Les humains ont essaimé dans l'espace, ont colonisé les planètes viables quand elles n'étaient pas occupées par des espèces intelligentes. C'est du moins la théorie. Car sur Tahénie, les drilles, animaux humanoïdes dont le chant accompagne la vie meurent dans ce qui semble bien être un suicide collectif qui met en danger l'équilibre de la petite société coloniale: face à ce péhnomène, les colons sombrent dans la dépression et la folie. Lodève, xénologue de l'Inspection générale des Colonies est envoyée enquêter sur ce phénomène étrange.
Si vous me voyez sautiller avec l'oeil vitreux et répétant en boucle "Je le veux, je le veux je le veux, je le veux", ce n'est pas que je fait une overdose de romancières anglaises du 19e siècle, c'est que je suis prise d'une nouvelle marotte littéraire. Vous voulez un exemple? Facile: à chaque réédition d'un roman d'Ayerdhal, je suis prise de frénésie. Je ne le fais pas exprès, c'est incontrôlable et je peux le justifier.
Je vous avais dit que j'avais aimer Avatar? Non? Et bien c'est fait. Bien que j'admette que le scénario est classique et faiblard et que je préfère les histoires un brin plus complexe, j'ai trouvé le tout efficace, et visuellement époustouflant. Et bien Le chant du Drille, c'est Avatar en mieux. Les intrigues sont en effet très similaires: une planète colonisée, une espèce dominante rabaissée au statut d'animal, un grain de sable qui vient enrayer la belle machine coloniale. Mais là où James Cameron se contente d'effleurer le sujet, Ayerdhal ficelle une intrigue efficace et intéressante, centrée sur les ressorts politiques et sociaux de la colonisation, ses enjeux économiques et les jeux de pouvoir qui la sous-tendent. Non content de nous présenter une planète superbe et son écosystème, il crée un univers complexe et ne fait jamais l'impasse sur la structure de la société tahénite et les fractures que provoquent en son sein les Drilles. Il y a ceux qui leur dénient toute intelligence et souhaitent les éradiquer, il y a ceux qui veulent les côtoyer, il y a ceux qui veulent comprendre et qui se fondent dans leur mode de vie. Or, si aux premiers temps de la colonisation, les Drilles faisaient office d'attraction pittoresque grâce à leur mode de vie et leur chant, leur mort en masse, en réaction à la pression humaine qui les chasse de leur habitat, vient exacerber les tensions. D'autant que se pose la question de l'exploitation industrielle de la planète et sa pollution. C'est dans ce contexte que débarque Lodève pour tenter de trouver une solution à ce problème. Avec elle, Tahénie s'inscrit dans un univers plus large et complexe, celui de l'Homéocratie. Et à ce stade, les jeux de pouvoirs et les complots prennent une ampleur qui donnent à son enquête une complexité réjouissante. Bien qu'on sache en gros où Ayerdhal veut nous emmener, les rebondissements tiennent en haleine et la manière dont Lodève ajuste progressivement les pièces du puzzle s'avère fichtrement bien ficelée. Et ce qui ne gâche rien, les personnages ont de l'étoffe.
Le chant du Drille est un roman militant: écologiste, humaniste. Ce côté peut déplaire, ou enthousiasmer. Je fais partie des enthousiastes. Parce que jamais à la lecture, je n'ai eu le sentiment qu'Ayerdhal donnait des leçons ou opposait gentils scientifiques et intellectuels à méchants militaire et entrepreneurs. Jamais il n'oublie que la nature humaine n'est pas tout d'une pièce et cela se ressent.
Une pierre de plus à ma découverte de l'univers de ce merveilleux auteur, qui va provoquer je le sens encore bien des sautillements de ma part!
A oui, deuxième étape du challenge Défi SF de GeishaNellie, et ce coup-ci, on va dire qu'il s'agit de planet opera!


Ayerdhal, Le chant du Drille, Au diable Vauvert, 2009, 4/5

« Toutes choses sont muables et proches de l’incertain. »
Août 2005, l’ouragan Katrina dévaste la Nouvelle-Orléans. Les digues cèdent, les quartiers les plus modestes de la ville sont submergés. Zola Jackson s’organise pour rester chez elle et refuse toute évacuation qui ne lui permettrait pas d’emmener avec elle sa chienne, tout ce qui lui reste de sa famille.
Cranford, petite ville du Nord de l'Angleterre, ses veuves et ses demoiselles, son château, et les mille et une petites histoires qui émaillent le quotidien, entorses aux convenances, amours contrariées ou deuils.
Bref, j'ai aimé! Et comme j'ai aimé, je ne pouvais pas ne pas me jeter sans aucune autre forme de procès sur l'adaptation par la BBC du roman. Ceci dit, la lecture in english du dos du DVD a commencé par me laisser perplexe: il y avait là des personnages dont je n'avais pas le souvenir et j'en suis un moment venue à me demander si j'avais lu le bon roman! Mais foin de ce mystère, les scénaristes ont tout simplement utilisé des éléments de trois romans de Gaskell pour tourner ce petit bijou de série historico-littéraire, à savoir Cranford, mais aussi My lady Ludlow er Mr Harrison's confessions. Ce dernier se trouve dans mon édition Wordsworth de Cranford and other stories, ce dont je suis ravie!
Encore plus que le roman, l'adaptation met en valeur ce qui est un des thèmes centraux de l'oeuvre de Gaskell, la mutation d'un monde traditionnel et rural en un monde industriel. A Cranford, apparaissent soudain de nouvelles techniques médicales amenées par le docteur Harrison, le chemin de fer qui se construit envers et contre l'opposition de la population, les vieilles structures sociales sont mises à mal par l'ouverture entre autre, aux classes populaires de l'éducation. Ces changements sont le filigrane de la série et le moteur de bien des rebondissements. IL faut dire qu'ils s'entremêlent avec des intrigues amoureuses qui sont souvent très drôles et dont sera victime le pauvre jeune Docteur!
