Il arrive, fort souvent au demeurant, que le harlequin fasse surface aux endroits les plus incongrus. Dans une vallée paumée des Alpes par exemple, ce qui se révèle être une expérience paranormale extrêmement réjouissante, ou dans les situations les plus banales et quotidiennes Or, quoi de plus banal et quotidien et réjouissant qu'un bon film de la daube en bonne compagnie, n'est-ce pas? Nous ronronnions donc tel soir en coeur avec les moteurs de Fast and Furious et nous voilà quelques jours plus tard confortablement installées, discutant de tout et de rien, de jacuzzis et de periscopes dans une salle de cinéma. Fermement décidées à savourer de la première à la dernière minute ce qui s'annonçait comme le film de la daube de l'été: Expendables.
Vous n'aurez pas été sans noter au passage, que mes Harlequinades s'annonçaient sous le signe de l'action. Car le harlequin, universel comme il l'est, se planque soigneusement même au coeur de l'action. Surtout au coeur de l'action oserais-je avancer. J'en avais eu la preuve l'année dernière, j'ai été confortée dans mon opinion ô combien scientifique. En fait, j'aurais même du intituler ce billet: Expendables, une main de fer dans un gant de harlequin. Ou Expendables, mission harlequin.
Vous voulez une démonstration? Vous l'aurez voulue!
Expendables donc. Une bande de mercenaires sans foi ni loi qui se vendent au plus offrant et ne sont loyaux que les uns envers les autres. Surdoués de l'explosif, du coutelas, mariés à leurs fusils mitrailleurs et abonnés aux blagues viriles mais correctes. Des héros qui ont perdu leur âme et en souffrent sans jamais l'avouer.
Comme des héros de Harlequins. Ça ne vous rappelle rien? Le héros sombre et taciturne, cachant les sombres, voire obscures blessures de leur non moins sombre passé sous un masque inexpressif et des manières bourrues.
Et bien là vous en avez une petite dizaine pour le prix d'un. De Jason Statham largué comme une douille de 45 à Mickey Rourke s'arrachant une douloureuse confession et une larme en passant par Jet Li qui soupire après la famille que son sacerdoce mercenariale lui a volé, et sans oublier Sylverster lui-même, c'est un défilé de gros durs au coeur tendre.
D'ailleurs, la preuve, Sylverster est en fer forgé, comme ses petits copains. Comme Jesse dans "Etoile d'un jour" (Recherche un homme, un vrai, un J'ai Lu plein d'ouvriers qui font de l'ombre aux cônes de signalisation, je nous vous dit que ça): " Ses abdominaux étaient tellement fermes qu'il aurait pu arrêter une voiture". et ils ont les biscotos en jambon tout pareil. Et des petits coeurs tout mous qu'on ne croirait pas comme ça. Pour un peu on aurait envie de consoler Mickey Rourke et de rassurer Jason Statham. Voire de passer la main dans les cheveux de Jet Li quand ils en viennent à exprimer leur manque d'amour.
Mais ce sont des hommes, des vrais, des tatoués. Comme Jesse d'ailleurs et les gros durs de Recherche un homme, un vrai. Des qui défendent la veuve et l'orphelin! Et la jolie fille battue par un méchant pas beau. Ils ont l'oeil sûr. Il n'y a qu'à entendre Jason grogner "He is no good" à sa volage dulciné pour le savoir.son homme.Des motards qui vont vrombir les moteurs et se déplacent en banc comme les piranhas.
Seulement, la vie des gros durs se complique un jour ou l'autre, surtout le jour où leur petit coeur tout mou, soigneusement dissimulé sous une carapace de fer est percutée par une bombe. Pas nucléaire la bombe hein, juste pourvue de deux chromosomes X. Et on atteint là la quintessence de la romance. Ahhhh, Sylverster contemplant avec deux yeux de merlan frit sa dulcinée et perdant tous ses moyens face à elle et/ou son absence. Il n'y a qu'à l'entendre d'aillleurs. Qu'elle soit en danger, il fait tout exploser avant de repartir sans même un bisou. C'est un homme bien non mais.
