Voilà un joli petit roman sur lequel je suis tombée au hasard des rayonnages de la biblitohèque.
Emma, douze ans, n'est pas une adolescente comme les autres. Elle est certes préoccupée par sa rentrée scolaire, par les nouveaux amis à se faire, par les professeurs, mais surtout, elle a une petite soeur, Aliénor. Jusque là rien que de très normal. Sauf qu'Aliénor est autiste. Et qu'entre un père qui fuit dans le travail et une mère fermement décidée à s'occuper seule et envers et contre tous de la petite, la vie d'Emma a quelque chose d'un enfer. Jusqu'au jour où le vase déborde.
Si j'ai apprécié ce roman destiné aux enfants et jeunes adolescents, c'est pour le traitement sensible que fait l'auteur, Sylvaine Jaoui, du thème du handicap. Pour une fois, ce n'est pas une ode à la différence et à la tolérance, avec bons sentiments à la clé.
Emma aime et déteste sa soeur. Un peu comme ceux qui ont des frères et soeurs ont pu à la fois aimer et détesté leur fratrie, mais en pire. Elle la déteste non pas parce qu'elle existe, mais parce qu'à cause d'elle, elle a perdu sa mère et son père. Absent pour l'un, centrée autour de l'enfant malade pour l'autre, ils ne s'occupent plus guère d'elle. Emma se sent transparente à une période de sa vie où plus que jamais, elle aurait besoin d'attention. Sa mère, par sa volonté e vivre le quotidien avec Aliénor en oublie les sentiments de sa fille ainée. Sa souffrance, réelle, n'existe pas à ses yeux, seule l'enfant malade ayant finalement le droit d'avoir mal.
Sylvaine Jaoui pose mine de rien de vraies questions sur la maladie, sur la place de l'enfant malade dans la famille, sur le rôle des parents, sur la jalousie, sur le regard de ceux qui ne savent pas. Le problème d'Emma n'est pas tant sa soeur que sa difficulté à rendre publique l'existence de cette soeur. Elle n'ose pas en parler, et ce secret qu'elle garde rend bien difficile toute amitié. La moindre chose devient une épreuve. Inviter une amie, faire des courses, etc. Emma est à la fois rendue plus mature par cette épreuve, et en même tant fragilisée.
Tout est bien qui finit bien, mais le lecteur aura eu avant une évocation fine et sensible de l'adolescence et une approche concrète de ce qu'est l'autisme.
Sylvaine Jaoui, Je veux changer de soeur!, Casterman, 2003, 75 p.
Chiff' - Page 133
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Je veux changer de soeur... Enfin, certains jours!
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La beauté ne se mange pas en confiture. Enfin, c'est ce qui se dit...
J'avais été enthousiasmée par ma lecture de V-Virus du même auteur. C'est donc avec curiosité et quelques trépignements que j'ai piqué son exemplaire de l'oeuvre à Mimine frangine.
Bien, résumé: Tally Youngblood va fêter ses seize ans dans quelques mois. Et comme tous les adolescents, elle va subir le jour de son anniversaire l'intervention médicale qui la changera d'Ugly en Pretty. De laide parce que normale, elle deviendra un être conforme aux critères de beauté. Mais avec sa nouvelle amie, Shay, un monde nouveua s'ouvre à elle. Un monde où la laideur est acceptée, voire revendiquée. Un monde où certains savent que sous la volonté de rendre tout un chacun beau se cache une manipulation politique et totalitaire.
J'ai eu un peu de mal à rentrer dans le récit, mais je me suis finalement laissée faire avec plaisir, et je lrai avec un grand plaisir les deux tomes à venir. Ce roman est finalement bien plus profond que les premières pages ne peuvent le laisser penser. Sous des dehors simples, c'est à une réflexion intéressante que l'auteur se livre, et sur des thèmes importants: la beauté et l'esthétique, les systèmes politiques, l'écologie, le poids des conventions sociales, la science.
Il montre comment l'éducation peut influencer un individu au point de fausser son regard sur lui-même et sur le monde qui l'entoure. Les adolescents qui vivent toutes ces folles aventures sont persuadés pour la plupart qu'ils sont laids, gros, difformes quand ils sont tout simplement normaux. Cela m'a rappelé (un peu facile, je sais) tous les débats qui ont eu lieu récemment sur l'impact des photos de mode et de magazines sur un grand nombre d'adolescentes. On voit aussi à quel point il est facile de passer d'une utopie à une utopie totalitaire, et à quel point il est facile de manipuler les foules. La philosophie n'est jamais très loin. Même si la démonstration est parfois un peu lourde, elle est convaincante. Le récit bien mené, le suspense soutenu et les personnages attachants font le reste.
