Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Littératures françaises - Page 3

  • Marie-Claire, suivi de L'atelier de Marie-Claire - Marguerite Audoux

    2246169143.01._SX140_SY225_SCLZZZZZZZ_.jpgQuand la petite Marie-Claire perd sa maman, elle ne comprend pas ce qui se passe autour d'elle, pas plus qu'elle ne comprend pourquoi, avec sa soeur ainée, elles sont laissées dans un orphelinat tenu par des soeurs. Il y a soeur Marie-Aimée, et la classe, les amies qui lui font, somme toute, une enfance heureuse qui se termine brutalement quand, enjeu d'une lutte qui la dépasse, elle est envoyée dans une ferme. Mais la vie est ainsi faite que l'orpheline devenue bergère deviendra un jour couturière à Paris...

    C'est une histoire touchante que celle de Marguerite Audoux, la couturière devenue écrivain à succès alors que ses yeux ne lui permettaient plus de gagner sa vie, remportant le prix Femina en 1910, soutenue par Octave Mirbeau. Marie-Claire une histoire d'autant plus touchante que c'est son histoire qu'elle raconte avec finesse et délicatesse. Pas de pathos sous sa plume, mais le récit tout en nuance de l'apprentissage de la vie d'une toute petite fille qui va de déracinement en déracinement et parvient malgré tout à tracer sa voie dans le monde. Autour de Marie-Claire, c'est tout le monde paysan, puis celui des ateliers de couture parisiens qui se déploie, peuplé de personnages attachants ou détestables, animé de mille et une petites histoires sans importance qui donnent corps et intérêt au récit. Avec en filigrane, la condition féminine de la fin du 19e siècle et du début du 20e siècle qui se dessine, sa dureté, ses injustices, mais aussi la solidarité qui transcende les générations comme les coups durs.

    Marie-Claire et L'atelier de Marie-Claire sont des petits bijoux, textes littéraires autant que témoignage, des incontournables portés par une plume dont la simplicité est un enchantement. A lire.

    Audoux, Marguerite, Marie-Claire, suivi de L'atelier de Marie-Claire, Grasset et Fasquelle, coll. Les cahiers rouges, 2008, 414p., 5/5

    1718394131.jpg

  • Jeunes femmes en uniforme - Tereska Torrès

    9782752905154.jpgNous sommes en 1940, des français déterminés à continuer la lutte contre ceux qui ont envahi la France affluent à Londres. Parmi eux, des femmes qui vont intégrer le corps féminin des Forces Françaises libres. C'est la voix de ces femmes que fait entendre Tereska Torrès.

    Jeunes femmes en uniforme un texte inédit en français, qui à sa parution en 1948 aux États-Unis a fait scandale pour sa description sans fard de la vie au sein d'une groupe de femmes venues d'horizons différents. Relations sentimentales et sexuelles, parfois lesbiennes, ennui, disputes, alertes aériennes, difficultés matérielles,Tereska Torrès n'édulcore effectivement rien de ce dont elle a été témoin, au point qu'il faut attendre fort longtemps pour une traduction et une parution en France, l'auteur ayant craint semble-t-il de choquer ses compatriotes, ce qui peut se comprendre tant elle s'éloigne de la geste de la Résistance telle qu'elle a pu s'écrire dans l'immédiat après-guerre. En effet, plutôt que de se pencher sur le spectaculaire, les combats, c'est le quotidien qu'elle décrit, la routine d'une caserne, dans tout ce qu'elle peut avoir d'ennuyeux, les bombardements et leur lot de drames, les longues factions, le travail de secrétariat... En cela, c'est un texte indispensable, voire incontournable pour qui s'intéresse à cette période de l'histoire.

    Reste que j'y ai trouvé des longueurs, un style un peu fade, l'impression de rester en surface de ce qui aurait pu se révéler passionnant avec un peu plus, non pas de romanesque, mais de souffle. Loin de moi l'idée saugrenue de nier le caractère extrêmement intéressant de Jeunes femmes en uniforme, mais force m'est de reconnaître que ce fut une lecture déçevante

    L'avis de Tamara, , Brize,...

