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Chiff' - Page 137

  • Elle s'appelait Sarah

     

     

    J'avoue d'entrée de jeu que la publication de ce billet me rend nerveuse. Je dois faire partie des rares personnes n'ayant pas aimé Elle s'appelait Sarah, et il est toujours difficile de parler dans ce contexte. Mais je me suis aussi souvenue qu'en matière de littérature, tout lecteur a le droit d'aimer, et de ne pas aimer ce qu'il vient de lire.

     

     

     

     On ne présente plus Sarah. Quoique, petite piqûre de rappel pour ceux qui auraient échappé à la vague!

     

    En mai 2002, une journaliste américaine installée en France est chargée par son magazine d'écrire un article sur la rafle du Vel d'Hiv. Elle découvre l'horreur des rafles, des camps de transit et la grisaille des années d'occupations. De tous les destins brisés dont elle va croiser l'histoire, c'est celui de la petite Sarah qui va changer sa vie. Sarah, qui le 12 juillet 1942 a enfermé son petit frêre dans le placard, croyant le protéger et pouvoir revenir le chercher. Sarah sur qui elle va enquêter jusqu'à ce qu'enfin, les fantômes d'apaisent.

     

     

     

     

    C'est un livre qui a fait couler beaucoup d'encre virtuelle. Difficile de passer après tous ces commentaires élogieux et rarement réticents. Pour ma part, cette oeuvre me laisse un goût amer. Je ne peux guère critiquer la construction même de l'histoire, maîtrisée de bout en bout, ou la plume de Tatianan de Rosnay qui est loin d'être désagréable à lire. Mais cela ne m'a pas suffit.

     

    Mon premier problème a été le point de départ même de l'histoire, le lien qui unit à travers 60 années Julia la journaliste et la petite Sarah. Les coincidences sont la base d'une bonne partie de la littérature, mais celle-ci m'a semblée un peu trop grosse.

    Une autre part de mes réticences vient de l'aspect mélo du tout. Les drames conjuguaux et maternels de Julia ne m'ont absolument pas touchés. Au point que l'histoire se centrant en définitive sur elle, j'ai presque fini par m'ennuyer. La cerise sur le gâteau étant la dernière rencontre dans un café avec le fils de Sarah, le début que l'on peut deviner d'une histoire d'amour construite sur les bases de ce qu'elle lui a appris du passé de sa mère avec la lumière qui  baisse progressivement. C'et probablement du à mon allergie à ce genre de scène, mais j'ai eu du mal à supporter. D'autant que le tout ne m'a pas paru très sain. Pour moi, l'histoire de Sarahest parasitée par celle de Julia, jusqu'à en être finalement supplantée. On n'apprend que des bribes de ce qui lui est arrivé, avec la charge de remplir les trous. Il est vrai que l'histoire de Julia, son regard plein d'humour sur les français est leurs défaut est une bouffée d'air dans une histoire au fond difficile, mais je me suis sentie frustrée. Frustrée par l'histoire d'une crise conjuguale qui ne m'intéressait pas plus que ça. Frustrée aussi par les mots trop adultes qui sont dans la bouche de cette enfant de dix ans, confrontée certes à l'horreur, mais n'ayant que dix ans.

    Mais ce qui m'a vraiment, vraiment posé problème est le regard porté sur la rafle du Vel d'Hiv. C'est une page sombre de l'histoire de France. Un événement qui m'a toujours soulevé le coeur et qui m'a toujours interrogée. Comment cela a t-il été possible? Je trouve salutaire qu'on écrive dessus. Cependant, j'ai la faiblesse de penser aussi que sur des faits aussi dramatiques, un documentaire est ce que l'on peut faire de mieux. La réalité est tellement au-delà de la fiction que je ne vois pas comment éviter les écueils. Bien sûr que des bonnes choses ont été écrites, bien sûr que la littérature jeunesse notamment a traité de cet épisode avec justesse et sensibilité pour le plus grand bien de tous. Mais je n'ai pas trouvé ce que je cherche dans les romans sur cette période dans Elle s'appelait Sarah.

    Le regard porté par Julia et ses collègues anglo-saxons m'a poussé dans mes derniers retranchements. Ce n'est pas parce que les américains ne savent pas ce qu'il s'est passé pendant l'Occupation qu'il en va de même en France. Ce n'est pas parce que certains n'ont pas retenu leurs leçons d'histoire, que personne ne se souvient.

