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Littératures françaises - Page 4

  • Un refrain sur les murs - Murielle Magellan

    un-refrain-sur-les-murs.jpgIsabelle est une petite souris, très occupée à se faire remarquer, à ne surtout pas briller, à ne pas se retrouver face à l'imprévu. Romane, sa fille est son exact contraire, feu follet à tous les sens du terme. Ecorchées par la vie chacune à sa manière. De 1987 à 2010, elles trouveront, chacune à sa manière, leur voie.

    J'ai retrouvé dans ce roman un petit quelque chose de Barbara Constantine, ou de Marie-Sabine Roger que j'aime tant pour leur fantaisie, leur humour, leur art du dialogue, leurs personnages. Un petit quelque chose seulement, parce que Murielle Magellan a sa musique bien à elle, sa manière de raconter deux histoires de vie, deux parcours de femmes qui finissent par se trouver et se réconcilier avec le monde qui les entoure. Un refrain sur les murs est une jolie histoire sur les hasards, sur l'imagination, la fantaisie, les relations entre une mère et sa fille, le mystère qu'est l'autre. Une jolie histoire qui m'a fait passer un agréable moment mais dans laquelle je ne suis jamais totalement rentrée. J'ai regardé se dérouler les vies d'Isabelle, So What le musicien, Romane et son frère sans m'attacher à eux, parfois un brin agaçée même par l'aspect un peu caricatural des relations qu'ils entretiennent les uns avec les autres. Bref, une rencontre en demi-teinte, mais la curiosité d'aller regarder d'un peu plus près le premier roman de l'auteur!

     Un coup de coeur pour Mango, l'avis enthousiaste de Clara

     Magellan, Murielle, Un refrain sur les murs, Julliard, 2011, 248p.

  • Le comte de Monte-Cristo - Alexandre Dumas

    Dumas_MonteCristo.jpgEdmond Dantès a 19 ans et l'avenir lui appartient: une femme qu'il aime et qu'il va épouser, un navire dont il va devenir capitaine, un vieux père aimant aux besoins duquel il va enfin pouvoir subvenir. Mais c'est sans compter la jalousie, la peur et la haine de trois hommes qui vont ruiner sa vie en l'enterrant vivant au château d'If. Evadé après quatorze années, riche à millions, il fomente une terrible vengeance.

    Dieu que les ficelles sont énormes! On voit venir les coupables à un petit millier de kilomètres et c'est à se demander comment leur entourage ne les démasque pas immédiatement tellement ils pâlissent et blêmissent, et verdissent, et se pâment. C'est outré du début à la fin, et c'est tellement bon qu'on ne voudrait pas que ça finisse. Tous les extrêmes des passions humaines sont réunis et s'affrontent sur un petit millier de pages jusqu'à ce que, personne n'en doute, la vengeance soit accomplie. Amours désespérées, haines violentes, angoisses, vaillance, amour filial, transports divers et variés, tout y passe! Les personnages sont merveilleux, de Dantès lui-même, monolithe dans lequel des failles apparaissent petit à petit à ses persécuteurs méprisables mais tellement humains, en passant par la jeune génération qui ignore les crimes de ses pères. Tout le talent de Dumas, grand raconteur d'histoire devant l'éternel se trouve là, dans son art du rebondissement, des personnages, dans ses longueurs aussi, et dans la peinture de l'époque, des grandes passions politiques qui l'ont secouée. La grande histoire et les évolutions des moeurs transparaissent à travers les destinées particulières et frappantes de quelques personnages. On y trouve les oppositions entre bonapartistes et royalistes, l'essor de la grande bourgeoisie d'argent, l'aristocratie d'Empire, une étude de la justice, etc. Le meilleur, à mon sens, reste que tout improbable que puisse apparaître le récit, il s'inspire, chose que m'a apprise le riche dossier critique complétant l'édition empruntée à la médiathèque, d'une anecdote relatée par un archiviste, Peuchet, dont il avait utilisé les écrits pour écrire ses Crimes célèbres, anecdote presque plus improbable encore que ce qu'en a tiré Dumas, c'est peu de le dire!

    Bref, j'ai rencontré Edmond, il était temps! J'ai fréli, j'ai bovarysé, je me suis indigné, et bien marrée aussi. J'en ressors ravie au point de me replonger avec délectation dans Les trois mousquetaires! Autant dire qu'Alexandre et moi, c'est une affaire qui roule.

    Dumas, Alexandre, Le comte de Monte-Cristo, tout plein d'éditions, choisissez votre camp, moi c'était Omnibus.

    Et avec ça, je rentre dans le cadre de trois challenges d'un coup messieurs dames! Cliquez sur les jolis logos si vous voulez en savoir plus!

