Elle est belle, talentueuse, pauvre et actrice. Il est l'un des plus grand dramaturges irlandais. En 1907 à Dublin, John Synge rencontre Molly Allgood. Cinquante ans plus tard, elle se souvient de cet amour hors norme qu'ils ont partagé, de celui qu'elle n'a jamais pu oublier.
"Alors il marche, et il marche avec ses vieilles bottes abîmées, et elle marche à ses côtés, par temps de pluie ou de canicule. Ils sont presque toujours côte à côte, rarement face à face, et leurs empreintes sur la plage forment de gracieuses parallèle qui ne se rencontrent guère."
Voilà qui résume bien à mon sens l'histoire de Molly et de John, marchant ensemble sans parvenir à se rencontrer réellement, séparés par un milieu, par une éducation, par leurs aspirations et pourtant unis. Bien sûr Joseph O'Connor précise dans sa postface que les biographes le détesteront, que ce n'est pas dans son texte qu'il faut chercher à connaître le dramaturge. Mais pour moi qui ne le connaissais guère que de nom, et qui ne savait même pas l'existence de Molly Allgood, je dirais que ce n'est pas John Synge qui est important, mais ce que l'auteur fait de lui, fait de cet amour teinté de douleur, d'amertume, de bonheurs intenses brisés par l'incompréhension. Plus que tout, ce n'est pas John Synge qui est important mais Molly, merveilleux personnage qu'on découvre vieille actrice déchue, et jeune femme pleine de fougue et de passion traçant son chemin dans une Irlande puritaine. A travers eux, c'est l'Irlande qui se dessine, puritaine, marquée par la famine et l'émigration, le mépris, la famine. Il y a des pages merveilleuses sur l'amour, la vie, le théâtre et l'écriture, un souffle qui ne se dément pas jusqu'à la dernière page et qui laisse le coeur serré en abandonnant Molly sur cette lettre d'amour qui la résume toute et qui résume sa vie marquée par cet amour que, dit-on, on ne connaît qu'une fois et qui l'a tout à la fois soutenue et détruite.
C'est un roman dont la finesse dans l'analyse des sentiments humains, dont la construction admirable m'ont laissée enchantée, un petit bijou qui plonge au coeur des atermoiements amoureux et qui offre une scène magnifique et tragique aux deux amants maudits. Indéniablement à découvrir.
"Toute notre vie, nous livrons bataille dans les fers de nos mères. Mais même les chaînes produisent de la musique."
Lili Galipettes sur Chroniques de la rentrée littéraire, Val, Cuné dont je partage totalement l'avis,
O'Connor, Joseph, Muse, Phébus 2011, 258p., 5/5

Un recueil de nouvelles, un court roman, et à chaque page le même enchantement. Claire Keegan est une orfèvre au talent immense.
A noter L'Antartique sort en poche chez
Margaret Mackenzie a toujours vécu dans l'ombre de ses frères, jeune fille puis jeune femme invisible jusqu'à ce qu'à trente-cinq ans, elle hérite soudainement d'une petite fortune. Et que tout aussi soudainement, les prétendants se bousculent au portillon...
Ce n'est pas que je veuille pas faire plaisir à mon lectorat en délire, mais le problème fondamentalement fondamental avec les recueils de nouvelles, c'est qu'ils sont un brin compliqués à résumé sauf à se taper un passage en revue de la table des matières aussi exhaustif qu'enquiquinant . Or donc, s'il m'arrive et me plaît parfois d'être enquiquinante, il m'arrive tout aussi bien d'être 
Lily et Val approchent de la cinquantaine, elles se sont aimées passionnément, comme s'aiment les amies d'enfance avant de se déchirer et se séparer. Avec une colère que presque trente ans de silence n'ont pas réussi à calmer mais que la cuisine, leur passion commune, va peut-être parvenir à guérir.