Mais il faut dire qu'elle le vaut bien: fille d'un méchant dictateur sud-américain qui résiste contre son affreux papounet, elle tout de la passionaria harlequin qui sert de poids mort dès qu'il s'agit de courir ou de balancer une grenade. Ceci dit, elle a des cordes vocales en parfait état de fonctionnement qu'il s'agisse de roucouler (Elle: "you're here", Lui: "Here I am) ou de crier différentes versions de "Papa je te déteste" et "Non ne le tuez paaaaaaas". Quand à la chère et tendre de Jason, elle cache elle aussi un passé qu'on suppose sombre et une propension à s'acoquiner avec des méchants garçons mauvais pour sa santé mis à part Jason qui est un méchant garçon dehors mais pas dedans. Un truc qui a à voir avec une carapace et tout ça.
Bref, Expendables, c'est du Harlequin en barre et au passage, le nanar de la décennie: filmé avec les pieds, débordant de répliques cultes, de bastons mémorables et d'acteurs avec deux expressions et demi. Nous avons d'ailleurs décidé à l'unanimité de nous même d'adopter désormais le salut Expendables et le signe de la Victoire. Sans nous soucier des bleux que cela occasionnera à nos humbles personnes. Parce que c'était tellement beau toute cette amitié virile, ces explosions, cette absence de scénario, ces incendies reflétés dans les yeux des gentils, ces motos (une enquête est en court sur la longueur et la fourche et ce qu'elle révèle de la personnalité de ces messieurs) qu'Expendables continuera ainsi à illuminer nos jours et alimentera nos réflexions philosophiques.
Je vous laisse avec cet adage à méditer: "Dur d'être un légume".
Toutes les répliques culte y sont, enjoy! Il manquait juste un jaccuzzi pour que le bonheur soit complet.
Commentaires
je n'en peux plus de rire! mais c'est une étude sérieusement menée, suis impressionnée :)
Bravo Chif ! Je n'en attendais pas moins de ta part. Et dire que mon billet harlequin devrait être en ligne depuis ce matin. J'ai presque honte (même pas en vrai).
Y'a plus de repos du guerrier. SO sad !!!
Oh c'est beau, tu arrives à décrire l'indescriptible.
Être capable de décapiter un mec avec un laguiole, piloter un avion droit tout en regardant derrière, diriger une équipe de quasi-psychopathes qui officiellement ne prennent aucun plaisir à tuer-et-que-s'ils-ne-visent-que-des-endroits-où-ça-fait-mal-avant-d'achever-c'est-du-pur-hasard, porter une tonne et demi de munitions dans les poches de sa veste commando et en même temps, avoir des pensées aussi profondes et risquer sa vie pour une pauvre fille qui pense que faire la révolution c'est lever son petit point devant papa, c'est une preuve: Sylvester est le dieu vivant des harlequinades!
C'est merveilleux la subtilité de ce film quand on y pense: même derrière la carapace du dictateur, il y a un cœur tout mou qui ne demande qu'à s'éveiller grâce à l'art et à la famille.
Bravo Audrey, je n'en attendais pas moins de ta part. Que c'était beau tous ses hommes virils, la larmichette ou le coeur en bandoulière.
Mais où est passé le repos du guerrier ? SO sad !!!!
Oh mon dieu, c'est le billet de l'année. Je cautionne, je plussoie, je salue, et pire, je tape mon petit poing contre le tien. A quand la bague tête de mort ? :-)))
La seule bande-annonce m'avait mise en transe, mais après ton billet, c'est malin, j'ai vraiment envie d'aller voir le film. Reste à trouver quelqu'un d'assez allumé pour m'accompagner.
