Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

australie

  • Les grands-mères - Doris Lessing

    lessing.jpgDeux amies d'enfance, leurs fils et cette période trouble où la jeunesse brûle de tous ses feux. Cédant à leurs désirs, chacune entame une liaison avec le fils de l'autre.

    J'avais entendu dire le plus grand bien de ce court texte de Lessing et c'est avec l'envie de découvrir ce texte fort et sulfureux de ce prix Nobel de littérature que j'avais ajouté à ma PAL Les grands-mères. Autant le dire immédiatement, c'est une déception, une grosse. Pas forcément sur le fond, que je trouve très intéressant, mais plus sur la forme. D'emblée, le style de l'auteur m'a agaçée. Froid, détaché, répétitif pour ne pas dire redondant par moment. J'irai même jusqu'à dire plat. Peut-être, sans doute, est-ce voulu, à moins que la traduction ne soit mauvaise. Mais du coup, difficile de s'investir dans cette histoire d'amour scandaleuse. Car scandaleuse elle l'est: chacune de ces mère devient la maîtresse du fils de l'autre, entrant dans une relation quasi incestueuse tant leurs relations ont été celles de parents proches. Il est beaucoup question dans le récit de la passion qui brûle, du parcours singulier de ces femmes superbes et intelligentes, du moment où il l'arrivée d'épouses brise les relations qu'elles entretiennent avec leurs enfants. C'est il est vrai une belle variation autour du thème du montré et du caché. Il y a la façade lisse et heureuse qu'elles et leurs familles offrent au monde, avec les fêtes, les sorties à la plage, la réussite scolaire, les malheurs surmontés avec courage. Il y a ce que les mauvaises langues soulignent: les hommes partis ou morts, cette relation amicale entre les deux femmes si intense qu'elle en devient louche... Et puis il y a l'inimaginable, tellement à l'encontre des tabous de la société que personne ne le perçoit, il y a les névroses des enfants et des mères, celles des pères qui toutes ensemble font une toile sombre, dure et amère.

    A côté de toute cela, Doris Lessing explore la féminité et la manière dont elle se confronte à la vieillesse qui arrive, à des désirs qui ne sont pas moins forts et qui se heurtent à la nécessité de la sécurité et des conventions sociales. Il est intéressant de constater que par sa manière de le traiter, elle enlève tout côté sulfureux à son histoire, ne laissant que deux femmes et deux jeunes gens face à des désirs et des amours qu'ils ne peuvent contrôler. A aucun moment on n'a l'impression de quelque chose contre nature, ou "sale". Elle raconte une histoire d'amour, tragique et peu banale, mais une histoire d'amour. Celle des mères, et celle des épouses bafouée.

    Dommage que Doris Lessing se sente obligée d'appuyer son propos. Les larmoiements de la serveuse aux premières ages du récit par exemple, la chute qui tombe un peu comme un cheveu sur la soupe. On a un goût d'inachevé et de baclé à la dernière phrase.

    Sylvie a aimé, Stéphanie aussi. Pour le rest, BoB!

    Lessing, Doris, Les grands-mères, J'ai Lu, 2003, 2/5

  • Finnigan et moi

     

    Quand Anwell rencontre Finnigan, l'enfant perdu et solitaire a enfin le sentiment d'avoir trouvé un ami. Mais très vite, les jeux prennent une tournure étrange: car à Anwell rebaptisé Gabriel a été dévolu le bien et à Finnigan le mal. Leur petite ville australienne va vivre des heures difficiles.

    Voilà un roman dont il va être difficile de parler sans trop en dire. Pour ceux qui voudraient garder le mystère, sachez que c'est un roman complexe, sur le rejet, la différence et la folie qui ne permet au lecture d'assembler les pièces du puzzle qu'à la toute fin. Assez magistral dans sa construction et dans son atmosphère, il vaut le détour.

    Allons-y maintenant pour plus de détails. Je sais, c'est affreux, je ne peux pas m'en empêcher! Finnigan et moi est certes un roman sur le rejet, la différence et la folie, mais c'est aussi et surtout un romans sur l'enfermement. Anwell est un enfant solitaire dont la famille vit en marge de la société de leur petite ville isolée. Double solitude donc: celle d'une ville entourée par les montagnes, celle d'une famille repliée sur elle-même et son "statut". Un père avocat très, voire trop conscient de son importance, une mère étouffante, et un drame, celui de la mort du frère aîné attardé. C'est là que se noue l'intrigue et la rupture pour Anwell: quel que soit la manière dont on a expliqué le décès, lui sait qu'il a voulu, désiré la mort de ce frère tant aimé, qu'il l'a provoquée même dans son désir d'enfant d'avoir enfin la même vie de que les autres. Troisième enfermement, dans la culpabilité cette fois, une culpabilité que jamais son père et sa mère ne vont lui permettre d'oublier.

    C'est une étrage famille que celle d'Anwell, le lieu de toutes les névroses, de toutes les violences et de toutes les indifférences. De fil en aiguille, on voit un petit garçon avide d'amour partir chercher un peu d'affection vers un ailleurs qui s'appelle Finnigan: un enfant sauvage, intrépide, toujours accompagné de son chien Surrender et capable du pire. L'un va se révéler manipulateur, égoïste, assassin, mauvais et libre comme l'air, l'autre incapable de résister à l'ascendant de son ami et constamment déchiré entre son profond besoin d'amour et le sentiment que rien ne va plus.

    Là où Sonya Hartnett se révèle machiévélique, c'est qu'elle construit son roman comme le récit que fait Anwell/Gabriel sur le lit où il est en train de mourir à même pas vingt ans d'une mystérieuse maladie. Un flash-back donc, mais raconté à deux voix, celle d'Anwell cédant parfois la place à celle de Finnigan dans une succession de scènes parfois difficiles à remettre dans l'ordre, d'autant que le présent vient parfois faire irruption dans les souvenirs. Ce désordre, soigneusement construit, perd le lecteur tout en l'orientant tout doucement vers le fondement du récit. C'est une belle mécanique bien maîtrisée et mise en valeur par l'atmosphère étouffante et poisseuse que Sonya Hartnett installe: Finnigan est le grain de sable qui va gripper le mécanisme bien huilé d'une vie familiale et d'une ville. Méfiance, rancoeurs, violence qui explose au grand jour, la tension monte progressivement, le suspense aussi. On cherche à comprendre, on se dit qu'on a trouvé avant de changer d'avis et de tomber des nues quand enfin le pot au rose se dévoile. L'ambiance fantastique n'y est, il faut dire, pas pour rien.

    Une lecture dérangeante, intense, qui parle d'amour, de haine et de culpabilité avec talent.

    L'avis de Lily, Sylire, JoelleHilde, ...

    Merci à Anne de m'avoir permis cette découverte!

    Sonya Hartnett, Finnigan et moi, Le serpent à plume, 209, 3.5/5