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Chiff' - Page 104

  • Miam!!

     


    Le nom de Maguelonne Toussaint-Samat sonnait familièrement à mes oreilles. Et pour cause, j’avais eu l’opportunité de feuilleter son délicieux La Très Belle et Très Exquise Histoire des gâteaux et des friandises. C’est donc encore plus alléchée que j’ai ouvert Le miam..issime.

    Et à la lecture des avant-propos et introductions, difficile de ne pas être tenté de tourner et retourner les pages. Jugez plutôt : «  Mais on ne devient cuisinier que si on est né gourmand. On ne fait bien que ce qu’on aime. On ne fait bien que ce qui nous plaît et nous amuse. La cuisine ne sera jamais une corvée si vous en mettez, en plus du grain de sel, ce qui est aussi indispensable : beaucoup d’enthousiasme et d’amour. Nous vous le redirons encore : la cuisine est un acte d’amour. » En l’occurrence, elle prêche une convaincue !

     

    Commençons par l’objet lui-même : 22x16 cm, tient ouvert tout seul même sur les dernières pages (en forçant un peu) ce qui est fort agréable et plus que pratique ! Pour le reste, et bien, en 14 chapitres thématiques, Maguelonne Toussaint-Samat donne 800 recettes qui sentent le vécu !  Chose appréciable, ces thèmes ont été choisis par grands domaines d’ingrédients ou de plats. Je m’explique : on commence avec les beurres, condiments, vinaigrettes et sauces ; on continue avec les soupes, les hors-d’œuvres, les œufs,  les légumes verts, puis les féculents, avant de passer aux poissons et fruits de mer, les viandes rouges, les viandes blanches, les plats complets, les fromages et crèmes ; les gâteaux, desserts et entremets ; les pains, viennoiseries et pâtes ; les petits gâteaux, bonbons et sucreries.

    Avec ça, celui qui prétend ne pas y retrouver ses petits est de mauvaise foi ! Si, je l’affirme ! En plus, chaque chapitre est introduit avec une touche d’humour et quelques mots en guise de mise en bouche.

     

    Le plus notable dans tout cela est que chaque recette a été cuisinée par l’auteur qui y va de son petit commentaire, de sa petite histoire, de ses trucs et astuces, de ses variantes. Du coup, on apprend une foule de petites choses, et on s’attache à lire chaque ligne, du moins quand l’auteur n’estime pas qu’il suffit d’un « Mélangez bien ces ingrédients » qui suffit à toute l’affaire ! Pas de bla-bla ni de mots compliqués dans tout ça ! Et surtout, aucun scrupule à utiliser les ustensiles que le progrès a mis à disposition des cuisiniers ni à remplacer une sauteuse par une poêle, ou n’importe quelle autre casserole assez grande pour faire l’affaire !

    Bref, les recettes de Maguelonne Toussaint-Samat sentent le vécu, le bonheur d’offrir, de partager avec les amis, la famille la préparation et la dégustation de repas traditionnels ou exotiques. Cet aspect en fait un livre beaucoup plus agréable à utiliser que les habituels Larousse par exemple.

    Chacun peut  trouver son compte dans ce recueil. Le débutant complet, le plus-tout-à-fait débutant, le cuisiner chevronné, l’amateur de bonne chère. En tout cas, je ne peux qu’adhérer totalement à sa philosophie de la cuisine et à la passion manifeste qu’elle met à transmettre à son lecteur ce qui a été et reste au centre de sa vie.

     

    Mon seul bémol : la maquette est tout à fait hideuse à mon sens ! Pas une image, du gris et du orange à en avoir le tournis ! Le choix de ces couleurs, sans doute justifié me semble donner un aspect à la fois trop austère et violent. Les lignes surlignées, l’utilisation des polices sont peu agréables. Et le manque d’« aération » du texte étouffe un peu ! Dommage vu la qualité du texte. Reste quand même qu’il serait dommage de se priver de cette somme gourmande, simple et érudite pour cette seule raison !

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    Maguelonne Toussaint-Samat, Le miam…issime, Toute la cuisine que j’aime en 800 recettes, Ed. Sud-Ouest, 2008, 768 p.

  • "Alors ma chérie, je te laisserai t'arranger avec ton père. Tu t'arranges toujours avec n'importe qui."