La critique du Cafard Cosmique, l'avis de Chrestomanci.
Scott Wersterfield, Uglies, Pocket Jeunesse, 2007, 432 p. -
Le cri
Attention, il semblerait que j'en dise un peu trop!! Pas de spoilers, mais voilà!!
Une barrière de péage sur une autoroute désertée. Un homme qui attend, qui regarde passer le temps et des véhicules chaque jours moins nombreux. L'humanité est décimée par un cri de plus en plus intense qui déchire l'atmosphère et auquel seuls quelques individus échappent. Etrangement, il retentit depuis que Le cri de Munch a été volé. Est-ce la cause de ce vol? Est-ce plus simplement la fin du monde?
C'est un roman qui me laisse perplexe. Je me suis laissée prendre au départ par ce personnage de péagiste et son quotidien, par ses réflexions sur la vie, le monde. Par le gendarme Daniel qui troque son uniforme contre les paillettes et sa voiture de fonction contre une cadillac blanche. Par Carlo et sa collection de panneaux indicateurs. Par Joras et les deux hommes de sa vie dans le coma. La narration est fluide, agréable. Le récit intriguant.
J'ai beaucoup aimé l'utilisation faite du Cri de Munch, une toile qui m'a fascinée depuis que j'en ai vu une des versions au musée Munch. Ce qu'en dit le narrateur est très juste. L'intensité du cri, la souffrance et la folie qui se révèlent, l'isolement du personnage.
Puis petit à petit, ce n'est pas l'ennui qui s'installe, le roman étant court, mais une certaine lassitude. Un peu comme celle du narrateur qui ne sait plus trop où il va, si tant est qu'il l'ait jamais su. On ne voit pas où l'auteur nous mène, et le dernier chapitre se termine sur une chute qui fait comprendre que tout ce qui précédait n'était que métaphore, ou du moins le rêve d'un homme luttant pour échapper à l'horreur de la réalité. J'ai eu le net sentiment que cette fin venait comme un cheveu sur la soupe, achevant de faire sombrer le récit. Laurent Graff parle de choses dures, lourdes, mais d'une manière qui ne m'a pas du tout touchée. J'ai besoin d'un peu plus de clarté.
Stéphanie (qui m'a gentiment prêté son exemplaire) a aimé, Florinette en fait une analyse intéressante.
Laurent Graff, Le cri, J'ai lu, 2007, 125 p. -
De l'hiver et des fringues
Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais l'année avance et des choses étranges apparaissent dans les magasins de fringues. Je le sais, j'y étais ce matin. Avec l'intention avouée de refaire ma garde-robe. Mais dix minutes passées dans la succursale de l'enfer que sont les cabines d'essayage d'une marque de prêt-à-ne-pas-porter bien connue des fauchés dont le slogan pourrait être Hideux et Mal coupé m'a convaincue d'aller voir ailleurs si de quoi enrober les hanches n'était pas disponible! Par exemple, dans ma cuisine! C'est vrai quoi! Un coup on ressemble à une montgolfière alors que franchement, il faudrait un sacré coup de mistral pour nous faire décoller, et un autre on se retrouve privé de cette fonction si peu nécessaire que remplissent nos courageuses et acharnées petites alvéoles bonchiques. C'est pas comme ça que ça se dit? M'en fiche! Et en plus, je ne sais ce qu'ils font à ces miroirs, mais pour le coup, ce n'est pas à la porte d'Aix que ressemblaient mes fesses. On se serait cru devant l'Arc de Triomphe! Stupeur et frémissements comme dirait l'autre!
J'avoue? Aller, j'avoue. J'ai une sainte horreur du shopping!
Heureusement qu'il y a d'autres bonheurs que les fringues sur cette terre et qu'il y a les copines m'encourager au stupre et au lucre!!
Déjà, il y a eu le dîner livre-échange. Des comptes-rendus en ont été fait un peu partout, mais je tiens à dire de vive plume que j'ai passé un très bon moment! Arrivée avec trois livres, je suis repartie avec trois autres. Et en plus, grâce à la gentillesse de Stéphanie, j'ai eu L'empreinte de l'ange de Nancy Huston sur lequel je bavais avec fort peu d'élégance! Nourriture spirituelle et nourritures terrestres accompagnés d'unne bonne dose d'humour, j'ai bien l'intention de rempiler au suivant!! Malgré le mal que je fais à ma PAL! Tant pis pour elle!
