Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Chiff' - Page 35

  • Bifteck - Martin Provost

    Bifteck-martin-provost-205x300.jpgAndré est boucher, fils de boucher et devrait donner naissance à un boucher qui donnera naissance à un boucher. Parce que c'est comme cela que vont les choses dans la famille Plomeur. Mais c'est sans compter avec la guerre et le talent d'André pour faire chanter les corps des femmes. La file s'allonge devant la boucherie jusqu'à l'armistice. C'est alors un autre défilé, celui des bébés dont les mères se débarassent pour ne pas subir l'ire des époux rentrés du fronts. Et quand un des cocus se mêlent de vengeance, il est temps pour André de prendre ses 7 rejetons sous le bras et de prendre la poudre d'escampette.

    Je sors de la lecture de Bifteck avec un goût de trop peu ma foi un peu étonnant pour un texte qui aligne avec bonheur un vocabulaire boucher et culinaire qui donne l'eau à labouche (ou la nausée, c'est selon). C'est un récit truculent, drôle, enlevé qu'on prend plaisir à lire. Les aventures d'André découvrant l'amour, la paternité, cousant de ses mains des culottes courtes pour ses petits et décontenancé par le végétarisme affirmé de la petite dernière est irrésistible.

    Mais le texte effectue soudainement un virage vers le fantastique. On débarque avec la famille Plomeur dans un Nouveau Monde qui fleure son pays des merveilles. Je me suis alors perdue dans les méandres d'un second récit où les enfants grandissent à vue d'oeil, où les étapes de la vie sont effleurées et où la terre devient vivante. et qui e m'a pas franchement convaincue.

    Reste une belle vision de la paternité et un récit sympathique et attachant.

    Tamara a aimé, Amanda est moins convaincue. D'autres avis ici, et .

    Lu dans le cadre de l'opération Masse Critique de Babelio

    Provost, Martin, Bifteck, Phébus, 2010, 125p., 3/5

     

     

     

     

  • Corpus Delicti - Juli Zeh

    Corpus-delicti-de-Juli-Zeh-158x300.jpgAn 2057. La Méthode s'est imposée et la prophylaxie a fait son oeuvre. Tout est impeccablement propre et chaque citoyen remplit son devoir en se conformant aux contrôles médicaux et sanitaires quotidiens garantissant leur bonne santé. Mais soudain, Mia, jeune et brillante biologiste cesse d'accomplir ses obligations sportives quotidiennes et de transmettre le résultat de ses analyses. Un manquement suffisant pour qu'elle soit convoqué au tribunal. Car son cas gêne tout le monde: depuis le suicide de son frère accusé de viol et condamné alors qu'il clamait son innocence,la jeune femme est instable et doute. Or, la Méthode ne peut se permettre qu'on la remette en cause...

    Corpus Delicti est un drôle de roman. De la science-fiction de bonne tenue sous la oripeaux de la littérature générale (je ne vais pas disserter sur mon agaçement face à ces textes sur lesquels tout le monde se pame et qui seraient passés inaperçus des critiques s'ils avaient été publiés dans une collections estampillée littérature de genre, mais ça m'éneeeeeeeerve, seigneur que ça m'énerve!) et par dessus le marché un texte aux accents théatraux indéniables. Je vous l'avoue tout de suite, je l'ai trouvé passablement enquiquinant. La faute à ce ton, à ces dialogues marqués, à ces situations qu'on ne peut s'empêcher d'imaginer sur scène. La faute aussi à des dialogues parfois un peu longuets et par moment démonstratifs.

    Ceci étant dit, je n'ai pas pu le lâcher. Parce que Corpus Delicti est un texte profondément intelligent qui, sans révolutionner la réflexion sur les dérives de l'hygiénisme et le totalitarisme pose de bonnes questions et aborde des thèmes d'une actualité brûlante. Dans l'affrontement entre Mia et la Méthode, puis entre Mia et le journaliste Kramer, ce sont deux conceptions de la vie qui se font face, irréductibles l'une à l'autre. A partir de l'opposition entre individu et collectivité, intérêt individuel et bien commun, Juli Zeh explore des voix variées. Celle du totalitarisme et de ses rouages évidemment, et avec brio. Mais surtout, Juli Zeh explore les chemins qui font basculer de la normalité à la marginalité, et les ressorts du concept même de normalité tout en redonnant un coup de jeune aux débats opposant tenants du corps et tenants de l'esprit. C'est un texte foisonnant d'idées et de concepts, dense, par moment difficile mais finalement fascinant. On balance sans cesse entre des hallucinations criantes de vérités et une réalité cauchemardesque servies par un style très travaillé. Trop pour moi qui de surcroît ai été gênée aux entournures par ce mélange étrange entre prose et théâtre, mais force est de reconnaître que c'est un texte marquant!

     

    Cuné en parle et m'a donné envie, Fashion a enfoncé le clou.

