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Littératures françaises - Page 24

  • Contre vents et marées

     

    Un homme, une femme, un veuf, une divorcée, des enfants...Linda, mère divorcée d4Emilie et Dorothée a rencontré une autre souffrance, celle d'un homme qui a perdu sa femme et qui reste seul avec son fils adolescent, Vincent. Le temps de vacances communes entre vignes et océan, pendant qu'au large, un pétrolier se vide de ses entrailles, le noeud de leur histoire va se nouer.

    C'est le premier roman de Brigitte Giraud que je lis, et je m'avoue assez séduite. Elle livre dans ce court roman le regard d'une femme blessée sur une vie amoureuse bancale, difficile. De nombreux thèmes sont abordés par la bande, sans en avoir l'air. Par petites touches, au travers des réflexions de Linda sur la vie quotidienne, sur les rapports qui se créent entre ses enfants et celui de son compagnon, sur ses peurs et ses attentes, Brigitte Giraud construit un tableau de ce que peut être un divorce pour celui qui aime encore et de ce que peut être le deuil. Et surtout, de ce qui vient après: la reconstruction, le désir d'aimer et d'être aimé, le manque de confiance en soi et en l'autre, le doute. "Je t'avais rencontré, j'étais encore vivante, capable d'éprouver du désir pour un homme dont les yeux m'attiraient et la voix me réchauffait. [...] Mais je savais que plus rien ne serait comme avant." 

     Linda ne parvient pas à trouver sa place dans cette nouvelle relation, pas plus qu'elle ne parvient réellement à en faire une à ce nouvel homme et à son fils. Et elle ne parvient pas non plus à faire le point sur ses motivations, sur son besoin d'être aimé, et sur l'avenir de cette histoire. Construire une nouvelle famille avec des passés douloureux, des manques, des non-dits s'avère une tâche ardue sur laquelle elle s'interroge. Y-a-t-il seulement un espoir? "Tout à coup, nous n'existions plus, et nos histoires deveniaent incompatibles, il y avait la votre d'un côté, vôtre passé et vos secrets auxquels nous ne pouvions accéder, et la nôtre, triste histoire unj peu banale, et nous redevenions deux clans, les hommes d'un côté et les filles de l'autre."

    C'est bien sûr très introspectif, mais c'est aussi tout à la fois très beau, doux et mélancolique, et cruel. J'ai relevé bien des passages, des mots qui 'ont touchés et j'ai un peu de mal à faire passer mon ressenti à l'égard de ce roman, mais une chose est certaine, j'ai aimé!

    Les avis de Laure et Clarabel.

    Brigitte Giraud, Marée noire, Stock, 2004, 135 p.

  • Ouaf ouaf

     

     

    jme-chien.jpgDeux immeubles se font face. Deux camps s'affrontent. Au 5 et au 6 rue de la Doulce-Belette, de bien étranges événements sont en préparation. Il faut dire qu'entre l'écrivain de feuilletons radiophoniques, le peintre sur oeufs, l'éleveur de gerbilles, la mère célibataire surmenée, la concierge hystérique et la maman d'Hector le chihuahua, il y a du potentiel pour la catastrophe! C'est d'ailleurs ce que s'est dit le mystérieux démiurge qui provoque et manipule les événements. Meurtres atroces,suicides suspects, cambriolages et chantage, vengeances basses et moins basses, tous les ingrédients d'une comédie sont réunis.

    Oui, une comédie! Parce qu'on pouffe, voire rit franchement du début à la fin. Au confluent de la comédie de boulevard et du roman policier, J. M. Erre nous offre un roman complétement délirant, pétri de clichés et de situations absurdes avec une galerie d'huluberlus tous plus bizarres les uns que les autres. Des voisins comme on espère ne jamais en avoir! Et qu'on souhaiterais éventuellement à son pire ennemi. Encore que... Les délits s'enchaînent, la bassesse fait des ravages, et on cherche le coupable entre un mémorable combat de catch entre concierge, la préparation d'un génocide de gerbilles et un bombardement d'oeufs. Mais qui est le coupable? Mme Brichon dans la cuisine avec la gamelle d'Hector? M. Montagnac dans la chambre avec son...?

