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  • Best love Rosie

     

    Rosie rentre à Dublin, décidée, après une vie de voyage et de rencontres à s’occuper de MIn, sa vieille tante qui l’a élevée. Entre livre de développement personnel pour la maturité, découverte de New York, retour aux racines, toutes les deux vont se redécouvrir et réaliser, non sans heurts et difficultés leurs rêves.

     

    Nuala O’Faloain est décédée le 9 mai 2008 après avoir décidé de vivre ses derniers jours  pleinement. Christian Sauvage en parlait avec beaucoup d’émotion. Cette irlandaise de 68 ans avait  publié son premier roman traduit en français chez Sabine Weispieser en 1996 et obtenu, 10 ans plus tard le prix Femina étranger pour L’histoire de Chicago May.

    Publié aprè sa mort, Best love, Rosie est un roman d’une rare intensité. Un de ces livres cocon où l’on se coule avec un rare sentiment de confort et d’empathie avec les personnages. Parce que malgré la différence d’âge que je peux avoir avec Rosie et Min, difficile de ne pas se sentir proche de ces deux femmes comme de deux amies que l’on regarde se débattre avec leurs petits et grands problèmes, tomber pour mieux se relever, rire plutôt que pleurer.

    Best love Rosie est un roman sur l’acceptation. L’acceptation de soi d’abord, de ses besoins profonds et de ce que la vie a fait de nous. Cela, Rosie le trouve en revenant à ses origines, à la maison où avaient grandi sa mère et Min sur le bord de l’océan. Ce qu’elle a fuit de ses vingt à ses cinquante ans, elle l’apprivoise peu à peu. Quand elle ouvre la maison de ses ancêtres, Rosie ouvre aussi une part d’elle-même qu’elle avait jusqu’alors laissée soigneusement dans l’obscurité. Elle accepte son corps vieillissant, l’absence d’enfants, sa relation avec Min. Elle assume consciemment ses choix. Et elle accepte enfin de regarder différemment ceux qui l’entourent, ami et familles, de reconnaître qu’elle ne les connaît pas vraiment. Rien de facile. Accepter qu’on ne connaisse pas ceux que l’on aime et rester malgré cela avec eux est la plus belle des preuves d’amour. L’acceptation du vieillissement aussi, de ce corps qui change et des regards des hommes qui ne sont plus les mêmes. Quand la sensualité n’est plus seulement affaire de corps qui se touchent et qui s’affrontent et qu’il faut se résoudre à perdre la séduction. Rosie vit tout cela avec un humour ravageur, une volonté d’aller de l’avant extraordinaire, une énergie folle et communicative. Ce cap qu’elle passe est celui de la maturité, mais par la manière dont elle l’affronte, elle parle de la vie tout simplement, et de tous les changements qu’il faut affronter.

    Je pourrais ajouter à cela tout le bien que je pense du style de Nuala O’Faolain, de la vie qu’elle insuffle à son récit, mais je n’en ai pas envie. Ce qui importe, c’est le bonheur ressenti  à cette lecture et le souffle d’Irlande qui traverse, l’espace de 500 pages nos vies.

    « J’ai pensé à mes amis et à ce que j’éprouve pour eux. J’ai envie de les soutenir. Pour rien au monde je ne voudrais leur faire de mal. S’il y a quelque chose en eux qui me semble pouvoir être amélioré, je le leur suggère avec délicatesse – du moins je l’espère. Mais, globalement, je les aime comme ils sont et s’ils veulent rester tels, cela me convient.

    Alors je me suis aperçue que je n’avais jamais été aussi indulgente avec moi-même. Toute ma vie, je me suis enjoint de changer, de m’améliorer. Jamais je ne me suis traitée avec amour.

    Et ç’a été comme si, enfin, je comprenais. S’aimer soi-même, ce n’est pas faire preuve de complaisance égoïste. L’amour peut nous ouvrir. Il peut nous adoucir et nous permettre d’échapper aux vieux moules. L’amour est une attention délicate et protectrice. En dirigeant cette attention vers soi-même, on permet aux pousses fragiles d’un nouveau moi de s’épanouir. »

     

    L’avis de Cuné, celui d’Alice, celui de Keisha, de Bellesahi.