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  • La nonne et l'assasin - Frédérique Deghelt

    FeedsEnclosure-la-nonne-et-le-briga-4d14b8fbb740e.jpgDans la vie de Lysandre il y a deux rencontres, un amour fou qui bouleverse tout et un cahier couvert d'une petite écriture ronde, celle de soeur Madeleine, une nonne dont la vie va entrer, de curieuse manière, en résonance avec la sienne.

    Le nouveau roman de Frédérique Deghelt, je l'attendais avec impatience, et aussi la peur de la déception après la lecture lumineuse de La grand-mère de Jade. Or, une fois de plus, la magie de sa plume a fait effet. On plonge presque en apnée dans non pas un, mais deux amours fous, dont les récits alternent, s'enchevêtrent petit à petit intimement. On apprivoise Lysandre et cette passion pour Pierre qui détruit toutes ses convictions, tous ses repères. On entre comme elle, avec curiosité et attente dans l'histoire improbable de soeur Madeleine et d'Angel.On découvre Tomas, vieux monsieur plein de secret. Au gré des pages, on partage l'émerveillement de l'amour, la souffrance dont parle si bien Frédérique Deghelt avec sa plume sensible, délicate et sensuelle, qu'elle parle d'amour, d'un lieu, d'une caresse comme d'une ville ou d'un chemin parcouru au début d'une journée. La nonne et l'assassin est une superbe exploration du sentiment amoureux et de la manière dont il rend intensément vivant, à la fois sourd au monde et plus ouvert, souffrance qui détruit, révèle à soi, mais qui n'est jamais malédiction, ni blasphème comme le laisse entendre la tragique histoire de Padilla racontée par Victor Hugo cité en exergue:

    "Il était laid ; des traits austères,

    La main plus rude que le gant ;

    Mais l'amour a bien des mystères,

    Et la nonne aima le brigand."

    Hasards de la vie sans doute, ce texte est entré en résonance avec celui de Christiane Singer, Une passion: entre ciel et chair, entendu alors que je venais tout juste de commencer ma lecture au théâtre Lucernaire.

    Je n'ai pas envie d'en dire plus. C'est un texte à ressentir, à savourer, et à conserver précieusement avec toutes ses pages cornées.

     

    Là où les livres sont chez eux, Irrégulière,...

    Deghelt, Frédérique, La nonne et le brigand, Actes Sud, 2011, 409 p., 5/5

     

  • La princesse de Montpensier - Mme de la Fayette

    883948.jpg" Pendant que la guerre civile déchirait la France sous le règne de Charles IX, l’amour ne laissait pas de trouver sa place parmi tant de désordres, et d’en causer beaucoup dans son empire. La fille unique du marquis de Mézière, héritière très-considérable, et par ses grands biens, et par l’illustre maison d’Anjou, dont elle était descendue, était promise au duc du Maine, cadet du duc de Guise, que l’on a depuis appelé le Balafré. L’extrême jeunesse de cette grande héritière retardait son mariage, et cependant le duc de Guise, qui la voyait souvent, et qui voyait en elle les commencements d’une grande beauté, en devint amoureux, et en fut aimé. Ils cachèrent leur amour avec beaucoup de soin. Le duc de Guise, qui n’avait pas encore autant d’ambition qu’il en a eu depuis, souhaitait ardemment de l’épouser ; mais la crainte du cardinal de Lorraine, qui lui tenait lieu de père, l’empêchait de se déclarer. Les choses étaient en cet état, lorsque la maison de Bourbon, qui ne pouvait voir qu’avec envie l’élévation de celle de Guise, s’apercevant de l’avantage qu’elle recevrait de ce mariage, se résolut de le lui ôter et d’en profiter elle-même, en faisant épouser cette  héritière au jeune prince de Montpensier."

    Pour moi, La princesse de Clèves est sans conteste un des plus beaux romans d'amour malheureux qui soit. Bon, force m'est d'admettre avec Aurore que tout cela peut apparaître limite comme de la science-fiction (je t'aime, moi aussi, nous nous aimons, mais non ce n'est pas possible, soyons tous malheureux en coeur, et plus si affinités si tant est que la morale approuve le plus, mais ceci est un autre problème), mais au final, ce n'est guère qu'un raison de plus d'aimer ce texte. Tout ça pour dire que malgré mon amour pour la plume de Mme de La Fayette, les aléas de la vie m'avaient toujours tenue éloignée du reste de son oeuvre et cela aurait pu durer encore longtemps s'il n'y avait pas un dieu pour les LCA, lequel a permis qu'à la faveur de la sortie d'un film que je n'ai pas vu (une crise de tétanie, ma dernière expérience en matière de film en costume français ayant été... en fait il n'y a pas de mots pour ça), La princesse de Montpensier soit mise à l'honneur. Ce qui m'a servi de pense-bête.