    Il me semble que la France est un des pays qui fait son devoir de mémoire avec constance et je pense que c'est une bonne chose que de commémorer et rappeler le souvenir. Ce n'est pas sur le Vel d'Hiv que les français ont réellement des problèmes de souvenir, mais bien plutôt sur la colonisation et la décolonisation.

    Par ailleurs, si Julia est totalement obnubilée par ce qu'elle vient de découvrir, les autres ne peuvent pas passer leur vie à se lever le matin en se flageallant pour ce qui s'est passé avant même leur naissance! Je ne veux pas faire un cours de philosophie sur la mémoire et l'oubli, M. Ticoeur l'a fait bien mieux que moi, mais il y a un moyen terme entre l'indifférence affichée par un grand nombre de personnages français du roman et cette attitude totalement destructrice! Quand à la charge contre des plaques commémoratrices qui n'expliquent pas par le menu que les troupes allemandes n'ont pas été les seules à traquer les juifs de France... Je rappelerais simplement que la fonction de ces plaques n'est pas de donner des cours au passant. Alors oui, ces plaques ne citent que la barbarie nazie ce qui n'est pas exact. Mais pour les cours d'histoire, il y a des professeurs qui font leur travail quoiqu'en pensent certains, des manuels, des livres, des documentaires papier et audiovisuels, des expositions et un certain nombre d'autres choses! Difficile d'expliquer la complexité de ce qui s'est passé sur quelques cm² de pierre accrochées à un mur! Et au passage, celle qui est apposée sur le mur de l'école proche de mon lieu de travail cite la collaboration active du gouvernement de Vichy à la traque et à la déportation des juifs de France.

    C'est d'ailleurs une autre chose qui m'a fait bouillir, l'absence totale de rappel du contexte, sinon en passant comme ça, presque négligemment. Or, la complexité ne s'accomode pas de la simplification, surtout dans un roman destiné à des adultes.

     

    Le Vel d'Hiv est une des hontes de la France. Et j'ai honte rien que de repenser à cette page d'histoire. Ca ne m'empêche pas de ne pas aimer Elle s'appelait Sarah. Alors oui, je me souviens, et comme toute personne dotée d'un peu de sens moral je frémis, et je cherche à comprendre, et je m'interroge. J'ai regardé Nuit et Brouillard, et j'ai lu. Et je me suis informée. Ce roman ne m'a rien appris.

     

     

    Comprenons-nous bien. Je ne jette pas la pierre sur Mme de Rosnay. C'est simplement qu'à ma modeste mesure de lectrice lambda, je n'ai pas trouvé mon compte du tout dans son roman. Je ne recherche nullement la polémique. J'ai simplement cherché à exposer, sans agressivité, ce que j'espère avoir réussi, ce que j'ai ressenti à sa lecture. D'ailleurs, pour compense mon avis négatif, je mets en lien les avis de lecteurs et de lectrices, qui, eux, ont aimé, histoire que les avis de chacunes et chacuns puissent se contrabalancer.

     

    C'est un coup de coeur pour Laure, pour Majanissa. Clarabel a aimé, Sébastien aussi, tout comme Lily, et beaucoup d'autres que je ne peux pas tous citer. Pour l'intérêt de la chose, le débat sur biblioblog.

  • Chambre avec vue

    Ekwerkwe a été tellement convaincante que j'ai filé chercher à la médiathèque la plus proche l'exemplaire disponible de Chambre avec vue, l'adaptation par James Ivory du roman de E.M. Forster, Avec vue sur l'Arno. Ce fut un moment charmant que j'ai savouré avec la conscience de ma chance. Car si on ne retrouve pas dans l'adaptation toute l'irrévérence de Forster, les paysages florentins sont sublimes, le scénario en tout point fidèle à l'oeuvre, et les acteurs... Julian Sands et Rupert Graves courant tous nus en pleine nature, avec Daniel Day-Lewis trainant dans le secteur. Miss Bonham-Carter est intelligemment boudeuse et Maggie Smith une adorable vieille fille. Tout ce beau monde est brillant, et je pense que je vais enchainer tous les films d'Ivory. Après tout, pourquoi bouder son plaisir...