  • On s'y fera

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    Arezou, 41 ans, iranienne divorcée, maman d'une jeune femme de 19 ans capricieuse, en charge d'une mère tyrannique et de l'agence immobilière familiale. Rien dans sa vie ne semble laisser place à un nouvel amour. Et pourtant. Qui sait ce qui peut arriver au détour d'une visite...

    On s'y fera est avant toute chose l'histoire de l'amour qui va éclore entre une femme qui atteint la quarantaine, et un homme du même âge, jamais marié. Un amour qui naît avec une rencontre agitée, des rendez-vous, des intérêts communs, qui se heurte à l'incompréhension de l'entourage familial et amical, bref, un amour un peu comme tout les autres. Seule différence avec un roman à l'eau de rose occidental, Arezou se heurte non seulement aux écueils habituels, mais en plus aux murs que dresse une société écartelée entre tradition et modernité. C'est avec un choc qu'au détour d'un chapitre, on reprend soudainement conscience que toutes ces femmes sont voilées, que la police des moeurs peut intervenir, que les hommes ont tout pouvoir sur leurs femmes. Dans ce contexte, les réactions exacerbées des femmes qui entourent Arezou à l'annonce de son intention de se remarier prennent sens: pourquoi se remarier quand on est libre, débarrassée de la tutelle d'un homme au mieux aimant ou volage, au pire violent?

    Je ne saurais guère vous dire à quoi je m'attendais, mais j'avoue avoir été un peu déçue. Par les personnages auxquels je ne suis pas parvenue à m'intéresser réellement, au manque de profondeur psychologique dont ils font preuve. Le quadragénaire gentil et bien sous tous rapports, la vieille dame imbuvable, la fille capricieuse et rebelle, l'amie meurtrie par la trahison de son fiancé... La plupart des rebondissements et des événements m'ont paru plutôt téléphonés. En fait, le fond du problème est, je pense, qu'en entendant parler d'une auteure iranienne racontant l'histoire de femmes iraniennes, je me suis attendue, comme d'autres sans doute, à un roman engagé, réaliste, qui me permettrait de mieux connaître l'Iran. Ce n'est pas ce qu'il est, ni ne prétend être. C'est un roman d'amour de bonne facture, une jolie histoire douce-amère qui a le mérite de ne pas aboutir à un happy end convenu. Une lecture agréable mais qui ne me laissera pas de souvenirs impérissables.

    L'avis de Fashion, de Tamara, Brize,...

     

    Et par pitié, messieurs et mesdames lqui rédigez les quatrièmes de voucerture, cessez de mettre Jane Austen à toutes les sauces! Vous ne trompez guère que ceux qui ne l'ont pas encore lue! Arezou n'est pas une infortunée jeune fille à marier manquant de dot il me semble!

  • Novice




    Une enfant de 10 ans, nue, blessée, amnésique, dont la famille a été massacrée. Recueillie par un charpentier, elle retrouve progressivement le fil de son histoire et découvre ses origines. Celle d'une enfant qui ressemble à une humaine mais qui ne l'est pas. Une Ina, une de ceux qui ont donné naissance au mythe des vampires. Lui reste à comprendre pourquoi ceux qui constituaient sa famille sont massacrés les uns après les autres et pourquoi elle est la cible de mystérieux tueurs. Est-ce sa peau noire? Sa capacité à rester éveillée le jour? Ou est-elle la victime d'une guerre de clans?

    Octavia E. Butler est une écrivaine noire-américaine, féministe, décédée récemment.