    Zeh, Juli, Corpus Delicti, Actes Sud, 2010, 237p., 3.5/5

     

     

  • La citation du jeudi: Cueillettes

    " Je me dis qu'il y a peut-être , derrière les murs où je n'ai pas le droit d'aller, un potager, voire un verger. Il ne semble pas que l'espace qui m'est interdit soit immense, mais sait-on jamais?

    Tout ce que j'en sais, ce sont ces fruits que j'ai coûtés, transformés par des mains aimantes en nourritures fines, fluides, exquises. Ce que j'en sais, et même ce que je n'en sais pas, rendent ces aliments encore meilleurs, et plus précieux même que l'extraordinaire don de la nature qu'ils sont d'abord., Des mains semblables aux miennes ont tranvaillé ces framboises et ces pommes pour en réjouir le palais et le corps humain. J'aime que ce mot, palais, dise à la fois la splendeur d'une demeure royal et le plafond en voûte de ma bouche, qui devient ainsi un temple ou un château."

     

    9782841113651.gifPrésentation de l'éditeur: "Promenade d'une frémissante sensualité dans les forêts, les prés et les jardins : Alina Reyes, bouleversante de sincérité, propose les bonheurs de la cueillette des prunes, cerises, myrtilles, cèpes, roses, lavande, serpolet, coquillages... et les secrets de leurs transformations en cuisine. Fascinée par les miracles de la nature, nous entraînant des vergers de son enfance jusqu'à son refuge actuel dans les contreforts des Pyrénées, elle se livre démasquée et nous donne à partager, dans une langue d'une grande force poétique, son amour immodéré de la vie."

     

     

     

     

    Le jeudi c'est citation.gif

     

    Ankya

    Anne

    Caro[line]

    Choupynette

    Claudialucia

    Delphine

    Don Lo

    Doriane

    George

    Herisson08

    Irrégulière

    Isa

    Juliette

    Kali

    Katell

    Lenemae

    Lhisbei

    Lystig

    Marie

    Martine

    Mirontaine

    Naolou

    Noukette

    Sara

    Séverine

    Sofynet

    Stephie

    Sylire

    Thé citron

    Turquoise

    Uncoindeblog

    Valérie

    Yueyin

     

    Si je vous ai oublié, criez!

     

     

     

  • Un océan de pavots - Amitav Ghosh

    ocean-de-pavots_m.jpg1838, une goélette apparaît en vision à Deeti qui vit pourtant à des centaines de kilomètres de la mer. Un propriétaire terrien est ruiné. Un metis devient officier de bord. Une jeune femme fuit un mariage arrangé. Un jeune batelier réalise son rêve d'embarquer sur un navire haute mer. Un homme simple sauve son amour.

    Tous vont se retrouver sur l'Ibis en route vers l'île Maurice.

    Un océan de pavots avait tout pour me plaire: une grande fresque mêlant amour, grande et petite histoire, guerres intimes et luttes politiques. J'étais séduite d'avance. Et pourtant, pourtant... Je ne terminerai pas Un océan de pavot. Non que ce soit un mauvais roman, loin de là. Amitav Ghosh construit une intrigue complexe, foisonnante, installe une galerie de personnages comme on en voit rarement, travaille ses rebondissements comme un orfèvre et la langue jusqu'à rendre les sonorités des langages qui se croisent, se mélangent, s'irriguent les unes aux autres. Mais premier tome d'une trilogie, le roman pêche par ses excès: à force de croiser les personnages, d'alterner les points de vue, d'installer par petites touches ses décors, Amitav Ghosh plombe son récit. Impossible de s'attacher aux personnages, impossible de ne pas bailler à certains passages et de ne pas regretter que d'autres ne soient pas plus longs. On s'embrouille un peu, on peine à retirer les fils de l'intrigue. En ce qui me concerne, le moment où ils se lient est arrivé trop tard, j'avais déjà perdu tout intérêt pour les personnages et leur histoire malgré le romanesque incontestable de leurs destins.

    J'ai pourtant aimé voir se dessiner l'histoire d'une période où le commerce se développe, ou la colonisation prend son essor, où les hommes migrent au gré des revers de fortune, où le racisme est une réalité et presque une normalité. D'autant que l'auteur transcrit à merveille les mentalités et les comportements et des colons et des indigènes qu'ils méprisent tant et que son travail sur le monde de la mer et les langues et dialectes est étonnant. Le commerce du pavot, les grande compagnies commerciales et leur influence sur les colonies, les migrations forcées, la ségregation raciale,  le contexte utilisé est riche, dense, trop sans doute pour qu'il soit possible de faire plus qu'effleurer des sujets qui a eux seuls auraient mérité un roman.

     

    Une rencontre ratée à mon grand regret.

    Les avis de Val, Melo, La Livrophile,...

    05_chronique_de_la_rentree_litteraire.jpg

     

    Ghosh, Amitav, Un océan de pavots, Robert Laffont, 2010, 586p.

