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  • Sous le regard de la dame blanche

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    Kaïna a fait promettre à sa petite-fille Mamata de fuir son village natal et le mariage qui l’attend, d’aller chercher à l’ombre de la Bonne-Mère un avenir meilleur. De fuite en lutte, de larmes en sourire Mamata va puiser en elle la force de continuer à vivre même si la réalité de l’autre côté se révèle bien plus cruelle que tout ce qu’elle aurait pu imaginer.
     
    Kaïna-Marseille est un texte fort.
    A travers le regard de Mamata, on découvre le cheminement d’une immigrée clandestine, d’une de celles qui se condamnent à l’exil et au danger. Elle raconte Mamata, elle raconte le voyage jusqu’à la capitale, la prostitution pour obtenir les faux papiers, le bateau, ce cousin violent qui l’accueille, la fuite et la peur, la famille que l’on se crée pour survivre, la tolérance au bout du chemin. Et enfin, face à la mer, elle parle à sa grand-mère pour lui permettre de reposer en paix. Sans rancœur, sans peur et sans amertume. Avec une volonté de vivre et une acceptation des bonnes comme des mauvaises choses qui force le respect.
    Les mots de Mamata sont ceux d’une enfant trop vite grandie, d’une femme prête à toutes les compromissions pour éviter le renoncement, pour obéir aux vœux de cette grand-mère morte pour que sa petite-fille ait la chance de vivre libérée des traditions et de la pauvreté, pour mettre au monde l’enfant qu’elle porte.
    Le rythme des mots, la poésie de la langue, la sérénité et la force qui se dégagent de ce personnage sont bouleversants. C’est un texte dense, riche, intense entre théâtre et poésie, roman et homélie.
     
    « Le troisième enseignement de ma vie de femme : mieux vaut un frère que l’on se choisit qu’un cousin dont on rêve. J’ai pris parole Kaïna. Le ciel a entendu. Que la nuit porte mon message. Tu peux aller en paix grand-mère, car depuis que je t’ai perdue, j’ai gagné un enfant, un frère et un nom. Isabelle Ternier t’honore chaque jour. Mamata aussi. Et Kaïna dans mon ventre. Elle qui vit déjà une vie de femme libre sans amertume. Je sais que tu seras en paix dans ton voyage. Car j’ai déserté l’enfance. »
     
    Ps: cette collection d'Actes Sud a fait l'objet de critiques virulentes sur le thème "que donnons nous à lire à nos adolescents". A titre personnel, je trouve que proposer aux adolescents des textes, certes difficiles par les thèmes traités et exigeants par le style ne peut être qu'un progrès. Surtout quand cela n'est pas fait dans la complaisance et le voyeurisme. J'ajouterais que le fait qu'un éditeur ajoute sa pierre à l'édifice d'une littérature "jeunesse" de qualité doit être salué.

    Catherine Zambon, Kaïna-Marseille, Actes Sud, coll. D’une seule voix, 2007, 60 p.