    Torrès, Tereska, Jeunes femmes en uniforme, Phébus Libretto, 2011, 187p., 2/5

  • Alzheimer mon amour - Cécile Huguenin

    book_cover_alzheimer_mon_amour_202212_250_400.jpgTrente ans de vie commune et c'est le couperet qui tombe, la maladie insidieuse, terrible, qui s'empare de la mémoire de Daniel. Peut-on faire le deuil de quelqu'un qui est en vie? Cécile, sa femme, raconte.

    Ce texte, j'ai eu la tentation de l'éviter. Trop dur, sujet trop à la mode, pas envie. Seulement il y a eu Cathulu, et surtout, surtout, Christian Sauvage, dont les mots ont sus me convaincre. Et il avait raison Christian Sauvage, point de dramatisation, de lamentations, on rit, on s'émeut, on pleure parfois, et on suit avec une boule au ventre le parcours de Cécile et de Daniel, de la révolte à la sérénité. Alzheimer mon amour est un témoignage, oui, celui d'une femme qui raconte avec beaucoup de pudeur et de finesse sa révolte, les extrêmes auxquelles elle est prête pour éloigner le spectre de la mort,les questions qui rongent, la difficulté de faire face, de supporter dans tous les sens du terme l'autre qui s'en va petit à petit, l'épuisement et la violence du monde: froideur médicale, regards qui se dérobent.. Mais aussi chaleur, amour, amitiés et la sérénité qui advient, illuminée dans la dernière partie par les poèmes de Daniel, absolument superbes.

    Alzheimer mon amour est aussi un beau texte littéraire, porté par une plume alerte, sensible, qui n'oublie pas de redonner une voix et une existence aux autres, aux malades qu'on voudrait effacer, oublier tant ce qu'ils représentent fait peur, aux soignants qui affrontent jours après jours une maladie qui touche au plus intime. Un roman vrai comme le dit si bien Christian Sauvage. Sans fard, il fait toucher du doigt une réalité qu'on voudrait le plus souvent ignorer, rappelle aussi qu'une conscience qui s'efface n'emporte pas avec elle tout ce qui fait un être humain, et interroge, d'une certaine manière sur ce que le traitement réservé à ceux qui "ne peuvent plus" révèle sur le monde dans lequel nous vivons. Car comme le dit Daniel, "On peut vivre."

    A lire et méditer.

    "J'écris ces mots aujour'dhui avec une sorte de honte mêlée à un sentiment d'invraisemblance tant il paraît aburde qu'une chose aussi simple ait pu m'émerveiller. Et pourtant je le répète encore et encore, pour qu'une chose aussi simple ne soit jamais oubliée par quiconque rencontrera un être dont la conscience est en perdition. Que l'on n'oublie plus jamais de lui parler normalement, comme à un être humain à part entière, sans décider à sa place des mots qu'il pourra comprendre, sans le priver des yeux qui le regardent, d'une voix qui lui parle. A lui. A elle."

    L'avis de Keisha, Brize,...

    Alzheimer mon amour est entré en résonance chez moi d'assez curieuse manière me direz vous puisque ce n'est pas la même situation, avec cette histoire... Dans ce qu'elle dit de la manière dont on considère celui qui est différent...

    Huguenin, Cécile, Alzheimer mon amour, Ed. Héloïse d'Ormesson, 2011, 124p. 4/5

     

     

     

     

     

  • Le mardi c'est permis: Delly

    J'ai bien failli me lancer dans une étude comparée de l'importance de la capillarité sommitale chez les Francs, Nicholas et les harlequinesques écossais, quelques exemplaires du genre m'attendant sagement au coin d'une étagère, seulement voilà, faisant un peu de ménage de printemps, j'ai retrouvé le brouillon d'un billet qui ne date pas d'hier, mais dont le contenu relève indéniablement de l'inavouable. De l'autrement inavouable. Genre la madeleine de Marcel, mais un tantinet plus...Comment dire ça...

    Ne vous en faites pas, c'est comme d'habitude, je vais finir par cracher ma valda et sombrer corps et bien dans ma deuxième, nan troisième, nan... bref, dans une autre de mes innombrables passions, l'histoire. Nous allons remonter le temps jusqu'en 1978 pour commencer. Pourquoi? Parce que Harlequin arrive en France en 1978. Essor de la littérature sentimentale, des couvertures avec éphèbes aux muscles saillants, clairs de lune et tutti quanti. Un succès commercial plutôt faramineux, des collections à la pelle, des déclinaisons à n'en plus finir plus loin, nous voilà rendu à nos jours.