     

     

  • Les plus qu'humains - Théodore Sturgeon

    plusquhumains.jpgL'Idiot vit seul dans les bois, Janie est rejetée par sa mère, Beany et Bonnie ne sont guères aimées , Bébé, l'enfant trisomique fait horreur. Quand à Gerry et Hip, orphelins fugueurs, incompris et marginaux, quelque soit leur désir de normalité, ils ne pourront jamais faire partie de la société humaines. Mais ceux qui vivent aux marges se rencontrent toujours un jour ou l'autre. Les liens qu'ils ton tisser entre eux vont donner à leur petit groupe un ordre étrange, plus qu'humain. Seraient-ils un nouveau pas de l'évolution de la race humaine?

    Bien que je n'ai pas encore exploré de fond en comble l'oeuvre de monsieur Sturgeon, il me semble pouvoir affirmer sans grande chance de me tromper qu'il affectionne les freaks, les anormaux, tout ceux qui sont rejetés parce qu'ils ne correspondent pas aux canons d'une normalité définie par le nombre, ceux qui interrogent les normes et qui les mettent en danger. On retrouve un peu dans Les plus qu'humains les personnages et les thèmes de Cristal qui songe. Mais là où le récit se concentrait sur le cas d'un enfant transformé par son contact avec les cristaux, Les plus qu'humains étudie un groupe: des enfants aux capacités a-normales ou sur-normales qui mixollent pour reprendre le joli néologisme utilisé dans le roman, c'est -à-dire qui sont en symbiose, chacun avec ses capacités et font naître par leur communauté un être nouveau, une Gestalt très différente de l'être humain. A chacun sa place, sa tâche: il y a la tête, L'Idiot puis Gerry, le coeur ou Janie, l'esprit qu'est Bébé, la force d'action...

    Les plus qu'humains est un récit à plusieurs voix, à plusieurs niveaux qui s'entrecroisent. Sous une apparence de simplicité, Sturgeon invite à une réflexion profonde sur l'humain, explorant des perspectives multiples. Gerry par exemple, l'enfant en rupture ne connaît aucun frein. Pour lui, seule compte la survie et la satisfaction de ses besoins. Son indifférence aux autres et aux conséquences de ses actes va le mener vers la cruauté et la volonté de dominer à n'importe quel prix. En cela, il est l'enfant d'une société qui régit par la dictature de la normalité et des convenances et qui rejette aux marges ou élimine tout ce qui menace cette normalité. Faute de pouvoir adopter la morale de la société dans laquelle il vit, Gerry devient le monstre qu'il est accusé d'être. A l'opposé, Hip et les autres, la Gestalt qui devient adulte, adopte une éthique qui lui permet d'être et qui trouve son équilibre quand elle rencontre, enfin, des pareils. 

    Deux voies s'esquissent: l'une qui mène vers la folie, la volonté de domination, l'orgueil et la perte, l'autre qui va vers une utilisation raisonnée et bienveillante de la puissance. En fait, on voit de quelle manière se construit une éthique et comment morale et éthique peuvent s'opposer, se nourrir l'une de l'autre, se compléter parfois.

    Sturgeon se livre à une critique amère, dure de l'humain et de sa capacité à faire le mal, de son rejet de toute différence. Il n'y a guère de lumière, toute tolérance étant fragile et limitée. Reste l'espoir d'un dépassement de l'humain, d'une force qui serait capable de le faire évoluer, de le guider. L'espoir d'une éthique de vie qui permette la tolérance.

    Les plus qu'humains est un roman très dense, ardu parfois, confus à certains moments, au style un peu daté, mais c'est un texte magnifique par les thèmes qu'il aborde. Un texte philosophie, politique même qui se paie le luxe de raconter une histoire passionnante.

    Autant dire que je conseille.

    " Tu ne peux obéir à des règmes destinées à une espèce, alors que tu n'appartiens à aucune espèce. Tu n'es pas un homme ordinaire, si bien que la morale d'un homme ordinaire ne te convient pas. Pas plus que ne te conviendrait celle d'une fourmilière.Tant et si bien que personne ne veut de toi et que tu es un monstre. Personne ne voulait de moi quand j'atais un monstre. Mais écoute-moi bien, Gerry, il existe une autre sorte de code de vie qui doit te convenir. C'est un code qui exige de la foi plutôt que de l'obéissance. C'est ce que nous appelons une éthique. L'éthique te donne des règles de survie. Mais il ne s'agit pas de ta survie individuelle. Il s'agit d'une survie plus grande que celle-là. C'est en réalité le respect pour ceux de qui ti viens et pour ta postérité. C'est l'étude du courant d'où tu sors et dans lequel tu vas créer quelque chose d'encore plus grand quand le temps viendra."

     

    Sturgeon, Théodore, Les plus qu'humains, J'ai Lu, 2001, 306p., 5/5