  • Un bon jour pour mourir

     

     

     

    Une soirée alcoolisée et voilà un Tim et un  narrateur qui peut être Jim Harrison comme ne pas l'être partis faire sauter un barrage du côté du Grand Canyon pour que les truites puissent se reproduire. Rejoints en route par la belle Sylvia qui entretient une relation pour le moins compliqué avec Tim, nos compères vont se lancer dans un road movie qui va les mener jusqu'au Montana dans un brouillard d'alcool, de drogue et de désir.

     

     

    C'est un roman qui n'est pas facile à résumer. D'abord parce qu'il ne se passe pas grand chose au final. Les trois personnages roulent, achètent de la dynamite, la font sauter, changent de plan, le narrateur tombe amoureux de Sylvia, Tim veut la quitter, Sylvia ne sait plus guère où elle en est. Ensuite parce qu'il me laisse plutôt perplexe.  Et enfin parce que c'est difficile de donner un avis négatif sur un romancier de cette carrure. J'aime beaucoup Jim Harrison sans pour autant avoir lu toutes ses oeuvres. Je garde un souvenir émerveillé de Dalva, de Légende d'automne, de La route du retour. Mais Un bon jour pour mourir m'a moins touchée. Le style est toujours présent, l'amour de la nature aussi, la passion et les grands espaces. C'est le thème du roman qui m'a laissée froide en fait.

     

     

     

    Le narrateur est un espèce de raté, perpétuellement entre cuite, interrogations existentielles et poésie. Tim est un vétéran du Vietnam, complètement fou et drogué jusqu'à la mœlle. Sylvia est la fille perdue d'une famille puritaine. Tous se débattent entre un conditionnement, une éducation et la vie qu'ils mènent. Le narrateur et Sylvia notamment sont des personnages assez savoureux en ce sens: le premier par exemple, enseignait le catéchisme à une période de sa vie, avant de devenir un poivrot obsédé par le sexe. Le regard d'Harrison sur les relations humaines, la solitude, le désir d'amour et le désir sexuel est intéressant. Mais les personnages ont fini par m'agacer. 222 pages où Tim avale des petites pilules et part dans des trips, 222 pages où Sylvia chougne, 222 pages où le narrateur pleure sur son existence et son désir "impossible" pour Sylvia. On a envie de les secouer ces enfants perdus de l'Amérique.

     

     

     

    Finalement, l'écologie n'est que prétexte à une violence qui n'a besoin de rien pour s'exprimer. Violence dans les relations d'amitié, violence dans les relations amoureuses, violence dans les relations avec le monde. Et personnellement, la description des trips, des cuites et des parties de jambes en l'air, les réflexions politico-sexuello-sociétales m'a fatiguée. Au début pourtant, cette alternance entre réalité, rêve et désir est fascinante. La manière dont les personnages sont coincés dans une vie et des situations qui les dépasse passionnante. La bande-son donne envie de se fournir les CD. Jusqu'à l'écoeurement. C'est assez drôle parce que le narrateur à un moment parle d'une cassette qu'ils on écouté jusqu'à ne plus pouvoir la supporter. Et bien c'est un peu l'effet que le roman m'a fait. Je l'ai quand même terminé. Parce que finalement, dans ce cas, le style à lui tout seul suffit au plaisir.

     

    Jim Harrison, Un bon jour pour mourir, 10/18, coll. Domaine étranger, 1985, 222 p.

     

  • Eldorado

    Le deuxième échec répertorié depuis que je tiens ce blog! J'espère que je ne vais pas être touchée par le syndrome de la multiplication des pains!

     

     

     Gardien de la citadelle Europe, le commandant Piracci navigue depuis vingt ans au large des côtes italiennes pour intercepter les clandestins. Jusqu'au jour où une série d'événements vient ébranler ses certitudes et lui faire tout quitter pour connaître à son tour, le lot de ceux qui quittent tout pour essayer de trouver une vie meilleure.

     

    La quatrième de couverture était alléchante, j'avais aimé La mort du roi Tsongor, et on m'en avait dit du bien. C'est donc en tout confiance que j'ai ouvert Eldorado de Laurent Gaudé. Mais là, le mur. Je n'ai même pas réussi à le terminer.

