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Mangez-moi!!

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J’ai choisi ce livre pour deux raisons : le club des théières se tenait sur le thème de la cuisine, et ô mystère des mânes, voilà que Mangez-moi était sur la table des coups de cœur de la bibliothèque. Et me voilà partie alors que j’avais fait de la résistance à l’époque de sa sortie. Je lorgnais dessus depuis sa sortie en poche, mais… Pal et Lal aidant… Enfin bref ! Je ne suis pas la première à le lire ! Ca ne m’empêche âs de vous donner mon avis !
 
Myriam est instable, Myriam est irresponsable, Myriam souffre et essaie d’assumer la faute pour laquelle elle a perdu famille et enfant. Myriam cuisine aussi. Elle cuisine dans ce petit restaurant que, risquant le tout pour le tout, elle a ouvert et où elle vit aussi.
C’est dans ce cocon où se bousculent fleuristes et cultivateurs, enfants du quartier et pierrots qu’elle va enfin trouver un chemin vers l’apaisement.
 
Myriam est une femme perdue qui cherche un endroit où enfin se sentir chez elle. C’est ce que représente pour elle ce restaurant qu’elle ouvre en désespoir de cause avoir erré pendant des années et été cuisinière pour une troupe de cirque. Symboliquement, son petit monde prend le nom de Chez moi. C’est d’abord un petit restaurant sans menus, sans enseigne, effacé comme sa propriétaire. C’est enfin un endroit reconnu, apprécié, aimé, une cantine de quartier, un refuge pour les amoureux, les ouvriers, et les gourmands. Un restaurant reconnu comme sa propriétaire qui a repris goût à la vie. Ce n’était pas forcément ce qu’elle attendait, mais c’est ce qui lui permet à la fin d’avancer et de se retrouver.
A travers la cuisine que sert Myriam, le projet qu’elle essaie de mener à bout avec son restaurant, c’est sa générosité qui apparaît. Sa culpabilité aussi : celle de la mauvaise mère, celle de la femme adultère, celle de la mauvaise, la perverse, celle de la femme qui a osé et s’est libérée de ce qu’elle vivait comme un carcan. Mangez-moi est un beau récit sur la liberté, la culpabilité, le plaisir et le partage. Sur une vie de femme avec toutes ses contradictions. Et surtout sur cet amour maternel que l’on conçoit comme une évidence et qui ne l’est parfois pas.
Petit à petit, Myriam recommence à faire confiance, à accepter l’échange et le partage. Cela ne va pas sans difficultés, sans paniques, mais l’apaisement se profile. Comme si à force de cuisiner pour les autres, elle acceptait enfin de se reconnaître elle-même et elle acceptait la possibilité que d’autres l’aiment.
 
 
Et puis il y a ces pages merveilleuses sur la cuisine, le plaisir de fabriquer, d’élaborer, ces noms de recettes, de plats qui font saliver. Le bonheur fou que ressent Myriam quand elle cuisine.
J’ai apprécié le mélange d’émotion et d’humour qui parcourt les pages, les réflexions de Myriam, ses gaffes. J’ai trouvé quelques longueurs. J’ai ressenti un brin d’agacement à « voir » Myriam ressasser sans cesse ses fautes. Mais j’ai aussi pris un réel plaisir à la suivre, elle et son sens de l’autodérision.  C’est un personnage attachant, fort et fragile, pétri de contradictions, rêvant de chaleur humaine et fuyant quand on la lui offre.
Les personnages secondaires sont tout aussi réussis et offre une bouffée d’humour : le fleuriste amoureux, le serveur, les deux lycéennes luttant pour terminer leurs devoirs de philosophie, etc. C’est un quartier de Paris qui prend forme sous les yeux dans lecteur dans le petit cadre de Chez Moi.
Sans compter au récit de toutes les galères qui attendent les restaurateurs en herbe ! Et les références multiples à la littérature ! J’ai adoré le clin d’œil à Alice au pays des merveilles : une petite fille qui rétrécit et grandit, une femme qui ne sait comment trouver sa place... Le parallèle est bien trouvé.
Mangez-moi est un roman qui fait du bien au moral et à l’imagination. Les odeurs, les textures, les couleurs mettent l’eau à la bouche ! Rien que pour ça, merci Agnès Desarthe ! 