    Mais, vu ma passion inavouable pour les épées rouillées et autres aventures s'étant déroulées far far away et en un temps far far lointain (il y avait donc forcément un mais, le Doctor vous dira qu'apprécier le far far away et le far far lointain implique forcément un mais, ce qui n'a rien à voir avec  moutons certes, mais après tout aux moutons nul n'est tenu) je ne pouvais en rester là... Oui mais avant? Quid de la littérature sentimentale? Certes pas Je passe sur les romances et autres poèmes d'amour et autres histoires déchirantes des temps jadis pour me contenter du 19e siècle. Certains diraient que c'est diablement trop récent, mais que voulez-vous, il s'est tout de même passé quelques petites choses à cette période abominablement quasi-contemporaine. Par exemple l'alphabétisation. Et oui, c'est grâce au développement de l'alphabétisation que la littérature sentimentale s'est fait une place de choix dans le paysage littéraire! Je vois d'ici les esprits chagrins me rétorquer que ce n'est pas dans le paysage littéraire qu'elle s'est fait une place mais dans le paysage commercial. Certes. Il n'en reste pas moins très chers, que le roman sentimental est une "oeuvre de l'esprit", avec un auteur, un éditeur et toutes ces petites choses qui font un livre.

    Littérature sentimentale, paysage littéraire donc.

    Nous voilà ainsi en visite à la Belle-Époque un peu avant et un peu après, et sans même l'aide de la Blue Box, côtoyant des auteurs aux noms plus ou moins évocateurs qui vont faire des émules: Max du Veuzit (autrement appelée Alphonsine Vasseur), Magali, Barbara Cartland, Zénaïde Fleuriot, Marie Maréchal, Mathilde Bourdon,... et l'objet du billet du jour, Delly.

    Delly donc. Qui est-elle. Ou plutôt, qui sont-ils?

     Delly est un pseudonyme, celui de Jeanne Henriette Marie Petitjean de La Rosière et de son frère Frédéric Henri Joseph, issus de la bonne société de la fin du 19e siècle. Ensemble, ils ont écrit une centaine de romans et de nouvelles après que la jeune fille ait envoyé quelques manuscrits à des éditeurs. Même après la mort de leurs auteurs, les romans de Delly ont continué à se vendre par milliers d'exemplaire. Pour tout dire, ils ont été réédités jusque dans les années 1990, années au cours desquelles je les ai découverts dans la bibliothèque de ma grand-mère. Lectrice déjà plus que vorace, je me suis jetée sur ces vieilles éditions Taillandier décrépites et quasi en loque et suis partie à la découverte de cet univers jusqu'alors inconnu et palpitant, bien que manquant singulièrement de chevelures ébouriffées.

    C'est qu'attention, on ne rigole pas chez Delly! Les jeune filles sont pieuses et vertueuses, les hommes virils, forts et bons, les prêtres chaleureux, les vieilles personnes porteuses de sagesse et  les intriguant(e)s sont horriblement punis de leur manque de morale à la fin. Bref, on y trouve pêle-même de l'aristocratie mais pas de cheikhs dangereux, des hommes virils mais sans kilts, des femmes dévouées mais pas d'infirmières, avec quelques guest stars. Ceci dit, la trame ressemble terriblement au roman sentimental contemporain dans ses déclinaisons classiques. Tout rapprochement avec des collections contenant les mots passion, intense, spicy provoquerait des collisions que même le Doctor ne serait pas en mesure de réparer.

    La preuve. Pas des collisions, de la ressemblance.

    Nous avons:

    imgro30070090_thumb.jpgLa vengeance de Ralph: il va être lord, elle est belle, de bonne naissance mais pauvre et persécutée par une vilaine marâtre, il l'épouse pour se venger, il hérite, elle devient lady à sa grande surprise, mais il ne l'aime pas. Après moult péripéties et turpitudes, ils s'aimeront cependant pour toujours dans le bonheur, la plénitude et entourés de petits angelots voletant. Bien évidemment, la main de Dieu s'est abattue sur les méchants. Pardonnés par leurs victimes victorieuses.