     

     

    A aucun moment je ne suis parvenue à m'attacher à des personnages que j'ai trouvé à la fois convenus et improbables. Je sais bien que l'humain est imprévisible et qu'il cache des ressources insoupçonnées, mais le commandant qui quitte tout pour faire à l'envers le chemin des clandestins, la jeune mère vengeresse, et les autres m'ont fait l'effet de marionnettes. Même les deux frères d'apprêtant à tout quitter m'ont à peine touchée. J'ai été saisie par un profond sentiment d'ennui. Cette fois-ci, les talents de conteurs de Laurent Gaudé n'ont pas suffit. Sur une réalité dramatique, des situations inhumaines, l'expression de la saleté et de la mauvaiseté humaine, il écrit un roman que j'ai trouvé plein de bons sentiments et de lieux communs, sans nuances.

     Le livrophile, Insatiable lectrice ont aimé, Essel et Laurent sont plus nuancés. Je n'ai lu leurs critiques qu'après avoir rédigé cet avis. Je retenterai la lecture d'Eldorado à leur lumière.

     

    Laurent Gaudé, Eldorado, Actes Sud, 2006, 237 p.

  • Les recettes de la blogoboule

    Aujourd'hui avait lieu le pique-nique de la blogoboule, merveilleusement organisé par Caro[line] (qu'elle soit mille fois remerciée). Les rencontres ont été belles, les discussions intéressantes (de l'oeuvre populaire à l'année Foenkinos), les rires au rendez-vous.

    Quelques unes des participantes m'ont demandé de mettre en ligne les recettes de mes contributions à nos régimes respectifs. Les voilà donc!!

    Le gâteau de la voisine, "que même avec les mains dans le dos et les yeux bandés tu le réussis, ou alors c'est que tu n'es vraiment pas doué":

    Telle Peau d'Ane, mesdames et messieurs, munissez vous d'une jatte et de quelques ingrédients. La bague en or massif peut être un ajout sympathique mais pensez à prévenir les convives auparavant. Pas sûr que leur trouvaille couvre les frais de dentiste.

    Il vous faudra donc un verre (lambda de moutarde décoré du roi lion ou de vos héros préférés. Ce pourra être Viggo éventuellement, mais je ne suis pas certaine qu'il y ait un verre Amora à l'effigie de David. Nul doute qu'ils remédieront bientôt à ce lamentable oubli). Dans la jatte, versez en vrac un verre de farine, un verre de sucre, un verre d'huite de tournesol ou équivalent. Ajoutez-y trois oeufs, un sachet de levure. Plus de la cannelle et du rhum (à consommer avec modération et tout ça) à votre convenance. Personnellement, comme vous avez pu le constater, je n'y vais pas avec le dos de la cuillère pourtant fort large.

    30 min à 45 min à 180°C et le tour et joué!

     

    Le cake au fruits rouges, "customise tes recettes":

    Il faut rendre à César ce qui est à César. Cette recette qui était un crash test apparemment réussi puisqu'il n'en reste pas une miette est inspirée du cake à la framboise de Sophie (in Les cakes de Sophie) et du crumble aux fruits rouges de la Popote des potes.

    Mélanger trois oeufs avec 170 g de sucre. Une fois le mélange blanchi et mousseux, y rajouter 160 g de farine et 1/3 de sachet de levure (personnellement, j'en met une demi). Faire fondre 150 g de beure demi-sel et l'incorporer à la pâte.

    Jusque là normalement tout va bien. Après, j'ai commencé à faire n'importe quoi!

    Utiliser un mélange de fruits rouges frais, ou, si vous êtes à la ramasse comme moi, le mélange de chez Picard. A faire décongeler un chouilla avant sinon gare au drame! Donc, mettre la moitié du sachet environ dans une casserole avec un sachet de sucre vanillé, deux cuillères à soupe de pastis (à consommer avec modération, n'est-il pas?) et de la menthe ciselée. Faire cuire un peu, égoutter (gardez le jus, il peut devenir un coulis fort sympathique). Réduire environ la moitié de la mixture en  purée et l'incorporer à la pâte. Ensuite, mettre dans un moule beurré et fariné une couche de pâte, quelques fruits, quelques morceaux de menthe, une couche de pâte, etc, etc, jusqu'à ce qu'il ne reste rien dans le saladier. Faire cuire 40 min à 180°C! C'était mon premier gâteau violet. Une expérience...