survécu avec elle, la réflexion que la solitude permet sur l'humain et le long chemin qu'elle entreprend pour s'adapter à ce nouveau monde. Autant le dire, le résultat est noir, très noir. Ce n'est qu'après quelques années de survie dans des conditions extrêmes que la narratrice prend la plume pour raconter ce dont elle se souvient des saisons qui ont défilé, de l'espoir qui est mort peu à peu, de l'expérience de la peur, de l'apprentissage de la survie et du travail quotidien pour cultiver, soigner les bêtes, sans jamais devoir compter sur un autre que soi. Ce qu'elle apprend, c'est finalement sa propre humanité face à l'animal, à la nature, et aux souvenirs de l'ancien temps. L'inanité de la recherche d'un sens à ce qui n'en a pas.

    "Les humains sont les seuls à être condamnés à courir après un sens qui ne peut exister. Je ne sais pas si j'arriverai un jour à prendre mon parti de cette révélation. Il est difficile de se défaire de cette folie des grandeurs ancrée en nous depuis si longtemps. Je plains les animaux et les hommes parce qu'ils sont jetés dans la vie sans l'avoir voulu. Mais ce sont les hommes qui sont sans doute le plus à plaindre, parce qu'ils possèdent juste assez de raison pour lutter contre le cours naturel des choses. Cela les a rendus méchants, désespérés et bien peu dignes d'être aimés. Et pourtant il leur aurait été possible de vivre autrement. Il n'existe pas de sentiment plus raisonnable que l'amour, qui rend la vie plus supportable à celui qui aime et à celui qui est aimé. Mais il aurait fallu reconnaître que c'était notre seule possibilités, l'unique espoir d'une vie meilleure. Pour l'immensz foule des morts, la seule possibilité de l'homme est perdue à jamais. Ma pensée revient sans cesse là-dessus. Je ne peux pas comprendre pourquoi nous avons fait fausse route. Je sais seulement qu'il est trop tard."

    Le regard qu'elle porte restrospectivement sur celle qu'elle était, sur l'évolution qu'elle a connu, les disgressions qu'elle se permet en écrivant qui annoncent des événements et disent beaucoup sur ce qu'elle est devenu donnent à la narration un ancrage dans la réalité, un impact encore plus fort que si elle rédigeait au jour le jour ses impressions. On sent ainsi venir les drames, les joies, le désespoir, et c'est à la fois fascinant et atroce.

    C'est un roman perturbant qui ramène à des questions essentielles: qu'est-ce que l'humain, lui est-il possible de vivre en accord avec la nature et avec l'animal, existe-t-il encore dans la solitude, quel sens peut avoir la vie en société quand elle ne recouvre que hypocrisie et haine de soi, que deviennent les concepts humains quand l'humain n'existe plus? Peut-on abjurer son humanité et que devient-t-on si on le fait? Et au fil des lignes, se révèle pour elle et pour le lecteur cette vérité fondamentale: si elle fait face à une solitude totale et imposée, celle que l'on vit au quotidien dans notre commerce avec nos semblables n'est-elle pas plus atroce? Quand on ne peut pas parler de ses peurs et de ce qui importe vraiment, quand nous nous interdisons de parler ou d'exprimer certaines choses socialement inacceptables?

    " J'avais déjà bien trop souvent et bien trop longtemps attendu des hommes ou des événements qui n'étaient jamais arrivés ou bien qui étaient arrivés si tard qu'ils ne pouvaient plus rien représenter pour moi. Pendant le long chemin du retour, je repensai à) ma vie passée, qui m'apparut insuffisante à tous points de vue. J'avais réalisé bien peu de ce que j'avais voulu, et quand j'étais parvenue à réaliser quelque chose, je n'en voulais déjà plus. Il en allait probablement de même pour tous mes semblables. C'est ce que nous évitions d'aborder quand il nous arrivait de parler ensemble. Comme je ne crois plus avoir l'occasion de m'entretenir avec quiconque, j'en suis réduite à de simples suppositions. Au moment où je revenais de la vallée, je n'avais pas encore compris que ma vie passée venait brusquement de prendre fin, ou plutôt ma tête seule le savait et c'est pourquoi je n'y croyais pas. Ce n'est que lorsque la connaissance d'une chose se répand lentement à travers le corps qu'on la sait vraiment. C'est ainsi que je n'ignore pas, comme tout un chacun, que je vais mourir, mais mes pieds, mes mains, mes entrailles l'ignorent encore et c'est pourquoi la mort me semble tellement iréelle. Beaucoup de temps c'est écoulé depuis ce jour de juin et je commence peu à peu à prendre conscience que je ne pourrai plus jamais revenir en arrière."

     Un roman essentiel, fondamental, un chef d'oeuvre que je ne saurais trop conseiller.

    L'avis de Ma.

    Marlen Haushofer, Le mur invisible, Actes Sud, 1985, 253 p., 5/5

  • Régals du Japon et d'ailleurs

    Exquis d'écrivain... Cette collection avait tout pour me plaire: des écrivains prenant la plume pour raconter leurs émois culinaires, leurs gourmandise, leurs plaisirs et leurs voyages gustatifs. Et pourtant, le premier des contacts avait été peu concluant, au point de m'éloigner pour longtemps de ces jolis petits livres. Il a fallu que Cathulu m'envoie fort gentiment son exemplaire de Régals du Japon et d'ailleurs, puis que je me décide à l'ouvrir. Je n'ai cédé qu'à l'occasion du Salon du livre où il me fallait un petit livre léger à bouquiner dans le métro entre chez moi et l'Antre de la Perdition, ce qui m'a finalement permis de passer un très agréable voyage!

    Dominique Fortier ne parle pas d'elle, en tout cas pas directement. Dans une série de scénettes très différentes, elle raconte des histoires qui toutes, tournent autour de la cuisine, celle que l'on fait, celle que l'on déguste, celle que l'on attend et que l'on partage. On se promène au Japon, à Singapour, dans les montagnes françaises, en Afrique, à Metz, dans le Pacifique à la rencontre de gourmands agréables à fréquenter. Non pas que le tout me laissera un souvenir impérissable, mais j'ai été accrochée par le premier chapitre, où il est question de potiron, élément, il faut l'avouer, essentiel de mon alimentation quand la saison en est venue. Et puis on sent la gourmande derrière la plume, l'envie de bonnes choses, les souvenirs gourmands qui irriguent l'écriture. J'en aurais presque eu faim! Les dialogues et les situations croquées du bout de la plume sont parfois cocasses, parfois pittoresques, parfois les deux, en tout cas, elles sonnent juste et vécues et allèchent le lecteur, ce qui est le but de l'opération!

     Merci Cathulu, ce petit livre a effectivement trouvé sa lectrice! L'avis de Ma cuisine rouge.

    Dominique Fortier, Régals du Japon et d'ailleurs, Nil, coll. Exquis décrivains, 3/5