Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Littératures françaises - Page 6

  • Bifteck - Martin Provost

    Bifteck-martin-provost-205x300.jpgAndré est boucher, fils de boucher et devrait donner naissance à un boucher qui donnera naissance à un boucher. Parce que c'est comme cela que vont les choses dans la famille Plomeur. Mais c'est sans compter avec la guerre et le talent d'André pour faire chanter les corps des femmes. La file s'allonge devant la boucherie jusqu'à l'armistice. C'est alors un autre défilé, celui des bébés dont les mères se débarassent pour ne pas subir l'ire des époux rentrés du fronts. Et quand un des cocus se mêlent de vengeance, il est temps pour André de prendre ses 7 rejetons sous le bras et de prendre la poudre d'escampette.

    Je sors de la lecture de Bifteck avec un goût de trop peu ma foi un peu étonnant pour un texte qui aligne avec bonheur un vocabulaire boucher et culinaire qui donne l'eau à labouche (ou la nausée, c'est selon). C'est un récit truculent, drôle, enlevé qu'on prend plaisir à lire. Les aventures d'André découvrant l'amour, la paternité, cousant de ses mains des culottes courtes pour ses petits et décontenancé par le végétarisme affirmé de la petite dernière est irrésistible.

    Mais le texte effectue soudainement un virage vers le fantastique. On débarque avec la famille Plomeur dans un Nouveau Monde qui fleure son pays des merveilles. Je me suis alors perdue dans les méandres d'un second récit où les enfants grandissent à vue d'oeil, où les étapes de la vie sont effleurées et où la terre devient vivante. et qui e m'a pas franchement convaincue.

    Reste une belle vision de la paternité et un récit sympathique et attachant.

    Tamara a aimé, Amanda est moins convaincue. D'autres avis ici, et .

    Lu dans le cadre de l'opération Masse Critique de Babelio

    Provost, Martin, Bifteck, Phébus, 2010, 125p., 3/5

     

     

     

     

  • Le testament d'Olympe - Chantal Thomas

    803822.jpgMilieu du 18e siècle, Ursule et Appoline grandissent dans une famille religieuse dont le père, adepte de la Providence et la mère, quasi mystique, s'abandonnent au bon vouloir de Dieu jusqu'à sombrer dans la misère. Si Appoline ne voit rien ou presque, Ursule, rongée par l'ambition et la volonté de se libérer d'une vie médiocre s'enfuit. Deux soeurs, deux vies, jusqu'au jour où Appoline retrouve sa soeur mourante et découvre à travers un manuscrit qu'elle laisse derrière elle le récit de ses aventures, de son départ pour Paris dans les bagages du duc de Richelieu à sa déchéance après les fastes du statut de maîtresse royale.

     

    S'il est une chose qu'il faut reconnaître à ce roman, c'est l'art avec lequel son auteur a su peindre le 18e siècle, lui gardant les teintes de l'authencité tout en y déployant une saga pleine de rebondissements et de ressorts dramatiques. Dans Le testament d'Olympe, deux soeurs, deux voix, deux destins de femmes et deux regards sur la condition féminine. Appoline la sage, entrée au couvent et destinée à devenir une soeur faute de pouvoir prétendre au mariage. Ursule la révoltée, fuyant pour trouver enfin un espace où déployer sa nature passionnée. Chacune à sa manière déjoue le destin qui les amenaient à subir leur condition de femme: ne pas pouvoir devenir épouse et mère faute d'argent et par conséquent, finir vieille fille s'occupant de ses parents, ou vierge consacrée à Dieu. Toutes deux vont subir de plein fouet les drames d'un 18e siècle dont les déséquilibres, les conflits et les drames annoncent déjà le déclin et la chute de la monarchie française, la décadence d'une famille royale qui peine à assumer l'héritage du Roi Soleil.

    On découvre ainsi par le petit bout de la lorgnette l'histoire de France marquée par les conflits religieux et politiques, les moeurs d'un temps où le libertinage côtoyait la religion. A travers la famille d'Appoline et Ursule, on devine les méandres religieux, du jansénisme et de ses avatars, le retour à la rigueur religieuse, la vie d'une épouse prépetuellement enceinte. A travers les aventures Appoline, on découvre le destin d'une jeune fille pauvre destinée au couvent ou à la mort, la dûreté d'un temps où les orphelinats et les écoles étaient des mouroirs et où seuls les plus solides des enfants survivaient quand ils n'étaient pas enlevés et vendus. A travers Ursule devenue Appoline c'est celui d'une courtisane avec ses gloires, ses fastes et ses chutes brutales et sans rémission, la cruauté du monde de la cour et les débauches des puissants. Partout des portraits de femmes, effrayant dans ce qu'ils disent de la condition des femmes partout soumises au bon vouloir des hommes dont dépendent et d'une société qui ne pardonne pas le moindre faux pas.

