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Chiff' - Page 145

  • Horizons lointains

    Connaissez-vous la meilleure manière de planer dans le métro? Oui, je vous l'accorde, entre le boucan, les odeurs, les gens qui vous tombent dessus, l'harmonieux bip de fermeture des portes, la foule et le reste, ce n'est pas facile. Méthode imparable: dégainer un roman de Haruki Murakami, visser les écouteurs sur les oreilles (je vous laisse le choix de la bande-son, moi en ce moment j'oscille entre Mika et Schubert) et youp là (boum dans mon cas quand je tombe)!

    Alors, Murakami. Et pour être plus précise Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil. J'ai aimé. Ben oui. Dites-moi donc comment vous faites, vous, si vous n'aimez pas Haruki!

    Pitit résumé: enfant unique et solitaire, Hajime rencontre à l'école Shimamoto-san, même âge, jolie et handicapée. Leur amitié, intense, amoureuse, est brisée par un déménagement. Hajime, malgré la souffrance de cete séparation va constuire sa vie: mariage, enfants, travail. Jusqu'au jour où Shimamoto réapparaît et où l'équilibre qui s'était installé est menacé.

     

    Comme d'habitude, Murakami excelle à décrire les affres de l'amour, des premières expériences et de la vie tout court. On trouve de tout dans ce roman. Une description criante de vérité de la solitude et de la psychologie du solitaire, une réflexion sur l'amour et l'insatisfaction, de la musique et cette plume si particulière. Et surtout, surtout, on retrouve cette capacité effarante du bonhomme à instiller tout doucement le doute. Qu'est-ce qui est réel, qu'est-ce qui ne l'est pas, jusqu'au dernières pages qui remettent en question tout ce qu'il vient de se passer. Du grand art.

    C'est un roman étrange qui souffle à la fois le chaud d'une sensualité et d'une sexualité assumée et d'autant plus forte qu'elle a été réprimée pendant une vingtaine d'année, et le froid de ces personalités étranges. Le chaud d'un amour qui se trouve enfin complet et le froid d'une fuite incompréhensible. J'ai aimé son atmosphère particulière, ses personnages qui ne sont pourtant pas sympathiques, la mélancolie et le désenchantement. C'était juste beau!

    Les avis de Papillon, Flo.

    Haruki Murakami, Au sud de la frontière, à l'ouest du soleil, 10/18, 2003, 223 p.

  • Quand le blues vous tient

    Très agréablement surprise par ma lecture de Strawbery Shortcakes, j'ai décidé de voir un peu ce que donnent ses autres oeuvres. Dont acte, et critique circonstanciée. On rtrouve dans Blue et Everyday le même dessin relativement destructuré un peu destabilisant au départ, avec des gros plans décalés, et ce trait malgré tout agréable. Seul bémol, la difficulté persistante à reconnaître les personnages. Ou alors je n'étais vraiment pas réveillée, ce qui, en l'état actuel des choses, est tout à fait possible!

     

    Blue:chronique de l'amour-passion qui naît entre deux lycéennes. Kiriko Nananan pose un regard toujours sans concession mais tendre sur ces jeunes filles et jeunes femmes qui se cherchent, et sur une jeunesse avide d'expérimenter et sujette aux sentiments les plus exacerbés. Elle traite ici avec finesse de la question de l'identité sexuelle, de l'homosexualité, et interroge son lecteur sur ce qu'est l'amour. Un beau manga.

     

    Everyday: Kiriko Nananan se penche cette fois-ci sur les relations de couple avec l'histoire de Miho et Seiichi. Ils s'aiment, ils vivent ensemble, mais Miho s'interroge: doit-elle continuer à entretenir Seiichi qui tente de percer dans la musique au risque de se perdre elle-même, ou retourner vers son premier amour... On a presque l'impression de se retrouver dans un shôjo à la lecture de ce résumé, mais on en est loin je peux vous le garantir! Prostitution, avortement, mariage, travail, tout y passe! Et les hommes n'ont pas plus le beau rôle avec leurs atermoiements et leurs lâchetés que les femmes amoureuses et faibles. Miho avec ses doutes est ausi insuportable que ses amoureux!

     

    Bref, voilà qui confirme tout le bien que je pense de cette mangaka! Une belle manière de découvrir la société japonaise contemporaine. Avec un petit faible pour Yesterday, plus abordable que Blue ou Strawberry Shortcakes.

    Kiriko Nananan, Blue, Casterman, Sakka, 2004, 232p.

    Kiriko Nananan, Everyday, Casterman, Sakka, 2005, 204p.

     

     

  • Mille-feuilles à la fraise

    Un bien beau manga que le Strawberry Shortcakes de Kiriko Nananan. En plusieurs chapitres, elle mêle les vies de plusieurs jeunes femmes vivant et travaillant à Tokyo. Elles n'ont rien en commun, l'illustratrice, la prostituée, la petite employée. Sauf qu'elles traversent les même crises sentimentales et existentielles. L'auteur porte un regard tendre mais sans concession sur une jeunesse qui se perd dans l'attente d'un amour idéal, d'une vie meilleure et en oublie de vivre, se complaisant dans la médiocrité, les concessions, les crises de désespoir et les regains d'énergie. Beaucoup de larmes et de désespoir dans ces vies en demi-teinte qui m'ont beaucoup touchée et m'on laissée mélancolique. Peut-être parce que finalement toutes les femmes et jeunes femmes peuvent s'y reconnaître au moins un peu.

    Kiriko Nananan, Strawberry Shortcakes, Casterman, coll. Sakka, 2006, 331 p.