    Les rebondissements en série, les exagérations pourraient être agaçantes si l'auteur se prenait au sérieux. Ce qui n'est absolument pas le cas. Chaudement recommandé pour les temps de déprime.

     

    Flo en parle, Clarabel et Cathulu aussi. Et elles sont très, très convaincantes!

     

    J. M. Erre, Prenez soin du chien, Buchet et Chastel, 2006, 293 p.

  • Balade pour un père oublié

    Une fois n'est pas coutume je vais parler d'une déception. Moi qui suis plutôt bon public (sauf pour Marc Lévy mais ceci est une autre histoire), et qui ai aimé Le magasin des suicides, je suis contrainte d'admettre que je n'ai pas aimé ce opus de Jean Teulé.

    Un jeune homme part à la rencontre de dix femmes qu'il a connu dans divers sens du terme, dix femmes qui ne le reconnaissent pas. Tel un petit prince couvert de nuit et d'étoiles, il est à la recherche de son identité.

    La construction est intéressante, le propos prometteur. Que devient un homme lorsqu'on ne se souvient pas de lui, losrqu'il est tellement banal et transparent que même celle qui lui a donné la vie ne se souvient ni de son visage, ni de son nom. Mais l'étrangeté des personnages ne fait pas mouche. Le fantastique qui s'instille laisse de marbre. Je me suis ennuyée. Certains passages m'ont laissée perplexe tant par ce qu'ils disent des relations humaines et amoureuses que par leur aboutissement. Voler un bébé, entrer par effraction dans un domicile, agresser... C'est un conte cruel, certes, mais qui contrairement à ce qui était annoncé en quatrième de couverture, ne m'a pas fait rire du tout. La légereté et l'ironie qui faisant la saveur du Magasin des suicides n'a pas fonctionné pour moi dans ce cas.

    Yue Yin n'est pas de mon avis, Livrovore non plus.

    Jean Teulé, Balade pour un père oublié, Julliard, 1995, 168 p.

  • Gourmands, gourmandes, je vous ai compris...

    Ce n'est pas sans appréhensions que j'ai ouvert le premier roman de Muriel Barbéry. Après l'enchantement de L'élégance du hérisson, allais-je retrouver la magie? Le plaisir? Le cadeau que je venais de me faire serait-il vraiment un cadeau??? Que de tensions, que de suspense mesdames et messieurs!

    Et bien je vous rassure tout de suite, la déception n'a pas été au rendez-vous et je me suis fort bien passée d'elle.

    Une gourmandise donc. Le récit de l'agonie du plus grand critique gastronomique du monde. J'ai nommé Pierre Arthens. Le même que celui de L'élégance du hérisson. Et Pierre Arthens sur son lit de mort, part à la recherche d'une saveur oubliée, celle qui, s'il la retrouve, pourrait bien signifier sa rédemption.

     

    Je ne vais pas vous tromper sur la marchandise. C'est quand même moins bon que L'élégance du hérisson. Par exemple, l'alternance des points de vue ne m'a pas accrochée. Je l'ai trouvée un peu trop artificielle. Mais c'est bon quand même. Parce que finalement, ces petits chapitres qui voient intervenir l'entourage du maître et même Renée dressent le portrait d'un homme égoïste, destructeur, dur et absent qui a phagocyté sa famille et ses amis. Et ce portrait vient en faux avec le récit et les souvenirs de l'homme lui-même, loin d'être attachant, mais loin d'être le monstre décrit ailleurs. Comme quoi, ce que voient les autres et ce que nous sommes sous le vernis est toujours différent.