    Chantal Thomas brosse un portrait vivant, passionnant, cru et réaliste de l'époque, malheureusement déservi par la construction du roman en deux monologues et le parti pris d'utiliser des ressorts romanesques qui, pour rappeler les oeuvres de l'époque, n'en sonnent pas moins artificiels. C'est parfois trop rapide, parfois trop outré mais écrit avec talent et un style brillant, convaincant.Et puis il y a cette galerie de personnages pittoresques, des plus puissants aux plus modestes, à laquelle faute de s'attacher vraiment, on prend de l'intérêt. Il ne manquait pas grand chose pour que ce soit un coup de coeur, ce sera juste une lecture agréable. Mais c'est déjà ça!

     

    05_chronique_de_la_rentree_litteraire.jpgThomas, Chantal, Le testament d'Olympe, Le Seuil, 2010, 306p.

  • Dans la main du diable - Anne-Marie Garat

    garat-dans-la-main-du-diable.jpg"Automne 1913. A Paris et ailleurs - de Budapest à la Birmanie en passant par Venise -, une jeune femme intrépide, Gabrielle Demachy, mène une périlleuse enquête d'amour, munie, pour tout indice, d'un sulfureux cahier hongrois recelant tous les poisons - des secrets de cœur au secret-défense. Habité par les passions, les complots, le crime, l'espionnage, et par toutes les aventures qu'en ce début du XXe siècle vivent simultanément la science, le cinéma ou l'industrie, Dans la main du diable est une ample et voluptueuse fresque qui inscrit les destinées sentimentales de ses personnages dans l'histoire d'une société dont la modernité est en train de bouleverser les repères. En 1913, Gabrielle Demachy s'avance, lumineuse et ardente, dans les rues de Paris, sur les chemins du Mesnil ; entre l'envol et la chute, entre eaux et sables, la voici qui s'engage dans le roman de sa vie..."

    Quatre journées en immersion, quatre journée de vacances à retrouver de loin en loin Gabrielle et Pierre, à suivre avec émotion les aléas de leur rencontre et de leur vie. Quatre journée pour 1287 pages et l'envie de hurler à la fin que c'est trop court, qu'on ne peut pas laisser son lecteur comme ça, sans savoir ce qu'il advient de la petite Millie, et de Camille, et d'eux tous qui sont devenus si familiers au fil de pages. J'ai aimé, oh oui j'ai aimé ce gros roman foisonnant, écrit dans une langue somptueuse, travaillée. J'ai aimé ses personnages, j'ai aimé ce qu'il raconte d'un monde qui entre dans les temps modernes et qui ne sait pas encore que le grand carnage de la Première guerre mondiale est devant lui alors que cette guerre est déjà commencée et annonce les germes du fascisme à venir. Dans la main du diable est de ces sagas qu'on ne peut pas lâcher, de ces romans historiques merveilleux qui parviennent à rendre l'atmosphère d'une époque. C'est un roman policier aussi avec son inspecteur haut en couleur et son enquête, un roman d'espionnage, un roman de guerre, un roman de moeurs et l'histoire d'une famille prise dans les remous d'intrigues politiques et économiques. C'est un feuilleton aux multiples rebondissements qui ne fait jamais, chose appréciable, l'impasse sur les complexités de l'histoire de la France de 1913, quand bien même les rôles seraient clairement définis et qui n'oublie pas que les hommes et les femmes ne sont jamais d'une pièce.

    Avec talent, Anne-Marie Garat croise les fil des intrigues, immerge son lecteur et le fait frémir au rythme des découvertes, des espoirs, des rêves et des désespoirs de Gabrielle, de son coeur qui s'éveille à un amour qu'elle croyait connaître mais dont elle n'avait jusqu'alors vu que le fantôme. Avec elle, ce sont d'autres qui grandissent, qui aiment, qui affrontent le pire et qui s'affrontent au monde. On s'attache à chacun, même aux salauds, c'est dire.

    Un magnifique découverte que je prolongerai bien vite avec les deux tomes qui prolongent l'histoire de Gabrielle. Ô bonheur, tous sont maintenant sur les étagères des bibliothèques et librairies. Bientôt sur les miennes sans aucun doute.