    Ce qu'elle offre à ses lecteurs n'est pas une simple histoire de vampire, avec grands êtres blafards qui vont mordre une fois la nuit tombée de malheureux humains. En racontant l'histoire de Shori, la jeune Ina, elle parle de l'altérité et de ce qu'elle provoque. Shori est différente de ceux de son espèce, fruit de manipulations génétiques visant à rendre les enfants Ina plus forts, plus aptes à survivre dans un monde où leur place est de plus en plus tenue. Mais dès que l'on parle de différence, pparaît l'intolérance, le rejet, la haine. Et même les plus sages d'entre les sages ne peuvent faire face à toutes leurs peurs malgré leur sagesse et leurs connaissances.
    Une chose est certaine, c'est un roman prenant et intéressant à défaut d'être très original. Intéressant parce que la société que forment les vampires d'Octavia E. Butler est communautariste, presque matriarcale, et la relation de symbiose que les Ina entretiennent avec les humains qui les nourissent est atypique. Ils ne se contentent pas de leur prendre leur sang, voire leur vie. Ils établissent avec leurs symbiotes un équilibre délicat: nourriture et force contre longue vie, plaisir contre plaisir.  Un échange librement consenti même si irrévocable.
    Et elle aborde des sujets qui fâchent sans avoir peur de choquer.
    Ceci étant, dès les premières pages, Shori malgré son corps d'enfant entame une relation amoureuse avec Whright, son premier symbiote.  J'avoue à titre personnel que cet aspect m'a gênée malgré le fait que les apparences ne sont pas ce qu'elles semblent être.

    Une chose est certaine, c'est un roman qui ne laisse pas indifférent malgré une fin un peu convenue. Et comme il semble que ses précédents romans soient absolument extraordinaires, je les lirai avec curiosité et plaisir!

    L'avis de
    Cuné. Celui d'ActuSF

    Octavia E. Butler, Novice, Au diable vauvert, 2008, 463 p.

  • Et tu te soumettras à la loi de ton père




    " La foi, entre les mains d'un homme comme toi, c'est une arme de poing. Une arme blanche. Elle fait infiniment plus de mal que de bien."


    Une famille si bien comme il faut, terrorisée par un père fanatique. Les mots d'une enfant, cinglants, vivants, rendus lumineux par la force d'une révolte qui ne peut encore dire son nom mais qui lui permettra, un jour, de dépasser le désamour de son père, la soumission de sa mère, le silence qui pèse sur une maisonnée en suspens.
    Marie-Sabine Roger offre un texte d'une force abasourdissante. A travers sa narratrice, elle démonte les rouages d'une destruction systématique de la beauté, de la joie, du bonheur.  Ce père, aigri par ses échecs a basculé de la foi au fanatisme, oubliant ce que signifie la compassion, la charité, l'amour de son prochain. Il cache ses doutes, ses mauvaises pensées, ses failles sous des citations, une austérité, des contraintes, utilisant la seule arme à sa disposition pour exercer son pouvoir sur ceux, plus faibles qui l'entourent, maintenir sa femme enfermée, étouffer ses enfants, détruire encore et encore. Une arme qui ne résiste pas au fait que ses enfants grandissent et échappent peu à peu à son influence. Le récit est celui de la prise de conscience progressive d'une enfant de l'anormalité, de l'injustice de ce qu'elle subit au quotidien. Ce n'est pas la religion, la foi qui est mise en accusation, mais l'utilisation qui en faite, l'intolérance qui la prend pour caution. Si c'est le catholicisme qui est au coeur du récit, ce pourrait aussi bien être les orthodoxies de tout poil, et toute les croyances et idéologies qui font oublier à ceux qui les suivent leur liberté et leur humanité.

    Car comme le dit Aristote,  "L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"

    J'ai vibré, presque pleuré, le ventre noué par la force d'un texte intense que j'aimerais entendre lu à voix haute tant il mérite d'être dit, crié.

