Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

contes détournés

  • "Enchanté", dit l'ours

     
     undefined
    Ivan découvre un jour au cœur de la forêt ukrainienne une jeune fille endormie sur un autel. Terrifié par le lieu et la présence étrange qu’il recèle, il prend la fuite mais ne pourra jamais totalement oublier cette vision. Au point que des années plus tard, étudiant en anciennes langues slaves et en contes, il revient. Il revient et trouve bien la belle endormie. Mais il ne fait pas bon oublier que derrière les contes se cache toujours un brin de vérité. Car embrasser sa belle va le projeter mille ans en arrière dans un monde où la magie n’est pas un vain mot et ou ma sorcière Baba Yaga menace de sa mauvaiseté le petit royaume de Taïna. Contraint au mariage avec la princesse, errant dans un monde dont les codes lui sont inconnu, Ivan va devoir comprendre et sa battre.
     
    Le moins qu’on puisse dire c’est qu’Orson Scott Card est un sacré conteur. Pourtant, le principe de départ n’est pas forcément très enthousiasmant : un jeune héros plutôt mignon embrasse la belle au bois dormant et se retrouve au 9e siècle. Certains en ont fait Les visiteurs, d’autres en font un exercice assez magistral.
    Orson Scott Card réutilise un certain nombre d’éléments de contes traditionnels juifs et slave avec une liberté qui rend le tout plutôt réjouissant. Outre la découverte d’un folklore que je connaissais un tout petit peu, j’ai aussi eu le plaisir de rire. La Belle au bois dormant se révèle être un princesse belle comme le jour certes, mais aussi courageuse, un brin acariâtre, assez solide pour faire les moissons comme tout le monde et chrétiennement prude. Le prince charmant débarque tout nu chez son futur beau-père, n’arrive pas à tenir une épée et se demande comment planquer les précieux manuscrits qui pourraient lui permettre de devenir un chercheur connu. Et je ne vous parle là que des personnages principaux ! Baba Yaga est moche et méchante mais très maligne et abominablement cinglée, son époux (sous contrainte) est le dieu de l’hiver lui-même et travaille à contrarier une épouse qu’il ne peut pas ne pas aimer, sortilège aidant. Quand au petit peuple, il cultive son blé, potine à tout va et tente de défendre son monde. Le tout a un effet assez comique. Mais en même temps, Card sait introduire le suspense à travers les enjeux des premiers pas d’Ivan dans ce monde, ses amours compliquées avec la princesse. C’est assez attendrissant ces deux grands enfants qui s’aiment mais qui n’arrivent pas à se le dire. En plus de tout ça, la réflexion de fond sur la rencontre des cultures, le regard que l’on porte sur un Autre dont les habitudes et les coutumes sont différentes est plutôt bien menée. Et le rappel du fait que les contes de fée, les traditions populaires et orales (retranscrites certes, mais orales au départ) ont toujours un fond de vérité ne peut que faire du bien.
     Du rire, de l’action, de la cervelle que demande le peuple !
     
     

    Orson Scott Card, Enchantement, Points fantasy, 2007, 576 p.