     

    Heureux qui comme Middlemarch a fait un beau voyage pourrait-on dire! C’est que préparant mon sac à dos 55l pour mon périple de 15 jours en Grèce, je me suis trouvée devant un affreux dilemme : ne pouvoir avancer qu’au rythme d’un escargot lymphatique ou me trouver à cours de lecture. Blafarde, tremblotante à la seule idée de cette affreuse situation… oui, me trouver à cours de lecture. A côté de ça, avancer comme un escargot m’est apparu anecdotique ! Bref, blafarde et tremblotante, j’ai résolu le problème en me donnant bonne conscience et en emmenant en tout et pour tout deux romans ! Et oui mesdames et messieurs ! Deus romans ! Le fait que l’un fasse 1152 pages avec les notes prouve simplement qu’il suffit de biaiser pour avoir l’impression d’être raisonnable ! Mes vertèbres ont protesté, mais après tout, personne n’a jamais dit qu’il fallait qu’elles aient voix au chapitre ! Sauf maman Chiffon, mais elle-même ne part pas sans être abondamment pourvue de nourritures romanesques ! Elle ne protestera donc pas devant son folio tout corné et taché par le voyage ! A ma décharge je n’avais que lui pour lire, faire herbier, me caler la tête pendant la sieste sur la plage, et taper les moustiques. J’avais besoin du Routard pour retrouver ma route ce qui était bien suffisant pour son malheur.

     

    Middlemarch donc. 1152 p., notes comprises de bonheur. Ou comment Dorothea trouve la passion, Rosamond un peu de cervelle, Celia de quoi l’occuper, M. Brooke une carrière, Fred un destin et tout le monde un peu d’amour dans ce monde de brute.

    Ou encore, une chronique complète de la vie d’une petite commune rurale anglaise dans les années 1830. Qu’il s’agisse de vie politique, de vie sociale, de vie amoureuse, intellectuelle, religieuse, professionnelle, George Eliot  crée un tourbillon d’événements, de rebondissements qui font suivre avec impatience et passion les drames petits et grands des nombreux personnages dont elle a fait ses héros. C’est à la fois drôle et profond. George Eliot ne se contente pas de raconter : chaque situation est l’occasion pour elle de faire part à son lecteur de sa conception de l’homme et de la société. Athée, femme libre et indépendante, scandaleuse, George Eliot  porte un regard à la fois sans fard sur toutes les classes sociales et profondément humaniste. Elle n’hésite pas à aborder des sujets parfois surprenants ou ardus : réforme agraire, règles électorales, tours et détours des successions, progrès médicaux et éthique, etc. Tout cela lui permet de monter à quel point l’évolution de l’humanité est soumise aux médiocrités, aux failles et aux faillites individuelles.

    Pourtant il n’y a pas de leçon de morale dans ses lignes. Certes George Eliot n’a pas l’ironie mordante dont peut faire preuve une Jane Austen, mais elle a le sens de l’humour, et souvent, au détour d’une page tombe une réplique ou une description drolatique. J’ai particulièrement aimé celle-ci : « - Ah, quel bon et cher père vous faites ! s’écria Mary, en entourant de ses mains le cou de son père, qui inclina placidement la tête pour se prêter à ses caresses. Je me demande s’il y a une autre fille au monde qui considère son père comme le meilleur homme au monde !

    -         Ne dis pas de bêtise, ma petite ; tu vas trouver ton mari meilleur que moi.

    -         - Impossible ! dit Mary, qui se laissa aller à reprendre son ton habituel. Les maris constituent une classe d’hommes inférieure, qu’il faut faire marcher droit. »

     

     

    Et de l’humour, il en faut dans cette description fouillée de ce que peuvent être les destins des femmes anglaises en 130. Vieilles filles, femmes usées par les soucis domestiques, jeunes écervelées prisonnières de mariages qu’elles ont voulu et dont la réalité est bien loin de ce qu’elles avaient imaginé, femmes aux amours interdits, femmes prisonnières des conventions sociales. Heureuses ou pas, toutes sont soumises par la force de la société au pouvoir des hommes et l’indépendance que parfois elles acquièrent de haute lutte ne va pas sans souffrances et doutes.

    En jouant sur les temporalités, en n’hésitant pas à user d’ellipses, de sous-entendus, George Eliot ajoute au fond de son roman un dynamisme qui en rend la lecture agréable. On laisse un personnage, un couple pour passer à un autre et le retrouver plus tard dans une situation totalement différente. Tout s’imbrique avec un talent impressionnant quand on pense que la publication de Middlemarch a eu lieu en feuilleton et que jamais l’écrivain n’a pu revenir sur ce qu’elle avait écrit auparavant.

     

    Un grand classique de la littérature anglaise et un beau voyage littéraire qui a accompagné avec brio les paysages grecs ! Et comme préface et postface sont aussi passionnant que le roman lui-même, c'est vraiment une réussite complète!

