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Mémoires de deux jeunes mariées - Honoré de Balzac

9782070372683FS.gifQue les choses soient tout de suite claires, je n'aime pas Balzac (j'entends d'ici le hurlement outré de Fashion), je ne l'ai jamais aimé, mais allez savoir pourquoi, de temps à autre, me vient la lubie de me prouver que j'ai tort. Dans ces cas-là, je m'empare généralement d'un roman de ce bon vieil Honoré que je laisse généralement tomber avec un soupir de souffrance absolu après un nombre plus ou moins important de pages. Pour vous donner un exemple, je n'ai jamais passé les quarante premières pages du Père Goriot, Splendeur et misère d'une courtisane a tenu le choc un peu plus longtemps puisque je suis parvenue au début de la dernière partie et seules sont rescapées du massacre les oeuvres que j'ai du lire contrainte et forcée pendant mes études. Les aventures du colonel Chabert m'ont laissé un souvenir perplexe, mais j'avais 13 ans et quelques excuses. J'admets avoir plutôt apprécié La recherche de l'absolu, mais la peau de vache qui me servait de professeur de lettre cette année là m'aurait fait aimer n'importe quoi tant était grand son talent à être peau de vache ET passionné par son sujet (et à porter les cravates les plus improbables et les moins assorties à son costume, mais là n'est pas le sujet). Tiens, j'allais oublier cette pauvre Eugénie et son triste destin... Pour tout dire, je ne me souviens quasi plus de ce en quoi consistait le triste destin de cette brave et pauvre Eugénie, si ce n'est qu'il contenait un banc et de la mousse. Enfin je crois. Bref, entre Honoré et moi ce n'est pas gagné, et pour tout dire, ce n'est pas Mémoires d'une jeune mariée qui va me faire changer d'avis sur la question.

Mais venons-en au sujet de ce billet et à nos deux jeunes mariées. Louise de Chaulieu et Renée de Maucombe sont amies intimes depuis leurs études au couvent des carmélites de Blois. Toute leur vie, elles vont échanger des lettres racontant leur vie familiale et amoureuse. La première, Louise, est destinée au couvent par ses parents, mais se révoltant, elle fait son entrée dans le monde et se permettra deux mariages d'amour, le premier avec un noble espagnol qui la laissera veuve éplorée, le second avec un poète plus jeune qu'elle qui la fera mourir d'amour. Face à elle, Renée qui tente de la raisonner et de lui donner en exemple son mariage de raison et sa vie heureuse de mère de famille malgré les luttes qu'elle a du mener contre elle-même dans les premiers temps d'une union dans laquelle elle était entrée avec la volonté de se sacrifier et de se dévouer à un homme qu'elle n'aimait pas plutôt que de regagner le couvent.

S'il y a une chose que je reconnais à Balzac, c'est sa capacité à créer et faire vivre des personnages étonnants. Louise et Renée sont, chacune à leur manière, assez fascinantes. Louise, amoureuse de l'amour, incapable d'entendre raison et refusant la tiédeur d'une union sans passion. Renée capable de l'abnégation la plus totale, mère dévouée. Louise et Renée, chacune à sa manière monstre d'égoïsme et de rouerie, chacune à sa manière affirmant sa liberté dans les chaînes que leur condition de femme leur impose. Par le mode épistolaire, Balzac entre dans leur intimité et livre leurs échanges autour de leurs conceptions opposées de l'amour et du mariage. Mais s'il lui arrive de faire preuve d'une certaine finesse psychologique, ses personnages m'ont plus paru être l'incarnation de principes que des êtres de chair et de sentiment. L'une est l'Amoureuse, l'autre la Mère, et chacune défend son pré carré avec moult arguments et j'oserais dire, arguties. Pour être franche, j'ai trouvé cette lecture longue et fastidieuse ce qui est un comble pour un récit qui dure un peu moins de 300 pages. Les premières lettres, où Louise et Renée racontent la découverte qu'elles ont de leur nouvelle vie sont intéressantes: elles montrent la société et ses moeurs à travers les yeux de deux jeunes femmes qui ont oublié d'être bêtes et dont l'esprit leur permet de percer à jours le fonctionnement du monde dans lequel elles entrent. Puis, chaque lettre redit peu ou prou ce que disait la précédente: Louise répète les mêmes erreurs, porte toujours ou presque le même regard sur la vie de Renée, et inversement. Chacune reste campée dans sa conception du monde. Seul intérêt de la chose, Balzac montre ainsi ce que peut cacher la façade de mère ou d'épouse présentée au monde et dit bien que dans la société dans laquelle il vit, mariage et amour sont antinomiques, il confronte, il montre parfois la cruauté de cette amitité féminine, la jalousie, les doutes. Il crée aussi et au-delà de cet aspect deux personnages de femmes qui cherchent le pouvoir et dans une certaine mesure, l'obtiennent et font preuve d'une ambition certaine. Ce qui est dommage, c'est que finalement, le débat sur le mariage, sur la famille et sur l'amour prend le pas sur les personnages et leur histoire, ce qui rend la plupart des lettres assez fastidieuses malgré de beaux passages. Je passe sur le fait que les deux parties m'ont parues un miroir assez lassant et sur le fait que nos deux héroïnes ont fini par m'agaçer prodigieusement. Il semble que les grandes envolées lyriques sur l'amour et la maternité ne soient pas ma tasse de thé.