Quelques extraits:
 
« Trop petite ou trop grande ma vie se disproportionne et je ne suis jamais à la mesure de ce que j’entreprends. Comme j’aimerais retrouver ma taille originelle, celle qui me permettrait de me glisser dans le gant du jour et de ne m’y sentir ni au large, ni à l’étroit »
 
«  L’homme qui jamais ne devait me faire pleurer, lui qui me l’avait promis, fait couler des ruisseaux de larmes sur mes joues, depuis mes aisselles et le long de mes jambes. Je ne lui en veux pas pour ce mensonge. La poigne du parjure est toujours meilleure que tout. Je désire qu’il me mente, et qu’il se dédise, et se contredise. Il croit tout savoir et ne sait rien. Et de lui, j’ignore tout et brûle de tout connaître. »
 
« Des choux luxuriants, des poireaux goguenards, des bettes cambrées, des carottes terreuses, des patidoux à la peau d’ocelot, des potimarrons à bonnets de lutin, des sucrines en forme de calebasse, des navets ravissants. »
 
« Ca veut dire qu’une relation entre un homme et une femme est comme un firmament. Tantôt bleu, tantôt noir, parfois nuageux, pluvieux même, peu importe, c’est toujours un seul et même firmament. La haine qu’on éprouve pour une personne que l’on a aimé n’a rien en commun avec les autres haines. Elle est nourrie de l’amour ancien. »
 
« Comment se fait-il que l’on ait plusieurs vies ? Peut-être ai-je tendance à généraliser. Peut-être suis-je la seule à éprouver ce sentiment. Je ne mourrai qu’une fois et pourtant, au cours du temps qui m’aura été imparti, j’aurai vécu une série d’existences contiguës et distinctes. »
  
D'autres avis de Théières et de non Théières: Flo, Florinette, Lily, Sylire, Anne, Gambadou, Amy.

Mangez-moi, Agnès Desarthe, Editions de l’Olivier, 2006, 306 p.

Commentaires

  • J'ai beaucoup aimé ce livre, je crois qu'il fait partie de mon "top ten 2007"

  • C'est bien pour ceux qui ne l'ont pas encore lu: il vient de sortir en poche.

  • Un roman revigorant !

  • Je n'irai pas jusque là, mais je l'ai bien aimé! Sans doute parce que j'ai eu le sentiment d'une certaine longueur... A un moment j'avais envie de bousculer un peu Myriam!

  • C'est vrai! Ca faisait un moment qu'il me faisait de l'oeil dans ce format d'ailleurs! Mais j'ai réussi à l'avoir à la bibliothèque! Pratique ce lieu de débauche quand même!

  • En tout cas il donne faim!!

  • je suis contente qu'il t'ait plu parce qu'il y a quand même un certain manque d'enthousiasme au Club des théières ! Alors que pour moi, ce livre pourrait aussi faire partie de mon top ten 2007, comme Gambadou :-)

  • Je l'ai lu, dévoré et apprécié! Mon commentaire est en retard mais j'y pense, j'y pense :-)

  • J'ai adoré, mais je n'ai pas aimé le Principe de Fredelle du même auteur. Je tenterai un troisième mais le temps me manque !

  • C'est un magnifique livre qui m'a fait découvrir un auteur que je ne connaissais pas !!

  • C'est vrai que j'avais été un peu dure! Mais bon... Je l'ai aimé malgré ce petit manque de rythme que j'épinglais alors!

  • Je le lirai avec intérêt!

  • Celui-là par contre je suis une des rares personnes à ne pas avoir aimé plus que ça. Je préfére Desarthe en littérature jeunesse.

  • @ Sylire: je vois ce que tu veux dire sur le manque de temps! J'ai bien aimé Cinq photos de ma femme (je crois que c'est le titre)!@ Florinette: je l'aime aussi beaucoup!@ Bellesahi: j'aime aussi beaucoup ce qu'elle fait en jeunesse!

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