     

    Emeraude a aimé, Caro[line] m'avait donné envie de découvrir ce roman. Livresque sentinelle n'a pas aimé.

    Garat, Anne-Marie, Dans la main du diable, Actes Sud, Babel, 1287 p., 2007, 5/5

     

     

     

     

     

    0

     

     



  • Les mémoires d'Hadrien - Marguerite Yourcenar

    2070369218.jpgA l'approche de la mort, l'empereur Hadrien se livre à son successeur Marc-Aurèle. Chroniques de jours passés, ses lettres racontent une vie et un amour hors du commun.

     

    401px-Emperor_Hadrian_Louvre_Ma3131_n2.jpgLes mémoires d'Hadrien sont une oeuvre étrange, atypique. A la fois roman historique, autobiographie fictive, c'est surtout un texte exigeant, érudit et fascinant à travers lequel Marguerite Yourcenar donne une voix à un empereur, et surtout, un homme, faisant de la figure historique, de la statue maint fois croisée dans les musées un être de chair et de sang et s'effaçant derrière lui. La dernière page des Carnets de notes de "Mémoires d'Hadrien" tournée laisse sans voix devant le travail accompli, le tour de force et la beauté de ce qui est ainsi offert: 'Refaire du dedans ce que les archéologues du 19e siècle on fait du dehors". Elle y parvient de main de maître, utilisant sans jamais le faire sentir la somme faramineuse des connaissances acquises sur son personnage. On aborde ainsi "de l'intérieur" une histoire qui paraît souvent abstraite, avec un regard qui surprend parfois le lecteur, comme sur les révoltes en Judée.

    Elle dessine ainsi les traits d'un empire, d'un temps, raconté par celui qui l'a façonné après avoir été 20061002121424!Antinous_Dionysos_Terme.jpgfaçonné par lui. Dans cette manière de testament, Hadrien raconte sa vie, sa conception de l'empire, ses luttes politiques, ses combats, tout ce qui a façonné la vision du monde et la philosophie qu'il ses conviction, son grand amour pour Antinoüs. A travers une plume qui atteint à une simplicité superbe, presque sèche, on découvre l'homme amoureux de l'art, de la connaissance, amoureux tout court aussi, engagé dans une relation qui le conduit à toujours plus, plus d'action, plus de cruauté, plus de désespoir après sans doute trop de bonheur. C'est un magnifique récit d'amour et de folie amoureuse, à la fois glaçant et émouvant en même temps qu'une superbe page d'histoire.

     

     

  • En avant, route! - Alix de Saint-André

    Trois fois Alix de Saint-André a pris le chemin. Trois fois elle s’est dirigée vers Compostelle, elle, la croyante intermittente, fumeuse invétérée et pas sportive pour deux sous. Trois fois elle a vécu une formidable aventure humaine, faite d’ampoules aux pieds, de chats mal doués, de rencontres, de disputes et de réconciliations qu’elle raconte avec humour.


    Autant vous le dire, j’ai adoré faire ce bout de chemin avec Alix de Saint-André et les autres. Le chemin, je ne l’ai jamais parcouru même si je le regarde depuis quelques années avec envie et le sentiment qu’un jour, j’irai le parcourir, en entier ou pas, on verra bien. Du coup, le découvrir sous cette plume réjouissante a été un vrai bonheur. Alix de Saint-André raconte son expérience, la vie quotidienne des pèlerins, les agacements, les moments de bonheur, les rencontres banales et extraordinaires, l’âne Pompon, ses sept maris, le botufumeiro, les raisons qui poussent un jour à prendre la route sac au dos pour trouver les réponses et même les questions, chacun avec son vœu, chacun avec une histoire qu’il choisit de raconter ou pas puisque l’important sur le chemin ce n’est pas ce qu’on est hors du chemin mais ce qu’on y partage, ce qu’on y vit ensemble ou dans la solitude. C’est un beau regard qu’elle porte sur elle-même et les autres, plein de tendresse, d’ironie douce et de lucidité sur la nature humaine.
    C’est un récit fort, qui mêle les détails triviaux du quotidien à des pages passionnantes sur la foi, les choix de vie, ce que l’engagement dans ce pèlerinage représente et apporte. On rit, on s’émeut, on vit un peu cette aventure à quatre kilomètres-heure et cette drôle d’odyssée dont on ne guérit apparemment jamais vraiment quelques aient été les raisons de s’y engager.
     

    Cuné m'avait donné envie de découvrir cette belle aventure, qu'elle en soit remerciée!

    Saint-André, Alix de, En avant route!, Gallimard, 2010, 307 p., 4/5