Comparaison fort audacieuse !!! Et fort drôle ;o)))))))
@ Stéphanie: l'esprit scientifique est un véritable sacerdoce! :-)
@ Uncoinblog: le repos du guerrier ne peut avoir lieu que devant un cocktail. Hop, au boulot! :-))
@ Isil: tu m'ôtes les mots de la bouche, il y en avait tellement que je n'ai retenu que le nécessaire pour les besoins de la démonstration. Tu as oublié l'homme en feu. Mais personnellement j'ai un petit faible pour Jet Li qui lui au moins a un cerveau (petit scarabée) et pour Jason mais là c'est parce que je suis une midinette!
@ Fashion: il va falloir faire gaffe, Uncoindeblog avait l'air décidée! Mais mon petit poing frappe ton petit poing avec enthousiasme même sans bague! :-D
@ Nataka: j'espère que tu vas trouver, c'était trop bon pour être manqué!
@ Sofynet: je me suis bien marrée en l'écrivant! :-)
Quel courage dans l'expérimentation!! C'est comme les harlequinades, trop courageux pour moi tout ça. Mais dans expendables il y a pendable, tu aurais dû saisir le message
;-))
Hey!!! Le moment le plus effrayant du film : le gros plan sur la tronche liftée de stallone (j'ai eu un petit sursaut). Le moment le plus terrifiant : le gros plan sur la tronche liftée de Rourke (j'ai eu un mouvement de recul dans mon fauteuil). Le moment le plus gore :quand rourke est sensé tatouer Stallone et qu'en parlant, ses grosses lèvres liftées et botoxées laissent échapper de la salive (j'ai eu un haut le coeur).
Trooooop bon, ce post ! On est allés le voir hier, et l'homme a failli me museler tellement je rigolais ! Ahh, les gros plans sur les yeux (ouiiiiii, le reflet de l'incendie, mais pas que), les répliques-qui-se-veulent-drôles-mais-qu'en-fait-elles-sont-justes-ridicules,les héros tous tellement liftés et bodybuildés que ça fait peur, le degré zéro du scénario, le degré zéro de la psychologie des personnages, le degré zéro de la subversion, le degré zéro de la crédibilité... Putain que c'était bon !!
Merci pour ce pur moment de fou rire à la lecture de ton billet !
Excellent billet ! Couplé à la bande-annonce, il me dispense largement de voir le film. Une petite daube de temps en temps, ça ne peut pas faire de mal, mais là ça me paraît assez lourd à digérer, quand même !
Ah! On n'est pas les seules à avoir remarqué l'abus de gros plans sur les yeux (avec ou sans reflets de flammes) :-D
Malgré tout mon dévouement pour la cause harlequinade, je ne suis pas sure de supporter ce monument du cinéma ! Excellente analyse néanmoins :D
J'adore ce billet, j'adore!!!! Le film, euh... Beaucoup moins, certainement. (encore que, tant de ridicule doit certainement mieux faire passer la pilule du sang et de la cervelle qui giclent...) Merci de t'être sacrifiée pour la Cause!
@ Sibylline: yep mais je n'ai peur de rien! :-)
@ Juliette: je dois dire qu'on a frôlé le film d'horreur à ces moments là. Encore qu'il y a pire: la bedaine de Rourke et la gueule dévastée du grand blond!
@ Anne: qu'est-ce que j'ai pu rire! Et applaudir! C'est un mega nanar!
@ Melanie B.: et en même temps, léger comme une plume! Le poids du scénario quoi... :-)
@ Isil: il faut dire que c'était tellement romantique ces reflets... :-D
@ Chimère: thanks! A la télé sur RTL9 dans un an tu verras!
@ Mo: pas de quoi, tu sais qu'on me surnomme Abnégation de temps à autre! :-)
Je veux un Jason...................
@ Hydromiel: il est choupinou hein?
qu'est-ce que je me marre, j'en redemande! mais en même temps je suis un peu surprise, parce que je pensais que le film serait bon. Parce que Stallone, Schwarzie et compagnie, ils ont quand même fait de bons films (dans leur genre) dans les années 80. Je pensais que ce serait de ce niveau là.
@ Casanova: oui, mais manifestement, Sylvester a oublié l'uv de scénario! Enfin bon, au moins c'est une poilade de l'extrême et un grand moment de ciné!:-))