Bref, si la langue est belle et le fond intéressant, c'est de nouveau un semi-échec! Mais je ne m'avoue pas vaincue!

 

Lilly en parle. Marie aussi.

Balzac, Honoré de, Mémoires de deux jeunes mariées, Gallimard, 1981, 344 p., 2/5

Commentaires

  • Nous avons un point commun et comme ça Fashion pourra pousser des hurlements outragés sur nous deux parce que Balzac et moi ça n'a jamais été une grande passion, j'ai cru mourir d'ennui avec Eugénie Grandet. Par contre, je n'ai pas ta constante, j'ai renoncé à retenter l'expérience, je suis admirative. Bravo !

  • Bon, je viens au secours du pauvre cœur de Fashion. J'adore Balzac, et j'ai bien aimé ce livre, même s'il n'est pas mon préféré. J'espère que la prochaine tentative sera plus concluante !

  • Je l'ai noté dans ma LAL. Il existe une version pour la jeunesse Tu te maries et moi j'aime...

  • J'ai eu une courte période Balzac avec les illusions perdues, Splendeurs et misères... Mais j'ai du mal à adhérer à la plus grande partie des romanciers français, à part Zola, et George Sand plus récemment !

  • Ben moi j'aime bien Balzac, ses personnages et ses romans à rallonge. Découvert avec le pere Goriot au lycée, je dois dire que je me lirais bien toute son oeuvre lol !

  • je dois dire que ma seule expérience avec un roman (et non une nouvelle de Balzac) remonte à la 3ème, nous étions en binome et devions étudier une oeuvre. Devine qui s'est débrouillée pour ne pas lire le roman???? :D Cela dit, j'avais beaucoup aimé Le colonel chabert, et j'ai lu récemment La maison du chat qui pelote qui m'a plu aussi. de là à me lancer dans un roman.. je souffre déjà assez sur Victor Hugo et ses travailleurs de la mer...!!!

  • Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhhhhhh!!!!!!!!!!!!!
    C'était mon hurlement outragé.
    C'est tout.

  • Nan mais moi j'aime beaucoup Balzac, un des rares qui trouvait grâce à mes yeux à l'adolescence. Un que je comprenais, et c'était pas gagné à l'époque :)
    J'ai d'ailleurs prévu de le relire :)

  • Je trouve ça beau d'insister même dans des cas critiques comme celui-ci :) Je dois essayer avec Flaubert, mais je n'y arrive toujours pas (je devais relire "Madame Bovary" l'an dernier déjà!)

  • Tu n'es pas la seule à ne pas aimer Balzac (à part La Peau de Chagrin, las-tu lu?)mais contrairement à toi, je m'avoue vaincue.

  • @ Chimère: c'est juste de l'inconscience pure et mon esprit un brin, je dis bien juste un brin têtu!
    @ Lilly: le temps de me remettre de cette expérience, quelques mois et hop, j'aurai un petit retour d'archarnement! Il ne sera pas dit qu'Honoré me résistera!
    @ Edelwe: ouiiii! Je me souviens l'avoir vue passé cette version! Je vais essayer de mettre la main dessus pour voir un peu!
    @ Canthilde: j'y viens tout doucement et je commence à apprécier des auteurs dont la simple mention me faisait hurler il y a quelques années! Comme quoi rien n'est perdu!
    @ Choco: cette idée me file des cauchemars!! Il faut dire que quand tu vois la place que ça prend sur les étagères de la bib, tu te dis qu'il y en a pour toute une vie!
    @ Choupynette: ma soooooeeeeuuuur! Enfin, ceci dit, j'aime bien Hugo (mais j'avoue qu'il m'arrive de sauter des pages)
    @ Fashion: mais tu m'aimes quand même va! Après tout nous partageons le même amour incompris pour le grand D.! ;-)
    @ Cuné: mon dieu, mais quel courage!
    @ Lou: oh, tu sais, un moment d'absence est si vite arrivé. Il y en a qui se retrouvent dans des lits inconnus, moi c'est avec Balzac en main!! ;-))
    @ Valérie: c'est juste à mettre sur le compte de mon esprit de contradiction tu sais! Et non je n'ai pas essayé La peau de chagrin! Un de ces jours sans doute!

  • quel sont les point commun entre louise et renne

  • @ Amertume: devinette?

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