    "Je suis une enfant. Je te crains.
    Plus grave: je te crois.
    Tout ce que tu me dis est la vérité vraie, si dénuée d'espoir, si souvent déplaisante. Je n'aime pas la vie comme tu la présentes. Tu nous parles douleurs, devoirs et privations. Nous n'avons pas droit au bonheur, acceptons-le s'il nous échoit. Tu ne ris pas. De quoi pourions-nous rire? La vie n'est-elle pas une lutte sans fin? Rendons grâce au Seigneur, cette vallée de larme est notre bien.
    Tu ne souris pas davantage. Tu observes, tu juges. Tu absous rarement.
    Pour te plaire, que faut-il faire? Il faut se taire et garder profil bas. Prier Dieu. Marcher droit.
    Rester grave.
    La gaieté est un des travers de l'enfance. Elle se propage et croît comme un chiendent, pour peu qu'on l'encourage. Chez nous, elle est bridée. Tu la juges stérile, frivole. Dangereuse.
    Ici, on ne rit pas pour rien. La joie, pour s'épancher, a besoin d'une excuse. Et même dans ce cas, il ne faut surtour pas qu'elle dure trop longtemps, ni qu'elle se manifeste de façon complaisante, trop visible, bruyante. Non, elle se doit de rester mesurée.
    Ici, on ne peut être heureux qu'en aparté.

    Le plaisir et un trésor secret, un bien-être qui se resquille.
    C'est du bonheur de braconnier."

    Marie-Sabine Roger, Et tu te soumettras à la loi de ton père, Ed. Thierry Magnier, 2008, 143 p.


    L'avis de
    Goelen

  • Qui touche à mon corps je le tue

    Trois vies qui s'entrecroisent, douloureuses, prises dans les méandres d'un drame qui les dépasse. Celle de l'exécuteur de l'Etat français, celle de Marie G. qui vit ses dernières heures, celle de Lucie L. qui saigne et attend que l'enfant qu'elle porte se décroche. 


    Qui touche à mon corps je le tue

    Voilà un roman qui m'a donné du fil à retordre et qui m'en donne encore. Le sujet m'attirait pourtant: l'avortement, le prix d'une transgression si commune dans une société qui n'admet pas qu'une femme refuse de donner la vie. Qui touche à mon corps je le tue parle du corps de la femme, de ce qu'il arrive lorsqu'il est identifié, reduit à la seule fonction maternelle. Il parle aussi de la relation de la mère à l'enfant dans ce qu'elle a de plus beau et de plus étouffant.
    Lucie L. est à ce titre un personnage exemplaire: une enfant étouffée par l'amour de sa mère, incapable d'aimer et de donner la vie tant pour elle, ce serait échouer définitivement à exister pour elle-même, pour ce qu'elle est:  une femme. Et pour cela, elle est prête à souffrir, à saigner et à affronter le regard de la société. Ses souvenirs du curetage consécutif à son premier avortement sont à cet égard glaçants. Marie G. est la dernière, celle qui n'existait pas ou si peu, et qui n'a trouvé comme moyen d'être que son métier de faiseuse d'ange. Henri D., le bourreau, est marqué à tout jamais par sa mère décédée au cours de son enfance et ne trouve comme échappatoire à la culpabilité qu'il ressent que d'embrasser la carrière de ses ancêtres. Tous les trois, qu'ils le fassent de manière légale ou illégale sont des bourreaux en ce sens qu'ils amènent la mort. Qu'ils aient raison ou tort de le faire importe peu. Ce que cela fait d'eux l'est.

    Une réflexion passionnante donc, mais rendue trop dure, trop dense par le style de l'auteur. L'absence ou quasi-absence de ponctuation, l'aridité, m'ont rendu la lecture pénible, m'ont empêchée de ressentir la moindre empathie, la moindre tendresse ou la moindre horreur pour les trois personnages malgré leur statut de narrateur. Eux mêmes donnent l'impression d'être totalement en dehors de leur vie. Je ne suis pas amatrice de sentimentalité, mais la froideur qui imprégne l'ensemble du roman me laisse un goût amer.

    Lou est enthousiaste, Clarabel aussi.

    Valentine Goby, Qui touche à mon corps je le tue, Gallimard, 2008, 136 p.
    1,5/5