     

    R150058971.jpgLa chatte blanche: il est duc, d'une irréprochable moralité malgré une famille vautrée dans la luxure, elle est belle, pauvre, de bonne naissance et persécutée par une horrible tante par alliance. La tante veut épouser le duc, le duc veut épouser sa belle, rien ne va plus. Péripéties, turpitudes, vexations et persécutions, rien ne va plus. Mais l'amour et la morale vainquent toujours: la main de Dieu s'abat sur l'horrible tante et ils vivront heureux pour toujours dans leur château et dans la vertu.

     

     

    Cesbres.jpgGilles de Cesbres: elle est pauvre et méritante, il est riche et s'égare sur les chemins des mondanités. Tout finira bien dans la célébration de justes noces et dans une honnêteté scintillante.

     

     

     

    MIebj.kGM8ZeCIipmALR5zgw5iH6ZQax7cuiED_fyRc-.jpgLe sphinx d'émeraude et sa suite: il est duc et puissant, elle est pauvre et persécuté,... Oui, encore. Mais en costume. Avec un mariage à la fin, et des aventures au milieu à base d'enlèvement, de mensonge, d'empoisonnement. C'est qu'on ne rigole pas avec Catherine de Médicis. Sauf quand on s'appelle Wennaël. Non mais! Vous noterez qu'en terme de couvertures on se rapproche là d'un terrain connu moins le torse nu.

     

     

    Bref, tout ceci déborde de vertus et de conformisme d'un autre temps, de stéréotypes et d'archétypes, de bons sentiments (mais pas que, figurez-vous qu'il y aurait plus que cela en creusant, mais chut, j'explore encore) mais il faut bien que j'admette sous vos yeux effarés que j'adore. Et que je collectionne. Avec les Langelot du Lieutenant X, mais ceci est une autre histoire.

     Ah oui, j'ai des sources: pour en apprendre plus sur le roman sentimental, il faut aller jeter un oeil , ou encore ... Pour Delly, il y a quelques infos intéressantes...

    Et n'oubliez pas, le premier mardi, c'est permis!

    64652259_p.jpg

    Et j'avais oublié, honte à moi!

    1718394131.jpg

     
  • Les insurrections singulières - Jeanne Benameur

    63030052_p.jpgAntoine est au seuil de la quarantaine. Ouvrier atypique, pas vraiment à sa place dans cet univers qu'il s'est choisit, décalé parmi les intellectuels que fréquente son frère devenu professeur, militant syndical fort en gueule mais jamais dans la ligne, il bascule. Rupture amoureuse, dévastations provoquées par la mondialisation, le vide qui se creuse sous ses pas va le forcer à trouver, enfin, un sens à sa vie.

    L'art de Jeanne Benameur c'est de donner. Donner vie, donner corps, donner parole,... Comme cette parole ouvrière qu'elle a recueillie, café de parole après café de parole, mots de colère, mots de désarroi, mots de désespoirs, d'hommes et de femmes dont le travail avait soudainement perdu toute valeur, dont le savoir-faire n'était rien face à l'argent et au profit. Cette parole, ces mots, elle les a continués, s'est documentée, puis a laissé, comme elle le dit joliment, "l'imagination faire sa part".

    L'imagination la mène sur les pas d'Antoine, un homme qui erre entre deux mondes et qui, faute de se trouver, n'habite pas vraiment sa vie. A travers lui, Jeanne Benameur montre le chemin parfois long, parfois difficile qui mène à une vie libre, une vie à laquelle on donne un sens qui dépasse les gesticulations avec lesquelles, parfois, on remplit ce vide tellement effrayant.

    "Les autres, tant que toi, tu n'es pas vraiment dans ta vie, les autres, eh bien tu crois que tu fais des choses pour eux mais c'est tripette mon gars... tu te cours après à travers eux et tu te rattrapes jamais... alors crois-moi, s'arrêter, traverser le temps mort, ça vaut le coup..."

    Le déclic pour lui, va être la rencontre de Marcel, le chantre du temps mort, un vieux bouquiniste un peu philosophe sur les bords, un authentique amoureux des livres et des hommes. C'est lui qui par petites touches, mots à mots, pages à pages, va l'inviter à prendre sa vie en main, à se réfléchir et à accepter ce qu'il est et ce dont il a besoin pour être, à prendre le risque qui va lui permettre de reprendre sa vie en main.