    C'est en tout cas avec sa voix à lui qu'on atteint de sommets. Sans concession avec lui-même et avec le monde qui l'entoure, il va égrener au fil de sa quête ses souvenirs gastronomiques. J'en ai encore les yeux qui brillent et les papilles qui frétillent.? Voilà un roman qui donne faim! Sa passion dévorante pour le goût, les sens, le plaisir de la nourriture donne des pages d'une sensualité extraordinaire. D'autant que chacun de ces souvenirs "gustatifs" s'accordent avec un contexte que le lecteur a pu connaître. Quand il raconte le retour de la plage, dans la chaleur de l'habitacle de la voiture avecle sable qui colle aux pieds et la torpeur qui gagne, j'ai retrouvé les sensations de mes étés d'enfants. Et la description du pain qu'il mangeait après ces matinées de baignades, a ramené sur ma langue le goût et la texture de la baguette du boulanger près de chez mes parents. Je suis encore ébouriffée par cette puissance d'évocation que Murile Barbéry atteint parfois. C'est sans parler de la tomate (qu'on retrouve d'ailleurs dans L'élégance du hérisson!) et de l'odeur du café du dimanche matin!!

    Sous le plaisir des mots et des mets pointent aussi des réflexions plus profondes sur la famille, la vie, la mort et ce que nous en faisons. Une petite musique qui pousse doucement à réflechir.

    Ce n'est pas incontournable sans doute, mais c'est un beau roman agréable et goûteux. A savourer.

    "Un tilleul qui embaume dans la fin du jour c'est un ravissement qui s'imprime en nous de manière indélébile et, au creux de notre joie d'exister, trace un sillon de bonheur que la douceur d'un soir de juillet à elle seule ne saurait expliquer."

     

    Muriel Barbéry, Une gourmandise, Gallimard, 2000, mai 2007 pour la version poche, 165 p.

  • Nuage mon beau nuage

    C'est un texte poétique que nous donne Stéphane Audeguy avec son premier roman. Il raconte avec douceur, avec passion par l'intermédiaire d'un vieu couturier passionné, Akira Kumo, la vie de ceux qui ont consacré leur vie à étudier les nuages. Luke Howard le quaker contemplatif, Carmichael, le peintre tourmenté, Richardson le savant maudit et Abercrombie l'homme perdu.

    Un peu d'histoire avec la naissance de la météorilogie, un peu de science, une intrigue presque policière avec la recherche du protocole manquant à la collection d'Akira Kumo, une histoire d'amitié entre un vieil homme et une jeune femme, sa bibliothécaire, de l'aventure et de l'amour, on trouve de tout dans ces pages! Les personnages sont attachants. Akira Kumo et son traumatisme, Virginie la bibliothécaire et sa découverte d'elle-même. En tout cas, moi je les ai aimés.

    C'est tout simplement très beau la plupart du temps. On part à la découverte des nuages mais pas par un biais scientifique, par des chiffres et des graphiques, par un découpage de plus en plus fin de la matière. On les découvre à travers la vie d'hommes de chair et de sang. Ainsi, Stéphane Audeguy montre qu'étudier les nuages, c'est finalement prendre le risque de se découvrir soi-même, de devoir accepter et assumer ce que l'on est. C'est le cas de tous les précurseurs, comme c'est le cas d'Akira Kumo, qui au fil du temps, retrouve la mémoire de ce que fut son enfance.

    Quelque part, ce roman fustige un monde où on a perdu la magie, la poésie, un monde où on ne regarde plus les nuages que pour prédire le temps alors qu'ils sont la vie même dans sa vitalité constamment en mouvement.

    "Rien au monde de plus fascinant que les nuages, sinon l'océan; mais là est le danger. Car rien aussi n'est plus vain, plus trompeur, plus stupéfiant que cette matière, toujours renouvellée et que l'on peut si aisément s'épuiser à vouloir décrire, comprendre, dominer."

    Stéphane Audeguy, La théorie des nuages, Gallimard, 2005, 289 p.