Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

l'histoire se répète

  • La vague - Todd Strasser et Stefani Kampmann

                                                                                                                       

    Fin des années 60 dans un lycée américain. Ron Jones, enseignant d'histoire est incapable de répondre aux questions de ses élèves sur ce qui a pu mener la population allemande à ne pas se révolter contre le pouvoir nazi. Il met donc en place une expérience de discipline stricte qui va le mener bien plus loin que ce qu'il pouvait imaginer. La Vague, mouvement créé presque comme un jeu de rôle acquière une vie propre et va ébranler le lycée.

    J'avoue ne pas avoir vu le film adapté du roman de Todd Strasser, mais lorsque j'ai vu passer le roman graphique adapté du roman que je n'avais pas plus lu, je me suis dit que ce serait un très bon moyen de découvrir cette histoire vraie et pour le moins édifiante. Ce fut une bonne pioche. Le récit de cette expérience hors du commun laisse sans voix. Qui ne s'est pas demandé en étudiant la Seconde guerre mondiale ce qui pouvait expliquer l'aveuglement des alliés comme des populations européennes à l'extermination des juifs et aux camps de concentrations, qui ne s'est pas demandé ce qui avait bien pu transformer des gens ordinaires en bourreaux? Bien sûr, pour ceux qui ont approfondi la question, il y a quelques pistes de réflexion, quelques débuts de réponse: crise sociale et économique, peur de la répression, antisémitisme latent, réaction face à des transformations perçues comme vecteurs de décadence, fascination du pouvoir... Mais ce qu'a fait Ron Jones a été plus loin. Sans réelle préméditation, il a mis en place les conditions d'une expérience grandeur nature d'installation d'un régime fasciste. C'est fascinant de voir de quelle manière les adolescents dont il a la charge sont fascinés par la discipline qu'il propose alors même qu'ils étaient plutôt évaporés auparavant. C'est fascinant de voir de quelle manière le mouvement se propage jusqu'à induire des modes de comportement et de pensée fascistes. C'est fascinant et profondément effrayant. Soudainement, des adolescents viscéralement individualistes entrent dans un mouvement totalitaire. Tout y est: la perte d'indépendance de l'individu, la fin de toute pensée indépendante face à la pression du groupe, les attitudes agressives face à tout ce qui est extérieur et face à tous ceux qui mettent en danger le groupe, perte de tout esprit critique... Les ressorts de cette rupture sont exposés sans fioriture et sans tentative d'explication. Il n'y en a sans doute pas. Le plus intéressant reste sans doute que ce n'est pas seulement la manière dont les adolescents basculent qui est présentée, mais aussi la fascination que le pouvoir qu'il vient d'acquiérir exerce sur un professeur que rien ne portait à devenir un dictateur.

    Dépassé par les événements, par ses propres réactions face à cette expérience, l'enseignant y met un terme de telle manière que la leçon a du s'imprimer de manière durable dans les souvenirs de ses élèves.

     Le roman graphique est servi à la fois par ce scénario passionnant et par un trait qui très rond et dynamique qui donne corps au récit et en rend les personnages attachants et presque réels. J'ai apprécié cette lecture. Le roman par contre, pêche par un style très, très faible, entre le style journalistique et un roman jeunesse un peu simplet. Dommage.

    Reste que l'un et l'autre sont à découvrir, même s'ils ne brillent pas par la finesse de leur analyse. C'est un peu rapide, le tout reste en surface, mais c'est une manière de découvrir originale et percutante d'aborder le thème du fascisme et celui du nazisme et de décortiquer les ressorts de ces systèmes politiques. La réponse par l'exemple à la traditionnelle question de savoir si l'histoire est appelée à se répéter.

    Sylvie l'a lu!