André est boucher, fils de boucher et devrait donner naissance à un boucher qui donnera naissance à un boucher. Parce que c'est comme cela que vont les choses dans la famille Plomeur. Mais c'est sans compter avec la guerre et le talent d'André pour faire chanter les corps des femmes. La file s'allonge devant la boucherie jusqu'à l'armistice. C'est alors un autre défilé, celui des bébés dont les mères se débarassent pour ne pas subir l'ire des époux rentrés du fronts. Et quand un des cocus se mêlent de vengeance, il est temps pour André de prendre ses 7 rejetons sous le bras et de prendre la poudre d'escampette.
Je sors de la lecture de Bifteck avec un goût de trop peu ma foi un peu étonnant pour un texte qui aligne avec bonheur un vocabulaire boucher et culinaire qui donne l'eau à labouche (ou la nausée, c'est selon). C'est un récit truculent, drôle, enlevé qu'on prend plaisir à lire. Les aventures d'André découvrant l'amour, la paternité, cousant de ses mains des culottes courtes pour ses petits et décontenancé par le végétarisme affirmé de la petite dernière est irrésistible.
Mais le texte effectue soudainement un virage vers le fantastique. On débarque avec la famille Plomeur dans un Nouveau Monde qui fleure son pays des merveilles. Je me suis alors perdue dans les méandres d'un second récit où les enfants grandissent à vue d'oeil, où les étapes de la vie sont effleurées et où la terre devient vivante. et qui e m'a pas franchement convaincue.
Reste une belle vision de la paternité et un récit sympathique et attachant.
Tamara a aimé, Amanda est moins convaincue. D'autres avis ici, et là.
Lu dans le cadre de l'opération Masse Critique de Babelio
Provost, Martin, Bifteck, Phébus, 2010, 125p., 3/5
Milieu du 18e siècle, Ursule et Appoline grandissent dans une famille religieuse dont le père, adepte de la Providence et la mère, quasi mystique, s'abandonnent au bon vouloir de Dieu jusqu'à sombrer dans la misère. Si Appoline ne voit rien ou presque, Ursule, rongée par l'ambition et la volonté de se libérer d'une vie médiocre s'enfuit. Deux soeurs, deux vies, jusqu'au jour où Appoline retrouve sa soeur mourante et découvre à travers un manuscrit qu'elle laisse derrière elle le récit de ses aventures, de son départ pour Paris dans les bagages du duc de Richelieu à sa déchéance après les fastes du statut de maîtresse royale.
"Automne 1913. A Paris et ailleurs - de Budapest à la Birmanie en passant par Venise -, une jeune femme intrépide, Gabrielle Demachy, mène une périlleuse enquête d'amour, munie, pour tout indice, d'un sulfureux cahier hongrois recelant tous les poisons - des secrets de cœur au secret-défense. Habité par les passions, les complots, le crime, l'espionnage, et par toutes les aventures qu'en ce début du XXe siècle vivent simultanément la science, le cinéma ou l'industrie, Dans la main du diable est une ample et voluptueuse fresque qui inscrit les destinées sentimentales de ses personnages dans l'histoire d'une société dont la modernité est en train de bouleverser les repères. En 1913, Gabrielle Demachy s'avance, lumineuse et ardente, dans les rues de Paris, sur les chemins du Mesnil ; entre l'envol et la chute, entre eaux et sables, la voici qui s'engage dans le roman de sa vie..."
Les mémoires d'Hadrien sont une oeuvre étrange, atypique. A la fois roman historique, autobiographie fictive, c'est surtout un texte exigeant, érudit et fascinant à travers lequel Marguerite Yourcenar donne une voix à un empereur, et surtout, un homme, faisant de la figure historique, de la statue maint fois croisée dans les musées un être de chair et de sang et s'effaçant derrière lui. La dernière page des Carnets de notes de "Mémoires d'Hadrien" tournée laisse sans voix devant le travail accompli, le tour de force et la beauté de ce qui est ainsi offert: 'Refaire du dedans ce que les archéologues du 19e siècle on fait du dehors". Elle y parvient de main de maître, utilisant sans jamais le faire sentir la somme faramineuse des connaissances acquises sur son personnage. On aborde ainsi "de l'intérieur" une histoire qui paraît souvent abstraite, avec un regard qui surprend parfois le lecteur, comme sur les révoltes en Judée.
façonné par lui. Dans cette manière de testament, Hadrien raconte sa vie, sa conception de l'empire, ses luttes politiques, ses combats, tout ce qui a façonné la vision du monde et la philosophie qu'il ses conviction, son grand amour pour Antinoüs. A travers une plume qui atteint à une simplicité superbe, presque sèche, on découvre l'homme amoureux de l'art, de la connaissance, amoureux tout court aussi, engagé dans une relation qui le conduit à toujours plus, plus d'action, plus de cruauté, plus de désespoir après sans doute trop de bonheur. C'est un magnifique récit d'amour et de folie amoureuse, à la fois glaçant et émouvant en même temps qu'une superbe page d'histoire.