  • Labyrinthes familiaux

    Une fois de plus Heri m'a coiffée sur le poteau mis ça ne va pas m'empêcher de dire ce que je pense de ce roman!

    C'était bien, c'était beau, c'était émouvant et tout et tout. Une vraie belle découverte. Dès l'instant de sa conception, Ruby Lennox raconte sa vie et celle de sa banale famille anglaise. Sauf qu'aucune famille n'est banale et que toutes cachent plus ou moins bien leurs drames, leurs souffrances et leurs déchirures.

    Kate Atkinson entremêle avec une grande habileté passé et présent. Elle raconte la vie comme elle vient avec ses successions de mariages, d'enterrements, de naissances, de rentrées scolaires et de vacances, de fuites et de retrouvailles. Les choses prennent sens chapitres après chapitres, des liens se révèlent entre des personnages qu'à priori rien ne rapproche. C'est fascinant de voir l'histoire de cette famille prendre forme à travers les vies des femmes de la famille. Une bonne centaine d'années d'histoire d'Angleterre et d'Europe, deux guerres mondiales et les transformations de la société par une accumulation de petits épisodes.

    Et s'il n'y avait que ça! La voix de Ruby, toute en clairevoyance, en humour et en amertume distille le rire et les larmes. Son regard sur ce qui l'entoure est absolument sans concession. De la voix de l'enfant à celle de l'adolescente puis de l'adulte, on ne perd jamais ce regard chargé d'une souffrance qui s'ignore. Elle n'épargne rien du poids des bonnes manières et des coutumes d'une classe moyenne qui se veut respectable et qui n'en reste pas moins pitoyablement vulgaire et étroite. Aucune petitesse, aucun ridicule ne lui échappe. Et on rit alors que ces vies qui s'égrennent sont somme toute d'une tristesse insondable.

    J'ai envie de poursuivre ma découverte de cet auteur.

    La belle critique de Kalistina, celle de Cuné, celle de Heri

    Kate Atkinson, Dans les coulisses du musée, Ed. de Fallois, 1996, 348 p.

  • Gourmands, gourmandes, je vous ai compris...

    Ce n'est pas sans appréhensions que j'ai ouvert le premier roman de Muriel Barbéry. Après l'enchantement de L'élégance du hérisson, allais-je retrouver la magie? Le plaisir? Le cadeau que je venais de me faire serait-il vraiment un cadeau??? Que de tensions, que de suspense mesdames et messieurs!

    Et bien je vous rassure tout de suite, la déception n'a pas été au rendez-vous et je me suis fort bien passée d'elle.

    Une gourmandise donc. Le récit de l'agonie du plus grand critique gastronomique du monde. J'ai nommé Pierre Arthens. Le même que celui de L'élégance du hérisson. Et Pierre Arthens sur son lit de mort, part à la recherche d'une saveur oubliée, celle qui, s'il la retrouve, pourrait bien signifier sa rédemption.

     

    Je ne vais pas vous tromper sur la marchandise. C'est quand même moins bon que L'élégance du hérisson. Par exemple, l'alternance des points de vue ne m'a pas accrochée. Je l'ai trouvée un peu trop artificielle. Mais c'est bon quand même. Parce que finalement, ces petits chapitres qui voient intervenir l'entourage du maître et même Renée dressent le portrait d'un homme égoïste, destructeur, dur et absent qui a phagocyté sa famille et ses amis. Et ce portrait vient en faux avec le récit et les souvenirs de l'homme lui-même, loin d'être attachant, mais loin d'être le monstre décrit ailleurs. Comme quoi, ce que voient les autres et ce que nous sommes sous le vernis est toujours différent.

    C'est en tout cas avec sa voix à lui qu'on atteint de sommets. Sans concession avec lui-même et avec le monde qui l'entoure, il va égrener au fil de sa quête ses souvenirs gastronomiques. J'en ai encore les yeux qui brillent et les papilles qui frétillent.? Voilà un roman qui donne faim! Sa passion dévorante pour le goût, les sens, le plaisir de la nourriture donne des pages d'une sensualité extraordinaire. D'autant que chacun de ces souvenirs "gustatifs" s'accordent avec un contexte que le lecteur a pu connaître. Quand il raconte le retour de la plage, dans la chaleur de l'habitacle de la voiture avecle sable qui colle aux pieds et la torpeur qui gagne, j'ai retrouvé les sensations de mes étés d'enfants. Et la description du pain qu'il mangeait après ces matinées de baignades, a ramené sur ma langue le goût et la texture de la baguette du boulanger près de chez mes parents. Je suis encore ébouriffée par cette puissance d'évocation que Murile Barbéry atteint parfois. C'est sans parler de la tomate (qu'on retrouve d'ailleurs dans L'élégance du hérisson!) et de l'odeur du café du dimanche matin!!

    Sous le plaisir des mots et des mets pointent aussi des réflexions plus profondes sur la famille, la vie, la mort et ce que nous en faisons. Une petite musique qui pousse doucement à réflechir.

    Ce n'est pas incontournable sans doute, mais c'est un beau roman agréable et goûteux. A savourer.

    "Un tilleul qui embaume dans la fin du jour c'est un ravissement qui s'imprime en nous de manière indélébile et, au creux de notre joie d'exister, trace un sillon de bonheur que la douceur d'un soir de juillet à elle seule ne saurait expliquer."

     

    Muriel Barbéry, Une gourmandise, Gallimard, 2000, mai 2007 pour la version poche, 165 p.