Il ya des livres comme ça qu'il faut prendre le temps de digérer. Laisser le temps aux mots, aux phrases de reposer, puis de s'envoler. Avant de pouvoir ouvrir d'autres pages.
Pétur est un petit garçon islandais presque comme les autres. Il vit avec son père, la voix la plus célèbre du pays. Sa maman sismique, Lara, a disparu un beau jour. Toute en fantaisie et en tendresse, son enfance va laisser la place à la souffrance de grandir, de se construire et de comprendre, enfin, que l'éloignement n'est pas une solution.
C'est peu dire que j'ai aimé. Göran Tunström a cette manière bien à lui de faire basculer son lecteur dans un monde onirique, où le merveilleux est chose courante. La musique des mots, des notes et la musique de la terre qui gronde façonnent ses personnages. On est emporté dès les premières lignes dan ce pays où la poésie est un moyen de respirer.
L'histoire se centre principalement sur la relation du père et du fils. On voit le regard tendre du petit garçon évoluer, se transformer, devenir plus dur, plus amer. On voit ses remords et l'amour qui malgré tout persiste. On lit la douleur d'un père qui voit son enfant s'éloigner de lui, ne plus le comprendre. Certaines pages exhalent la souffrance à en couper le souffle. C'est un beau roman sur l'identité, la quête de l'accomplissement de soi.
Les personnages, principaux et secondaires, m'ont un peu fait penser à ceux de Paasilina, dans ces attitudes burlesques, dans ces répliques qui font mouche, dans ces relations sur le fil du couteau. Mais avec la drôlerie en moins. Ce n'est pas un reproche. C'est juste différente et savoureux à sa manière. Et cela n'empêche pas l'humour d'être bien présent! La description du mode de gouvernement et des hommes politiques est d'ailleurs savoureuse. Il faut lire les pages où ils se retrouvent à jouer au scrabble ou à chanter de l'opéra! Et la guerre diplomatique provoquée par un ballon de foot est tout bonnement extraordinaire. Certains passages sont peut-être un tantinet longs, parfois un brin confus, mais globalement, j'ai passé un excellent moment.
"En fin de compte tout ce que nous vivons n'est que divagations de l'esprit. En fin de compte nous aurons quand même investi nos vies, écrit une chanson, qui s'attarde sur la surface de la terre une minute encore après que s'est tue la dernière note. C'est la raison pour laquelle cette bougie est ici, pour dire: il y a bien eu un récit, la flamme est faible, vacille faiblement."
Voir l'avis de Chimère.
Göran Tunström, Le buveur de lune, Actes Sud, Babel, 1997, 302 p.
Commentaires
Le titre en lui-même est déjà très beau et poétique. Si le contenu du livre est dans la même veine, on doit se régaler !
Le contenu est dans la même veine et plus! Je ne l'ai pas laché de la soirée et je n'ai même pas réussi à ouvrir un autre livre après l'avoir fini! Le moins qu'on puisse dire c'est qu'il m'a fait un effet boeuf!
Comment résister après un tel article, je ne peux que m'empresser de le noter ! ;-)
Très attirant ! Et le titre est superbe !
Merci merci *fière, fière fière*!
je le trouve aussi très pétique. C'est d'ailleurs ce qui m'a décidée!
Ah tu as retenu le même passage que moi. J'ai tellement adoré ce livre, j'ai du lire plus de dix fois de suite la première page. Tûnström est un magicien du verbe, ou alors son traducteur est un génie.
Je me demandais justement si je n'allais pas faire une ode aux traduceturs! C'est vrai! Nous faire lire de telles merveilles! Franchement, j'ai relu moi aussi plusieurs fois les premières pages, et j'ai fait partagé mon emerveillement à ceux qui m'entouraient! Quand aux dernières lignes... Il m'a fallu du temps pour redescendre!