Et puis j'ai trouvé des enveloppes autrement plus sympathiques que celles de ma mutuelle et de ma banque sous mon paillasson!
Anjelica et Flo ont frappé conjointement et il semble que ma réputation de fada de la cuisine soit maintenant bien assise!A gauche (hem... droite) le joli marque-page envoyé par Anjelica. Les cartes me viennent de Flo qui m'avait déjà envoyé un marque-page à épices! Elle a joint à l'envoi un cahier pour noter mes recettes de cuisine! J'affute mes stylos!! Merci encore à toutes les deux!
Et pour la peine, j'ajoute une p'tite recette! Une variante du gâteau à la canelle et au rhum!
La base est la même: 3 oeufs, un verre de farine, un verre de sucre, un verre d'huile, un sachet de levure! Mais à la place de la canelle et du rhum, ajoutez trois poires coupée en petits morceaux, les deux tiers d'un sachet d'amandes effilées et une bonne cuillère à café de mélange de cinq épices. 30 minutes à 180°C et le tour est joué! Les amandes donnent du fondant, les poires font une sorte de sirop savoureux mêlé de fruit au fond et les épices parfument le tout. Personnellement, j'aime beaucoup!
Je ne saurais trop vous conseiller d'ailleurs ce mélange d'épices originaires de Chine. Je l'ai découvert il y a trois ans, et depuis, il accompagne une bonne partie de mes desserts! On trouve dedans de l'anis étoile, des graines de fenouil, des clous de girofle, de la canelle de Chine et du poivre sichuanais. Ceci dit, à la base, il devrait servir à cuisiner des viandes! -
Auncun dieu en vue (et pourtant ils ont bien regardé)
Bombay de nos jours. Une métropole grouillante, foisonnante, toute en contrastes et en méandres. Une métropole où se croisent les voix et les destins de personnages liés par le sang, l'amitié, la religion ou une simple rencontre.Je ne suis pas très familière de la littérature indienne et peu encline à m'y pencher jusqu'à présent. Simplement parce que je m'intéressais plus à la littérature japonaise ces derniers temps. C'est donc un peu par hasard, sur les conseils d'une collègue enthousiaste que j'ai embarqué ce livre avec moi dans mes pérégrinations. Que ladite collègue en soit remerciée, puisque grâce à elle, j'ai vécu un moment enchanteur.Le procédé tout d'abord est intéressant. Le livre débute avec le point de vue d'une certaine Mme Khawaz. L'époux dont elle parle durement fait entendre sa voix au chapitre suivant. Puis c'est le tour du fils qu'évoquait l'époux, puis de la soeur, puis du médecin qui avorte la soeur, et ainsi de suite jusqu'à ce que la boucle soit bouclée. Alors que cela pourrait donner un côté artificiel à la narration, on se retrouve avec un récit fluide, construit, logique et l'avantage non négligeable d'obtenir un tableau vaste de la société indienne. Le livre est plein du bruit, de l'agitation de ce pays et de cette ville tentaculaire.
Sans condamnation, sans morale particulière, l'auteur donne à entendre son Inde. Chacun parle en effet avec sa petite voix singulière, ce qui n'est pas un mince exploit. Femme hindoue ou musulmane, traditionaliste ou moderne, jeune musulman libéré, adolescent hindou fanatisé, sikh, mendiant, self-made-man, etc.
Le style est très différent d'un chapitre à un autre. Aucun tabou particulier. Sont aussi bien évoqués au fil des pages les mariages arrangés, les avortements sélectifs ou non, l'autorité des belles-mères, que la haine réciproque des hindous pour les musulmans, le sentiment nationaliste, la misère la plus noire côtoyant la richesse la plus arrogante et indifférente.
Et alors que les réalités décrites sont parfois dramatiques, l'humour, voire le burlesque apparaît soudainement et irrésistible. Comme avec ce tueur en série incapable d'abattre une femme parce qu'il avait dit qu'il tirerait à 20 et qu'il n'arrive pas à compter au-delà de 7. Ou la marieuse buffetomane (je vous assure, c'est une vraie maladie!).
J'ai bien sûr été plus touchée par certains personnages que par d'autres, mais tous ont quelque chose à dire, à transmettre. Leçon de courage ou de bêtise, de renoncement ou de combativité. On est très loin des clichés.
Une belle lecture.
Altaf Tyrewala, Aucun dieu en vue, Actes Sud, 2007, 202 p.