Alors que Willie Upton rentre dans sa bonne ville natale de Templeton pour panser ses plaies après une déception amoureuse en forme de cataclysme, le cadavre d’une étrange créature émerge à la surface du lac déclenchant une tempête médiatique. Mais ce n’est rien face aux bouleversements familiaux que va vivre Willie en quelques jours : sa mère Vi, ancienne hippie, se décide à lui révéler qu’elle n’est pas le fruit d’amours libres dans le San Francisco des années 1970, mais l’enfant d’un homme de la ville dont elle refuse de donner le nom… Plutôt que de se morfondre sur son sort et la crevette qui a pris racine en elle, Wilile se décide de percer le secret de ses origines paternelles.
Il y a des romans comme ça, dont vous savez dès la première page que vous allez les dévorer. J’ai rencontré Willie au détour d’une première page, un drôle de monstre un peu plus loin et j’étais embarquée dans une histoire un peu folle que je n’ai pas pu lâcher avant la dernière page. Lauren Groff ne révolutionne pas la littérature, mais elle offre un roman remarquable, à la fois drôle et émouvant, passionnant et superbement construit. A la vie de Willie lancée dans ses recherches répondent les extraits de journaux intimes, les correspondances, les testaments, les romans, les journaux qu’elle découvre et qui dessinent par petits bouts l’histoire de sa famille et celle de sa ville puisque par sa mère et par ce père qu’elle ne connaît pas, Willie Upton est apparentée au fondateur de Templeton, Marmaduke Temple. Du coup, c’est non seulement une saga familiale avec ses fous, ses trahisons, ses drames et ses bonheurs qui se dévoile, mais aussi l’histoire d’une ville américaine des premiers pionniers à aujourd’hui. A la fois quête et enquête, la recherche de Willie met au jour les secrets cachés par des gens bien sous tout rapport, les relents fétides d’une réussite perçue comme fondatrice du rêve américain, les noirceurs d’une aristocratie nouvelle. On va d’arbre généalogique modifié en arbre généalogique complété au gré des découvertes de Willie, le tout agrémenté de portraits qui donnent corps aux voix qui se sont fait entendre et un petit air de réalisme au récit.
C’est passionnant et servi par des personnages hauts en couleur, fascinants, plus complexes qu’ils n’apparaissent au premier abord, tous pourvus d'une petite bizarrerrie qui les rends proches. La bibliothécaire poussiéreuse et ses brownies, les joyeux joggueurs et leurs commérages, la jeunesse de Vi et ses amours religieuses... Dans la petite ville de Templeton, on a une sorte de creuset de toute la complexité des relations humaines, et ce à travers le temps. J'ai particulièrement apprécié la correspondance vénéneuse entre deux dames bien sous tout rapport que découvre Willie, les secrets soigneusement dissimulés pour éviter l'opprobre qu'elle découvre souvent par hasard. Ou que d'autres avant elle avaient soulevé au prix de leur carrière et d'une levée de bouclier. On ne touche pas impunément aux icônes du rêve américain... C’est souvent drôle malgré le tragique qui empreint le destin de la plupart des personnages.
Et puis il y a cette petite touche de fantastique : le monstre du lac, le fantôme qui hante la maison de Upton… Des manifestations qui sont le symbole des secrets profondément enfouis qui modèlent les familles. A travers Willie qui cherche à découvrir son père, Lauren Groff parle de la filiation, des dissimulations, des mythes qui se construisent sur ce qui a été caché et n’attend que le hasard pour être révélé, du fait que les monstres ne sont pas toujours ce, ou ceux que l'on perçoit au premier abord comme tel.
Roman à tiroirs, roman historique, roman humoristique, roman tragique, Les monstres de Templeton est un petit bijou qui me fait attendre avec impatience le nouvel opus de l’auteur dont c’était le premier roman.
C'est Chimère qui m'a donné envie, mais Cuné en parle aussi, tout comme Cathulu, Manu,...
ps: le trouve la couverture 10/18 absolument superbe!
"C'est aussi bien que Le cercle littéraire des amateurs d'épluchures de patates" qu'il disait le monsieur. Et bien vous savez quoi? Il avait raison. Et tort aussi. Mais ceci est une autre question.
Precious Jones, 16 ans, illettrée, enceinte pour la seconde fois des œuvres de son père, brimée par sa mère, une vie d’ors et déjà brisée. Mais c’est sans compter avec l’espoir et les rencontres qui parfois permettent de changer les choses.
Que dire du film... A sa manière, il est aussi un choc. J'en suis sortie l'estomac noué et sans voix. Sans condescendance, avec justesse, Lee Daneils a adapté le roman de Sapphire, lui rendant un hommage juste et parvenant à traduire ce qui fait la force du texte sans aucun voyeurisme. Bien sûr, certains choix, comme de se focaliser sur les rêves de Precious aux pires moments peuvent par moment sembler un peu artificiels, mais ils évitent de sombrer dans le sordide et de rendre le film totalemement insupportable. Ceci dit, le réalisateur épargne ainsi au spectateur ce que la romancière n'épargne pas à son lecteur. La crûdité de certaines scènes dans le roman est rare. Quand au jeu des acteurs, il est impeccable pour la plupart d'entre eux. Precious est superbe, sa mère glaçante. Dommage que la critique du système social qui transparaît dans le texte soit édulcoré dans le film: il n'est jamais question du rôle de l'école et de ses failles, et le personnage de l'assistante sociale est un peu trop idyllique même si cela a aussi le mérite de montrer que le rôle des travailleurs sociaux est loin d'être facile. Bref, un film qui présente quelques défauts, mais qui a le mérite de remettre sur le devant de la scène l'histoire de Precious même s'il ne peut pas rivaliser avec lui en terme de force.
Agnès est fille de pasteur d'un village du nord de l'Angleterre. Ses parents ayant subi un revers de fortune, elle décide de subvenir à ses besoins en occupant un des rares emplois accessibles à une jeune femme de bonne famille: gouvernante. Mais il y a loin des rêves à la réalité.
Orpheline, Jane Eyre est élevée par sa tante, Mrs Reed, liée par une promesse faite à son époux mourant. L'enfant, maltraitée par ses cousins, considérée comme inférieure, menteuse et étrange ne trouve pas sa place dans la famille et est envoyée à l'école de Lowood. Malgré les conditions de vie désastreuses de l'établissement, elle survit pour devenir enseignante, puis gouvernante dans la maison de Mr Rochester. Dès lors, son destin est tracé.
Le Jane Eyre version 2006 ne fait d'ailleurs pas exception! Et pas seulement parce que l'acteur choisi pour le rôle de Rochester (Toby Stephens) est Rochester. Enfin, disons que c'est ce qui a commencé à vraiment me convaincre! Brun, ténébreux, un charme fou sous des traits taillés à la serpe, le cheveu qui ondule, l'oeil qui frise, en deux minutes, je ne voyais plus Rochester autrement! Certes il a fallu attendre un moment son apparition, mais comme Ruth Wilson incarne également à merveille Jane Eyre et que les décors sont somptueux, faire preuve de patience n'a pas été trop difficile!