     

    Le très beau billet de Cécile. Celui de Cuné.

     

     George Eliot, Middlemarch, Folio, 2005, 1152p.

     

     

  • Malavita!!! Aux pieds!!!!!

     

    Où l’on retrouve la famille Blake cachée dans un petit village de Provence sous un nouveau nom. Enfin, Fred caché dans un petit village de Provence sous le nom de Wayne. Car Maggie a ouvert un restaurant d’aubergines à la parmesane, Wayne apprend le métier de menuisier en contant fleurette à sa fiancée, Bella a trouvé le grand amour. Seul, le père de famille fait face à un drame : l’écrivain qu’il est devenu est en panne… Comme d’habitude, quand la petite famille est dans le secteur, la vie perd en tranquillité !

     

    Benacquista n’a pas perdu ce qui faisait le charme de Malavita : son humour foutraque et déjanté. Mais malheureusement, le rythme et les rebondissements toujours plus improbables se succèdent faiblardement. Il y a bien sûr le plaisir des retrouvailles, de voir les enfants Bl… Pardon Wayne prendre leur envol, de voir Maggie jouer aux femmes indépendantes, Fred découvrir la lecture et ses plaisirs. Et tout ce petit monde rattrapé par un atavisme plus fort que la peur d’être démasqué.

     

    Bref, pas de coup de folie mais un bon moment !

    Tonino Benacquista, Malavita : encore, Gallimard, 2008-05-27

  • La douceur des hommes

    Un retour en douceur avec une note de lecture que j'avais gardé sous le coude.

     



    « Toute ma vie, j’ai aimé, bu, mangé, fumé, ri, dormi, lu. De l’avoir si bien fait, on m’a blâmée de l’avoir trop fait. Je me suis bagarrée avec les hommes pendant plus de soixante ans. Je les ai aimés, épousés, maudits, délaissés. Je les ai adorés et détestés, mais jamais je n’ai pu m’en passer… La chaleur des hommes qui m’a si bien enveloppée, ne fait que me rendre plus odieux ce grand froid qui avance. »

     

    Rien de mieux que cet extrait maintes fois repris pour résumer ce court premier roman de Simonetta Greggio. On suit pendant 153 p. une jeune femme qui part sur les traces de l’histoire de Fosca, la vieille dame indigne qui l’a adoptée, un soir à Venise. Fosca qui l’a initiée à la vie et à ses plaisirs, qui a répondu à son besoin de tendresse et d’amitié, si nécessaires à l’être humain. Fosca à la vie si bien remplie par l’amour. Car La douceur des hommes est avant tout un roman qui parle d’amour, de désir, de rencontre des corps, de découverte de soi : Fosca a appris à se connaître, à se donner à ceux qu’elle a aimé. La douceur des hommes est aussi une douceur et une douleur de vivre. On découvrant Fosca, en la suivant, il vient comme une envie de vivre comme elle a vécu. Entièrement.

    Mais malgré le plaisir que j’ai eu à la lecture de ce roman, une chose m’a gêné : sa banalité. Je m’explique : Fosca parle beaucoup au fil de ces pages. Elle parle beaucoup et énonce sous une forme parfois choquante, parfois poétique, parfois touchante des choses que nous savons sur l’amour, la souffrance, l’amitié, le bonheur. Ces propos donnent des moments de lecture intenses, mais font de Fosca un personnage assez monolithique : celui de la vieille dame porteuse de la Sagesse et de la Vérité. Cela encore passerais sans peine grâce à la plume de Simonetta Greggio. Mais le mystère soigneusement entretenu jusqu’à la fin autour de ce Samuel dont Fosca refuse de parler n’abouti finalement qu’à la plus banale des histoires. Je n’en révèle pas plus, sinon que cette chute m’a déçue, même si ce sont les histoires les plus communes qui provoquent les plus grandes souffrances. Quand aux malheurs de la narratrice, je ne suis pas parvenue du tout à compatir : aucune empathie ni identification ! Les aventures de Constance ont donné pour moi des moments de creux.

     

    Bref, une jolie lecture, portée par le style agréable de l’auteur, mais une lecture sans passion.

     

    Quelques extraits pour la route :

     

    «  Aimez-les, vos amis, vos amours, aimez-les de toutes vos forces, mettez-y tout ce qu’il y a de plus beau en vous. »

     

    Et les avis de Stéphanie, Anne, Amanda, Karine, Emeraude, Caro[line], Clarabel, Cathulu, Florinette, Fashion, Bladelor...

    Simonetta Greggio, La douceur des hommes, Livre de Poche, 2007, 153 p.