    Je ne vais pas résumer l'intrigue, l'incipit en tête de cet article, fait le tour du problème. Une fois de plus, c'est d'amour dont il est question, amour passion, amour malheureux, amour secret, amour qui, évidemment, n'amène que drames et déchirements. Autour de la belle princesse de Montpensier, les hommes se pressent. Son époux tout d'abord, Henri de Guise ensuite, mais aussi Henri d'Anjou, et le comte de Chabannes, ami intime du prince de Montpensier. Elle a épousé le premier, aime le second, tente de tenir à distance l'amour du dernier et aurait sans doute pu se tirer à son avantage de cet imbroglio si la passion ne l'avait pas conduite à l'imprudence, et à la mort. D'une certaine manière, elle est le reflet inversé de ce que sera quelques années plus la princesse de Clèves: celle qui cède et en meurt face à celle que ses principes amènent à la mort. Deux destins d'une infinie tristesse qui racontent ce qu'est une femme au 17e siècle: enjeu de luttes amoureuses et de prestige, objet de passion, en tout cas jamais, ou rarement maîtresse de son destin. Une imprudence, et c'est la fin quand ceux qui ont provoqué la perte continuent leur chemin sans presque plus y penser. C'est en tout cas la morale de ce court texte qui présente la passion amoureuse sous des auspices tragiques et s'attache à décrypter de manière magistrale le jeu des sentiments.

    La Fayette, Madame de, La princesse de Montpensier, Pocket, 2010, 83p., 4/5

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  • Les hommes sirènes - Fabienne Juhel

    9782812601453FS.gifAntoine a quarante ans, une femme, un petit garçon et un caillou au coeur. Un Défense de déposer des ordures sur une palissade au hasard d'une rue et il abandonne tout derrière lui pour aller voir la mer, et essayer de se réconcilier avec lui-même.

    Les hommes sirènes est un roman qui distille une petite musique insidieuse, comme un conte de fée cauchemardesque où les ogres et les bonnes fées ne sont que trop réels et dissimulés sous l'apparence presque toujours innocente de gens bien comme il faut. Pourtant, tout commence dans un univers familier: un bar, une maison, une famille, une ville de province qu'on devine un peu grise, en tout cas tranquille. On voit se dessiner une histoire somme toute banale de quadragénaire un peu perdu qui abandonne tout avec l'option enfant adopté. Je dois d'ailleurs l'avouer, au départ, la quatrième de couverture m'avait un peu échaudée: adoption, rescapés de camps de la mort, homme en décalage... Rien de bien alléchant si ce n'est la plume de Fabienne Juhel, qui m'a immédiatement séduite et m'a poussée à poursuivre ma lecture.

    Or, très vite, le roman surprend et déstabilise. Dès qu'Antoine revient sur son enfance en fait. Enfant indien adopté, ou faut-il dire acheté, par un frère et une soeur ayant survécu aux expérimentations médicales nazies, il grandit dans une atmosphère étrange, malsaine, malgré l'apparent bonheur que peuvent amener richesse, confort et éducation. Mais dans la maison aux 113 fenêtres, c'est une violence sourde qui règne, malgré la présence d'Eugénie la cuisinière dévote et du rebouteux, étrange vieil homme vivant dans une cahute au fond des bois, impuissants à compenser totalement  une éducation menée par deux "parents" qui ne connaissent pas l'amour, les sentiments et qui façonnent l'enfant pour accomplir une tâche qu'on ne fait longtemps que deviner. Le drame d'Antoine, on le découvre au fil des pages, de son errance vers la mer et des rencontres faites sur la route, qui petit à petit vont le révéler à lui-même, lui permettre de réunir les pièces de son identité et d'accepter ses actes.

    On est pris dans les rets d'un récit où les moments de grâce, les petits bonheurs, l'espoir alternent avec l'horreur et la violence, ou la beauté, la poésie de la langue sortent renforcés de leur confrontation avec ce que l'humain a de plus sombre. Avec toujours, cette part de rêve, d'onirisme parfois qui donne le sentiment par moment de lire un conte où les loups ne sont pas toujours ce que l'on croit. Magistral donc, et très fortement conseillé.

    Clara, Pascale en parlent.

    Les hommes sirènes faisait partie de la sélection du Prix Landerneau.

    Juhel, Fabienne, Les hommes sirènes, Ed. du Rouergue, 304 p. 4.5/5