    "C'est peut-être la seule chose qui fait de nos vies des choses singulières dans le fond, le choix du risque qu'on vit... Chacun le sien. Une chose est sûre. Sans risque, on ne vit pas."

    Ce qui est le lot du plus grand nombre, de ceux qui étouffent dans leur vie parce qu'il faut survivre, faire vivre ceux qui vous entourent, quitte à tout accepter, comme le font certains des compagnons de travail d'Antoine  qui voient une partie de ce qui faisait leur valeur écrasé par le rouleau compresseur de la mondialisation.Pas de manichéisme cependant, de dénonciation gratuite de la course au profit. Ce qui est montré,  c'est l'effacement de l'humain, incarné dans ce carnet tenu pendant des années par le père d'Antoine, carnet d'ouvrier qui a perdu toute valeur.

    "Un carnet fait par un ouvrier pour un ouvrier. Un homme pour un homme. La valeur du travail de vivre qui passe de main en main. AUjourd'hui c'est une relique. Aujourd'hui on veut juste savoir ce qui est utile pour fabriquer des choses. Pas la vie. C'est ringard, c'est perte de temps, c'est pas efficace, de noter les jours de rien. Juste pour qu'un autre, un jour, le sache."

    On en parle pourtant de ces esclaves qu'on oublie pour mieux acheter à bas prix des breloques. Ils sont là, comme leur version occidentale, ou brésilienne, apparemment mieux lotie, illusion qui s'efface quand on regarde en face le désespoir des hommes, le renoncement à soi et à sa dignité.

    " A l'usine, l'idée de travailler moins, c'est le malheur, c'est la peur de la misère. C'est ancré profond. Finir par tout accepter pour juste pouvoir travailler. C'est ça que je trouve fou. Travailler. Dans n'importe quelles conditions. Elle est là la misère. Pas dans le porte-feuille à plat à la moitié du mois seulement."

    A travers Antoine, à travers ses collègues de travail, à travers les ouvriers brésiliens qu'il va rencontrer au bout du monde, Jeanne Benameur redonne un corps et une voix à des hommes et des femmes rendus abstraits par la mondialisation. Elle montre aussi la complexité de ce phénomène. Car après tout, ce qui fait le malheur des uns est la manne des autres, une manne au visage de Janus, mais une manne cependant. Là, c'est au Brésil que profite le crime. Mais s'il est facile de détester les autres, ceux du bout du monde qui volent le travail, il devient plus difficile de les condamner quand on les côtoie, quand on apprend à les connaître. C'est ce qu'Antoine va découvrir en même temps que la possibilité de naître à soi et d'affronter ses ambivalences.

    Tout cela, Jeanne Benameur le raconte avec passion, avec sa plume fluide, vraie, son regard humaniste, respectueux, qui parvient à mêler avec harmonie le parcours individuel et les grands bouleversements mondiaux. Une fois de plus une belle réussite, un roman qui ne vous lâche pas avant la dernière page, un bonheur de lecture.

    Je termine avec ce qui est, sans doute, un de mes passages préférés:

     'Mais ce qui la faisait vraiment sienne c'est qu'elle était envahie de livres. De sa chambre au grenier. Même dans la cuisine où on passait le plus clair de notre temps, des piles de livres voisinaient avec les épices sur le buffet, sur les chaises, partout. Les livres, chez lui, c'était une présence tranquille, pas comme chez Karima où les étagères bien rangées me narguaient. Chez Marcel, on aurait dit que les livres attendaient avec nonchalance qu'on les ouvre. Ils étaient là, disponibles, sans exigence. En même temps, par leur présence, ils me disaient que j'avais encore des millier de choses à découvrir. Ça ne me bousculait pas. Ça me convenait. L'impression que rien n'était fini, que quelque chose pouvait s'allumer et brûler haut et fort. En moi. C''était dans les livres, dans les pages. Ça m'attendait."

     A lire.

     Bellesahi, Manu, Noukette, Lencreuse,...

    Le jeudi c'est citation.gif

    La liste des participants est !